Cheval Magazine

Le cheval au secours des jeunes

LE CHEVAL au secours des jeunes

- TEXTE ET PHOTOS : MARIE-ANAÏS THIERRY (SAUF MENTION).

Redonner confiance, favoriser la réinsertio­n, offrir une bouffée d’oxygène à des jeunes en difficulté. Au-delà du sport et de la pratique, le cheval est aussi un excellent moyen de réinsertio­n. Cheval magazine a choisi de mettre en lumière plusieurs initiative­s où les chevaux viennent au secours d’adolescent­s en difficulté.

Uun jour d’hiver en Ile-de France aux Ateliers de Remobilisa­tion par l’Équitation du réseau UCPA Saint-Maur, dans le Val-deMarne. Adossé à l’immense centre d’entraîneme­nt de trot de Grosbois, le centre équestre de SaintMaur s’apprête à accueillir ce lundi un groupe de huit lycéens venus en voisins. Sept garçons. Une fille. Tous cavaliers en herbe. En coulisses, Hélène Reinaud Chapuis s’active. Elle est leur monitrice, leur référente. « Ce sont des jeunes qui sont sortis du système scolaire et qui ont été réunis au sein d’une “seconde passerelle”. L’équitation fait aujourd’hui entièremen­t partie de leur emploi du temps : ils viennent ici une fois par semaine. Je fais partie de l’équipe pédagogiqu­e, aux côtés des autres professeur­s », explique-t-elle. Elle les suit depuis plusieurs mois. Ensemble, ils ont d’abord travaillé à pied, les jeunes ont observé les chevaux à l’état naturel. Ils ont appris à les côtoyer, à les connaître. « Au premier abord, ils se demandent un peu ce qu’ils font là. Pour la quasi-totalité, ouvrir la porte d’un centre équestre ne leur avait sans doute jamais traversé l’esprit », reconnaît-elle. « Au départ, les jeunes ont forcément des a priori avec le cheval et l’équitation, comme ils ont des a priori dans leur quotidien auprès des gens qu’ils rencontren­t. L’idée est d’utiliser cette relation qu’ils entretienn­ent avec le cheval dans leur futur, dans la société. » Alors elle suit son leitmotiv : prendre son temps et surtout, écouter les besoins de chacun. Tels sont les principes clés des Ateliers de Remobilisa­tions par l’Équitation (ARPE) qu’Hélène Reinaud Chapuis coordonne sur trois centres équestres francilien­s. Un projet porté depuis une vingtaine d’années par le réseau UCPA auprès de différente­s structures de réinsertio­n sociale.

De la théorie à la pratique

L’heure de l’atelier a sonné. Et la revue des troupes est effectuée. Place à la formation des duos cavaliers/chevaux. Les choix se font alors entre le coeur et la raison. « Je les laisse choisir. Souvent, ils prennent confiance sur des doubles poneys et souhaitent ensuite s’essayer aux chevaux », souligne Hélène. C’est le cas d’Abdoulaye qui choisit « le plus grand » de la troupe, le tranquille Querprat et son bon mètre soixante-dix au garrot. L’enthousias­te Lorenzo opte pour un modèle plus petit, et plus vif. « Moi, j’ai pris Rocket… parce que c’est le plus rapide ! », lâche-t-il en souriant. Et pour Gabin, ce sera le gris Playboy : « Bon ok, je suis tombé avec la dernière fois, mais je l’aime bien ! ». S’ensuit alors le rituel habituel : «Au fil des séances, un cadre a été mis en place. Ils savent qui ils doivent aller

chercher et connaissen­t les étapes du pansage et aident à seller », explique la monitrice. L’oeil attentif, elle guide les uns et les autres. Ici et là, des liens se tissent entre les apprentis cavaliers et leur monture. Et les questions fusent, y compris de la part du prof de sport, venu accompagne­r les élèves. « Moi je ne suis pas spécialist­e », plaisante-t-il. « Mais je dois dire que ça me plaît bien, je suis content de les accompagne­r, de participer à la préparatio­n avec eux… ». La joyeuse bande de cavaliers rejoint le manège, quelques dizaines de mètres plus loin. « Je vous ai fait un petit parcours », prévient Hélène en pointant du doigt les chandelier­s installés en ligne, le long de la piste. L’heure est à la révision des bases, et notamment de la direction. Ces jeunes, qui n’avaient pour la plupart jamais monté à cheval, commencent à se sentir plus à l’aise. Ils enchaînent les slaloms, en groupe puis chacun leur tour. « Vous allez maintenant toucher les oreilles du cheval, puis la queue, et votre casque. Ainsi de suite... », leur demande-t-elle. « Chacun va à son propre rythme. Certains ont un peu plus de crainte. Et d’autres, au contraire, arrivent à cette phase où ils n’ont plus peur de l’animal et veulent se challenger, veulent aller vite ! », commente l’enseignant­e. L’apprentiss­age du trot enlevé se rapproche… « Allez, on s’encourage ! Attrape la crinière si besoin. Dans ta tête, fais tic-tac-tic-tac, et quand ça fait tic, tu pousses sur tes pieds », conseillet-elle. L’heure tourne. Chacun tente un dernier tour de piste au trot. Il est temps de se regrouper et de mettre pied à terre. « Déjà ? », répond l’un deux. Les derniers contacts se font au box. « C’est vrai qu’au début, j’avais un peu d’appréhensi­on », admet Imane, la jeune fille du groupe. « Je n’étais pas super à l’aise. Mais maintenant ça va mieux. Ça me fait plaisir de venir ici faire du cheval, ça me vide la tête », poursuit-elle. Que retenir de cet atelier ? « Travailler avec le cheval a plusieurs intérêts. Parce que le cheval ne juge pas, il est dans l’instant présent et accueille la personne telle qu’elle est », précise Hélène Reinaud Chapuis, également titulaire d’un diplôme en équicie. « En fait, le cheval a deux fonctions essentiell­es en médiation. Une fonction “maternelle” par le biais du portage, il éveille des sensations archaïques qui relie le cavalier à l’enfant qu’il était. Le cheval accompagne, soutient, apporte de l’apaisement. Il a également une fonction “paternelle”. Par sa prestance, il peut impression­ner, s’imposer et fixer de lui-même des règles et un cadre à la personne qui vient à sa rencontre. Le jeune va (re)trouver ses repères, construire son identité, son rapport au monde qui évoluera tout au long de sa vie selon ses expérience­s et ses apprentiss­ages. Ces ateliers équestres constituen­t une parenthèse dans la vie des jeunes, une coupure avec leur quotidien, leurs routines. Ce n’est que du positif ! », conclut-elle.

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Des liens se créent très vite entre les jeunes et les chevaux.
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 ??  ?? L’équitation est intégrée à l’emploi du temps des élèves. Ils rejoignent une fois par semaine les écuries de l’UCPA Saint-Maur.
L’équitation est intégrée à l’emploi du temps des élèves. Ils rejoignent une fois par semaine les écuries de l’UCPA Saint-Maur.

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