Le statut, un véritable flou artistique ?
Le manque d’existence d’un statut défini pour les artistes équestre est une problématique majeure, entraînant pour l’artiste la multiplication des statuts afin de pouvoir exercer la totalité de ses activités.
Vous l’aurez compris, être artiste équestre implique généralement d’avoir une ou plusieurs activités à côté, comme l’élevage, la pension ou les cours par exemple. Car bien souvent, les seuls spectacles ne vont pas générer assez de revenus. Autant de possibilités impliquant différents statuts qui n’incluent pas les activités des artistes du spectacle vivant que sont les artistes équestres. Lors du dernier salon Cheval Passion, en janvier 2022, une conférence à ce sujet était organisée, rassemblant une foule de personnalités du spectacle. « Quand on est artiste équestre, on possède des chevaux, et ces chevaux sont des artistes qu’il faut plusieurs années pour former. Quand il a fini son spectacle, l’artiste équestre rentre chez lui et reprend son quotidien en nourrissant les chevaux, en les montant, en prodiguant les soins, ce qui est un peu l’inverse d’un intermittent du spectacle qui en rentrant chez lui continue à recevoir des revenus », développe Maurice Galle, président de la commission spectacle de la FFE. « Dans le droit français, des artistes qui se produisent doivent être salariés. De façon pratique, si c’était vraiment appliqué, les artistes ne pourraient pas déduire leurs charges qui sont importantes, celles d’entretenir et préparer un cheval à l’année », ajoute François-Xavier Bigo, membre du Syndicat national des artistes équestres. Au jeu du statut pour se produire en spectacle, c’est chacun sa solution ! Comme nous l’explique Isaora Marquès, rares sont les artistes qui se mettent en auto-entrepreneur du spectacle vivant, « on a donc de fortes chances de dépasser le chiffre d’affaires annuel autorisé ».
Le statut associatif est, lui, un peu plus développé, mais attention également à ne pas dépasser un certain chiffre. Ainsi, les artistes effectuant beaucoup de spectacles vont bien souvent s’installer en société. « Normalement, légalement, on n’a pas le droit d’avoir une association si elle porte concurrence dans un spectacle à des artistes en société par exemple. Parce qu’il y en a qui payent des impôts, la TVA et d’autres qui ne
payent rien. Ça ne devrait pas exister mais comme ils n’ont pas de réponse à apporter à cela et bien ça existe », détaille Isaora Marquès, qui a notamment rédigé un mémoire juridique autour du non-statut de l’artiste équestre. Le statut d’intermittent, lui, serait plutôt intéressant pour les artistes ne possédant pas de chevaux et travaillant pour une troupe ou un parc d’attraction par exemple.
Un travail de sensibilisation
Pour le moment, l’heure est à la réflexion et à la sensibilisation d’un maximum de monde autour de cette situation. Cela passe par le projet Graine d’artiste (lire encadré ci-contre), qui vise à toucher l’Education nationale mais également les mairies en faisant des centres équestres des salles de spectacle pour promouvoir l’artiste équestre. En parallèle, « de potentielles solutions sont en train d’être négociées avec les ministères concernés, précise François-Xavier Bigo. Le problème, c’est que les artistes fonctionnent tous de différentes façons. Il faut qu’on fasse un état des lieux de la façon dont ils fonctionnent, pour trouver les solutions les plus adaptées que ce soit d’un point de vue fiscal ou social. On a préparé une enquête et on est en pourparlers avec l’IFCE pour qu’ils prennent en charge le dépouillement. »
De l’avis de nos spécialistes, plutôt que de créer un statut spécial, peutêtre que le plus simple serait de faire entrer l’activité de spectacle équestre dans le statut agricole. Mais toutes ces questions n’en sont encore qu’au début, et vont demander une forte mobilisation des différentes instances. Néanmoins, le sujet est lancé et nul doute qu’il devrait animer de nombreux débats.