L’avez-vous vu ?
Réputée pour ses impressionnantes densités de cerfs de Virginie, autrement nommés « chevreuils », l’île québécoise d’Anticosti est un lieu particulièrement sauvage où les deux principaux modes de chasse en usage sont l’approche et, dans une moindre mesure, l’affût. Ces deux techniques, rassemblées sous la judicieuse appellation « chasse fine », réclament un calme olympien, des sens exacerbés, un certain savoir-faire et quelques accessoires. Le novice ne peut se passer des services d’un guide chevronné. C’est en compagnie de l’un de ces coureurs des bois, Samuel Boudreau, de l’organisation Safari Anticosti, que nous avons pu goûter, en novembre 2015, aux subtilités de ce passionnant exercice. Alternant marches silencieuses et poses durant lesquelles le PH pratique l’appel, grâce à un appeau, ainsi que le « rattling », action consistant à entrechoquer violemment deux bois de cervidés, nous avons, au cours d’une matinée, croisé la route de l’animal présenté ici. Usant de tous les subterfuges, le guide a d’abord décelé quelques discrets craquements de brindilles trahissant le rapproché du cerf. Quelques instants plus tard, Samuel nous indique du coin de l’oeil que le visiteur est là, juste devant, à moins de vingt mètres. Il nous faut pourtant un bon moment pour deviner enfin la silhouette à travers les branchages. Nous sommes bluffés par tant de mimétisme. Le cervidé est immobile, sur ses gardes. Pour le rassurer, le guide rassemble ses bois de « rattling », les porte à la hauteur de son visage et simule les mouvements de tête d’un chevreuil. La supercherie fonctionne à merveille. Le gibier se détend peu à peu. Il est à notre merci mais son panache ne présente aucun intérêt. Après une courte séance photo, nous rebrousserons chemin. Sacrée rencontre.
Philippe Aillery