Du lombric aux granulés
Les tendeurs de vanneaux sont aussi de redoutables chasseurs de lombrics. « Cela fait partie des nombreux rituels de la tenderie aux vanneaux, introduit Yves Guérin, qui en ramasse par poignées. Le nourrissage de nos appelants se fait à base de lombrics vivants que nous ramassons chaque jour. C’est généralement en fin de journée de chasse que nous consacrons une bonne demiheure à cette tâche. Il faut d’abord trouver une bonne place qui en regorge. Les remontées de bulles terreuses abondantes constituent le meilleur indice. L’idéal est de cibler une zone à faible végétation qui facilite leur repérage une fois sortis du sol. La technique est simple. Il suffit de prendre successivement appui sur une jambe puis sur l’autre, en donnant un léger coup de talon dans le sol. Les vibrations répétées durant plusieurs minutes font immanquablement sortir les occupants du sol. À l’évidence, la terre doit être humide et meuble. » En cas de gel, les tendeurs se retournent vers d’autres types de nourriture (du foie coupé en lamelle ou des pâtes cuites). Il semblerait que depuis quelques années, l’emploi de granulé (à limicoles) soit largement employé par les tendeurs, les vanneaux raffolant de cette nourriture moins contraignante à se procurer.
lière. Nous n’en faisons pas d’élevage. Ils sont tous issus de nos filets. Ce sont souvent nos premières prises et les derniers à nous quitter. La tradition veut que les appelants soient relâchés le soir du dernier jour de tenderie. Le revers, c’est qu’il faut en reprendre en début d’année suivante. Mais sur ce point, l’entraide est bien réelle entre vagnolis et le premier qui fait poser en donne aux autres. » Belle leçon !
Jusqu’au dernier
Des textes datant de 2000 ans attestent de l’emploi de filets pour la chasse des oiseaux. En France, les plus anciennes traces de la tenderie aux vanneaux remontent à plus de cinq siècles. Aujourd’hui, une poignée d’entre eux font toujours vivre ce « fait ethnologique » comme le qualifie André Théret, figure de la tenderie aux vanneaux. Supprimer cette pratique reviendrait à rayer la fauconnerie, par exemple, qui, elle, est désormais inscrite au Patrimoine immatériel de l’humanité. « Je pense que le moindre chasseur, le plus petit d’entre nous, mériterait d’être défendu dans sa passion. Jusqu’au dernier des tendeurs, il faudra se battre », conclut Yves Guérin, qui se définit comme simple chasseur. « Nous, vagnolis ardennais, nous savons que pratiquer notre chasse est un acte de résistance. » texte et photos Thibaut Macé