Notre amie la viande
Etait-ce trop tôt ? Ce n’est pas le tout d’avoir raison, il faut avoir raison le moment venu. Au bon moment. Depuis maintenant de nombreuses saisons, la Fédération nationale des chasseurs cherche à communiquer sur le thème de la viande de gibier, ses qualités nutritives. Toutefois, cela semble s’être fait par à-coups. 2004, le professeur P.-H. Ducluzeau, praticien hospitalier au service de nutrition-diabétologie au Chu d’Angers (également maître de conférences des universités et docteur en 3e cycle de science sur le métabolisme humain), livre les résultats de l’étude commandée par la Fnc sur les atouts de la venaison. Travail passionnant, mais disons que l’essai fut insuffisamment transformé. 2008, la marque Gibier de chasse-Chasseurs de France est créée. Lentement, le principe va émerger. La marque se fit d’abord connaître auprès d’un réseau de bouchers-charcutiers puis auprès de cuisiniers. En 2016, un partenariat est lancé avec les chefs de l’Eurotoques. L’année prochaine marquera la régionalisation du principe par la Fdc des Hautes-Pyrénées, laquelle adoptera sa propre marque et son propre réseau de distribution de venaison et de ses produits dérivés (terrines et saucissons). Il faut savoir que le pari n’est pas aisé. À travers la France, abattoirs et ateliers de traitement de la viande ferment les uns après les autres. Parfois, les chefs installés au coeur de grandes régions cynégétiques doivent s’approvisionner en région parisienne. Un comble.
Dans le même temps et apparemment de façon paradoxale, le « locavorisme » – l’art de s’alimenter en produits locaux – se développe. La viande n’échappe pas au phénomène. Même le jeune et citadin patron de Facebook, Marc Zuckerberg, rejoint le combat, comme nous vous l’avions narré dans ces colonnes. Et de déclarer récemment : « Vous appréciez davantage les animaux quand vous les chassez vous-mêmes. » Aux États-Unis, on appelle ce type d’individu un locavor hunter, c’est-à-dire un chasseur chassant pour consommer son propre gibier. Version améliorée de notre cher viandard. La Fnc nous apprend ainsi que le dénommé Jackson Landers enseigne à ses clients « comment chasser, dépecer et couper la viande de gibier ». Ces derniers, des new hunters – nouveaux chasseurs – « ont entre 25 et 35 ans et souhaitent réduire leur impact sur l’environnement mais aussi manger plus raisonnablement en boycottant les produits industriels et les dérives qui en découlent… »
Le réalisateur, explorateur et chasseur Nicolas Vanier insiste : « Il y a des gens en circuit court qui, certes mangent du poisson, mangent de la viande, et parfois vont la chercher avec un fusil ou une canne à pêche, mais qui respectent beaucoup plus les animaux que les autres. » Dit à la télévision devant des millions de personnes, cela porte. Cela porte d’autant plus que Nicolas Vanier est une personnalité populaire. Et que son nouveau film, L’École buissonnière actuellement en salle (avec trois grands acteurs que sont François Cluzet, Éric Elmosnino et François Berléand), offre le même message. Une histoire d’homme, de nature. De capture et… de venaison. Bonne lecture à toutes et à tous.