Tanzanie, Pasanisi c’est fini
Dans une lettre ouverte en date du 1er mars et que nous publions ci-dessous (traduite) in extenso, Éric Pasanisi a fait part de sa décision de mettre un terme à l’activité chasse de sa compagnie Tanganyika Wildlife Safari (Tawisa) en Tanzanie. Une décision mûrement réfléchie dont il s’explique. Avec cet arrêt, un pan entier du monde de la grande chasse en Afrique s’écroule. Et l’avenir de la faune du pays risque malheureusement d’être mis encore plus à mal… À noter également que Tanzania Game Trackers Safaris (Tgts), deuxième plus importante compagnie de safaris en Tanzanie après Tawisa, a également mis la clef sous la porte.
« Je confirme aujourd’hui, que j’ai restitué tous mes blocs de chasse gérés par mes différentes compagnies. Ma famille a opéré pendant plus de 40 ans dans le pays. Notre compagnie fut ainsi la plus ancienne de Tanzanie. Nous avons été le plus gros opérateur de Tanzanie et de toute l’Afrique. Nous détenions la plus grande partie du Selous, avec les meilleurs blocs. Les mêmes depuis 1978. Blocs que j’ai rendus aujourd’hui. Nous sommes passés de 126 safaris par an à une poignée en raison de la fermeture des importations américaines de trophées d’éléphants et de lions. Nous ne pouvons plus booker suffisamment de safaris de 21 jours pour maintenir notre activité sans les importations de lions et d’éléphants aux États-Unis. Nos pertes financières sont en augmentation constante. Je dois donc arrêter. Lorsque les importations d’éléphants et de lions aux États-Unis ont été menacées, nous avons relevé notre investissement dans l’antibraconnage à hauteur de 2,4 millions de dollars sur trois ans. Nous avons nous-mêmes financé 100 game-scouts dans le Selous pendant de nombreuses années. Vous avez vu nos livres de compte et pris copies de nos actes comptables pour les autorités américaines. Vous avez vu les coupures de journaux sur les véhicules et l’avion que notre fondation a donnés. Vous avez même assisté aux cérémonies publiques avec le ministre. Rappelez-vous le travail accompli ! Je sais que le directeur du Selous a écrit aux États-Unis pour dire combien notre présence était importante pour contrôler le braconnage. Dans le même temps, j’ai offert de nombreux grands safaris au Shikar* pour financer les 500 000 $ nécessaires aux études sur l’âge des lions. Travail qui a été ignoré par l’Usfws **, peut-être à cause de Craig Packer***, je ne sais pas. Les efforts de la Tanzanie, de mes compagnies et de ma fondation ont été complètement ignorés par l’Usfws. Nous avons déjà travaillé à perte trop longtemps. Il est temps d’arrêter mais je ne peux garantir que la biodiversité des zones de chasse perdurera maintenant. Notre implication dans la lutte contre le braconnage est devenue presque nulle cette année en raison de nos pertes de revenus. Je pense que les décisions de l’Usfws finiront par exterminer toute la faune tanzanienne en dehors des parcs nationaux en raison de leur détermination à arrêter l’importation de trophées aux États-Unis. Tout finira très vite, et la faune disparaîtra dans ces zones qui représentent près d’un tiers du territoire tanzanien. J’ai déjà rendu 10 blocs ces dernières années et sans chasseurs en brousse, il va être très difficile de sauver nos derniers éléphants. Nos pauvres éléphants, nos pauvres animaux, honte sur… La vérité, c’est que tout le monde s’en moque, et que personne ne se rend compte des dommages irréversibles causés par de telles décisions. C’est certainement The end of the game**** si votre gouvernement ne réalise pas et n’aide pas la Tanzanie. Ceci dit, c’est désormais trop tard pour moi, et ce le sera très vite pour les autres organisateurs. » *Shikar : Club américain de chasseurs-donateurs ayant pour but de financer des actions et des études pour et sur la faune sauvage. **Usfws : United States Fish and Wildlife Service (Service américain de la pêche et de la faune sauvage). ***Craig Packer : biologiste, zoologiste et écologiste américain considéré comme l’un des spécialistes du lion. **** The end of the game : Jeu de mots : La fin du gibier/du jeu. Titre également d’un livre de référence sur l’Afrique.