Un permis unique pour tous ?
Le Bulldozer. Ce sont ses amis du Pas-de-Calais qui l’ont ainsi baptisé. Ils ne se trompaient pas. Avec une certaine puissance et autant d’opiniâtreté, le président de la Fédération nationale des chasseurs met en place une ambitieuse réforme de la chasse française. Son projet est ancien. Willy Schraen l’avait présenté lors d’un tour de France à ses collègues présidents de Fdc alors qu’il était candidat au poste de président de la Fnc. Pour la première fois dans l’histoire de la Fédération, il l’avait également exposé à la presse cynégétique. [cf. éditorial du n° 488 de décembre 2016] À dire vrai, la litanie de ces nombreuses nouveautés nous donna le tournis. Pourtant, le Bulldozer était lancé. Les annonces ne relevaient pas de l’effet. Au contraire, elles constituaient un programme que M. Schraen présenta aux lecteurs de Connaissance de la Chasse à travers une interview dense. [n° 491 de mars 2017, page 56] Puis, le président de la Fnc le soumit aux candidats à l’élection présidentielle qui s’étaient déplacés lors de l’Ag de la Fnc en mars 2017, MM. Fillon et Macron. [n° 493 de mai 2017, page 20] Depuis, M. Schraen avance, dans un contexte délicat. Notre ministre de tutelle – M. Hulot – exècre une partie de ce qu’il est censé gérer, la chasse. Tandis que l’administration – précisément l’Agence française de la biodiversité – est noyautée ouvertement par des militants anti-chasse de l’ex-Rassemblement des opposants à la chasse-Ligue Roc. Cependant, une bonne nouvelle provient des présidents de Fdc, lesquels soutiennent les travaux dans une majorité écrasante. À près de 92 %. [n° 505 de mai 2017, page 20]
Cet historique indique qu’une réforme profonde de la chasse française est véritablement en marche. Sans aucun jeu de mots. Le président de la République a donné son aval au principe d’une vaste réforme, et évoque celle-ci directement avec le président de la Fnc. Le dossier n’a pas été confié à M. Hulot, et pour cause, mais à son secrétaire d’État, Sébastien Lecornu. Par ailleurs président Lrm du Conseil départemental de l’Eure, celui-ci déclare au Figaro : « Le système actuel n’est bon ni pour la biodiversité, ni pour les chasseurs. » Et d’ajouter : « Il faut remettre les scientifiques au coeur du dispositif pour remettre du bon sens dans la gestion des prélèvements et faire preuve de pragmatisme. » Coprésident du groupe chasse et territoires à l’Assemblée nationale et député Lrm de l’Aude, Alain Perea complète : « Au lieu d’interdire la chasse de certaines espèces sur plusieurs années, une liste des animaux protégés devrait être actualisée tous les ans. » Ce qui signifie que la gestion dite adaptative, qui s’applique déjà aux gibiers soumis à plan de chasse, pourrait être appliquée à des espèces protégées en surdensité ou invasives. Une révolution en matière de gestion des espèces animales. Cette remise en cause de ce tabou en déstabilisera plus d’un.
Toujours sur Rmc le 31 mai dernier, Jean-Jacques Bourdin interroge M. Perea : « Le permis de chasse sera le même partout ? » Le député de lâcher un scoop : « C’est une logique vers laquelle nous travaillons. » C’est-à-dire que désormais l’on ne parle plus du permis national à 200 € au lieu de 400 €, mais d’un permis de chasse unique. Lequel remplacerait le permis départemental et le permis national. Le montant de cette validation ? 150 € environ. Pour cette somme, tout chasseur pourra traquer le petit gibier et le grand gibier sur l’ensemble du territoire national. Pour le coup, cette avancée serait historique pour notre communauté.
Toujours sur Rmc et le même jour, cette fois-ci face à Éric Brunet, Willy Schraen s’enthousiasme pour l’action du président de la République, quitte à contrarier certains de ses amis : « Il a une vraie vision rurale, et il dit : “Moi, je veux que la chasse devienne un des piliers de la réforme de la ruralité.” Je pense que c’est quelque chose d’exceptionnel pour la chasse. » D’argumenter encore : « Dans la moitié des villages de France, ruraux, un peu perdus dans nos campagnes profondes, vous enlevez l’association de chasse, qu’est-ce qu’il reste ? Qu’est-ce qu’il reste comme lien social entre les gens ? Et ça, le président de la République le comprend bien, et est prêt à faire quelque chose en rendant la chasse financièrement plus accessible. »
Le dossier de la réforme de la chasse française sera remis officiellement en cette fin juin au président de la République. Celui-ci devrait prendre la parole d’ici début juillet pour évoquer ces travaux qui concerneront également et forcément la ruralité et la biodiversité. Ils traiteront probablement aussi du bénévolat.
L’avez-vous déjà observé sur un chantier ? Un bulldozer bien conduit est à même de réaliser des travaux tout en précision. Bonne lecture à toutes et à tous.