Kahles Hélia RF10x42
DEUX JUMELLES TÉLÉMÈTRES À 1500 EUROS
Avec les Hélia RF, Kahles se lance à son tour dans la fabrication de jumelles télémètres avec un credo : être le moins cher des Européens. Mission accomplie avec des 8x42 et 10x42, pratiques, fonctionnelles, intuitives et vendues 1500 euros !
Les jumelles télémètres sont apparues au début des années 1990 avec les modèles Geovid de Leica. Des jumelles lourdes et encombrantes mais qui eurent le mérite d’être les premières et de défricher ce marché inexistant. Depuis, Leica a revu sa copie avec une nouvelle génération de Geovid au format et au poids réduits mais embarquant encore plus d’électronique avec un véritable logiciel balistique qu’il est possible de coupler avec son calibre et ses munitions. Swarovski possède aussi de telles optiques avec les El Range, des jumelles télémètres dotées d’un calculateur balistique et de toutes sortes de logiciels qui peuvent là encore être couplés avec votre arme. Zeiss s’est aussi engagé sur ce secteur avec ses Victory RF, et plus tard Meopta avec les MeoRange. Quatre marques européennes et bien sûr de nombreuses marques américaines sont peu à peu venues s’installer sur cette niche. C’est au tour de Kahles de tenter de se faire une place sur ce secteur. La firme dévoile deux jumelles, des 8x42 et des 10x42 baptisées RF car dotées d’un Range Finder (en français un « trouveur de distances » ou télémètre), qui sont les moins chères de la catégorie au sein des marques européennes. Des jumelles télémètres européennes mais, précisons-le tout de suite, sous-traitées en Chine. Ce sont les 10x42 que nous avons choisi de tester plutôt que les 8x42, pour une question de grossissement. La première bonne surprise vient du format de ces jumelles. Elles ne sont ni plus larges ni plus hautes ou grosses que les jumelles sans télémètre, les Hélia « classiques » que la marque commercialisait jusquelà. Ces jumelles sont même plutôt petites et fines et elles ne pèsent « que » 880 g. La prise en main s’en trouve facilitée. Certes le dessous de chaque corps optique comporte une protubérance mais cette dernière n’est pas exagérée et vient naturellement se nicher au creux du pouce lors des longues observations. Ces jumelles se veulent aussi pratiques puisque le pont ne comporte que deux boutons, le premier pour allumer le laser et pour la prise de distance, le second pour le niveau d’illumination et le choix du mode de mesure. La molette de réglage de la mise au point vient compléter cette panoplie. C’est volontairement minimaliste et c’est très bien ainsi.
Les jumelles sont revêtues d’une gangue de caoutchouc marron, une couleur originale. Dans la nature c’est très discret, par contre en boutique ou dans vos mains, le rendu n’est pas très qualitatif, du noir ou du vert, même en option, aurait été bienvenu. Le pont est noir, tout comme la molette de réglage de mise au point ou les oeilletons, c’est assez réussi. Ces derniers sont escamotables et vous offrent trois positions : de collé à l’optique jusqu’à 9 mm plus haut. Ainsi selon votre morphologie, que vous soyez porteur de lunettes ou non, ces jumelles s’adapteront à vous et non l’inverse.
Mise au point rapide ou trop rapide ?
Ces optiques se comportent comme des jumelles classiques avec une bague de réglage de la mise au point très rapide, trois quarts de tour suffisent. C’est pratique en termes de rapidité mais cela pose deux problèmes : tout d’abord il est plus difficile d’être précis lors du réglage et ensuite, pour arriver à cela Kahles a réduit la plage d’observation puis- qu’il est impossible d’avoir une image nette à moins de 10 m. Les mesures de distances se font simplement. Vous pressez le bouton le plus proche de vous et le laser s’allume ; à la seconde impulsion, la distance s’affiche. Vous pouvez choisir de mesurer une distance donnée avec une pression brève ou de passer tout un secteur au scan en pressant en continu le bouton et en balayant du regard tout ce qui vous entoure. Les distances défileront sous vos yeux. Vous pouvez décider de n’afficher que la distance, mais il est aussi possible d’obtenir l’angle, en cas d’observation vers le haut ou le bas ou, toujours dans le même cas, la distance compensée ou recalculée à l’horizontale. Prenons un exemple : si vous visez, vers le haut ou le bas, un animal placé à 300 m avec une très forte pente et que votre lunette est réglée sur 300 m, vous raterez l’animal en tirant trop haut. Il aurait fallu viser de la même manière que pour un tir à 250 m ou moins. Dans ce cas, les Kahles RF vous auraient annoncé 300 m et au-dessus 250 ou moins. C’est le petit plus de ces jumelles télémètres. Pour passer en revue les trois modes, il vous suffit de presser pendant trois secondes le bouton « mode » et ensuite de choisir le programme désiré avec le premier bouton. Vous avez le choix entre yards ou mètres et entre distance simple, distance et angle ou distance et distance corrigée, une fonction appelée EAC (Enhanced Angle Compensation). Le bouton mode, pressé de manière brève, vous permet d’augmenter l’illumination. Chaque pression fait défiler un des cinq paliers. Et c’est tout ce qu’il faut savoir sur l’aspect technique du télémètre, tant l’emploi de ces jumelles est simple. Pour le reste, la qualité optique est bonne avec une image nette légèrement froide. La seule critique concerne une légère déformation en coussinet des lignes verticales en périphérie d’image, autrement dit elles semblent s’arrondir vers le centre. Une critique qui ne remet pas en cause la bonne qualité de ces optiques, surtout à ce niveau de prix. Ces jumelles coûtent en effet 400 euros de moins que les Leica Geovid R, qui disposent du même dispositif de compensation d’angle, baptisé ici EHR, 670 euros de moins que les MeoRange de Meopta qui, elles, sont dotées d’un calculateur balistique mais aussi d’une boussole et d’un thermomètre intégré, ou sont encore 50 % moins chères que les Swarovski EL Range, les Zeiss Victory RF ou les Leica Geovid B. Car il est évident que Kahles a réalisé des compromis pour que ces nouvelles jumelles télémètres qui se veulent pratiques et économiques soient bon marché, avec en plus un encombrement réduit et un usage très agréable. Tout est- il parfait pour autant ? Non. Il manque à ces jumelles ce qui fait le charme des lunettes de tir de la firme, une qualité optique digne des meilleures manufactures mais surtout une finition irréprochable. Ici, c’est ce dernier critère qui est le moins conforme à l’image de marque de la firme viennoise. Outre sa couleur marron qui ne plaira pas à tous et fait un peu moins haut de gamme que du noir ou du vert sombre, le caoutchouc qui protège les optiques est le parent pauvre de ces jumelles. Il gomme et flotte un peu, comme si l’ajustage aux coques d’aluminium n’était pas parfait. Dommage car pour le reste, les critères poids, prix, luminosité et simplicité d’utilisation en font un outil pratique et bien conçu et surtout, les courroies en cuir patiné et les protections oculaires en loden apportent beaucoup d’élégance à ces optiques. À quand les mêmes en noir avec un caoutchouc juste un peu mieux ajusté ?