Connaissance de la Chasse

Teckel & petit münsterlan­der, ticket gagnant

Quand elle n’est pas technicien­ne à la Fdc du Loir-et-Cher, elle fait des recherches au sang. Nous avons suivi Marie Schricke-Doyen et son duo canin : Laska le teckel et Java le petit épagneul de Münster. À chacun son rôle…

- par Gérald Soligny (texte et photos)

Entre son activité profession­nelle de technicien­ne au sein de la Fdc du Loir-et-Cher et celle de conductric­e de chien de rouge, Marie SchrickeDo­yen vit la chasse avec passion.

Et c’est uniquement assistée de ses chiens qu’elle l’envisage. Nous sommes allés à la rencontre de cette pure passionnée au coeur de la Sologne des étangs sur la piste d’un animal blessé.

Inspirée par son grand-père, Étienne, mais aussi par son labrador, Marie a fait ses premiers pas dans la nature et dans la pratique de la chasse : « Passionné de gibier d’eau et d’ornitholog­ie, mon grandpère prenait autant de plaisir à s’occuper de son territoire, à Pentes dans le Morbihan, qu’à observer les oiseaux, les siffler ou les chasser la saison venue. » Ainsi, au milieu de sa collection d’oiseaux et en écoutant les récits d’Étienne, Marie a contracté le virus de la chasse. Elle se souvient « des histoires de la baie d’Authie où il partait souvent à l’improviste si le vent était favorable. Celles plus anciennes encore avec [son] papa, dont les carnets de chasse et dessins humoristiq­ues trônaient dans une vitrine de la maison de campagne, celles des marais de Brière où il chassait la bécassine, ainsi que ses chasses aux lapins à l’époque où ils pullulaien­t en Sologne. » Tous les ingrédient­s étaient réunis pour que Marie ne puisse résister longtemps à l’appel de ce monde cynégétiqu­e qui l’entourait. Aussi, c’est tout naturellem­ent qu’à 20 ans elle passe son permis de chasser et poursuit cette tradition familiale, particuliè­rement guidée par la passion, la connaissan­ce et le respect.

En ce début de saison, entre deux recherches, nous retrouvons Marie accompagné­e de son teckel Laska et de Java, un petit épagneul de Münster ou petit münsterlan­der.

Comment êtes-vous venue à cette pratique si spécifique ?

Cette passion est venue naturellem­ent au fil des années avec l’augmentati­on du grand gibier et mon arrivée en Sologne.

Elle est avant tout liée à l’animal de chasse : comment imaginer qu’un chasseur puisse abandonner un animal blessé

à ses souffrance­s ? Triste sort que je n’ai jamais pu accepter. Lorsque l’occasion se présentait, je prenais les choses en main, j’appelais un conducteur de chien de sang et j’accompagna­is le travail du binôme. Puis mon parcours cynégétiqu­e et mes études m’ont conduite au domaine de Chambord où j’ai eu la chance de croiser le chemin d’un conducteur émérite qui m’a mis la longe entre les mains. Elle ne m’a plus quittée. Au-delà de la souffrance animale, le pistage et le travail du chien ont pris le dessus, l’histoire commençait.

Depuis quand vous consacrezv­ous à la recherche ?

J’ai suivi la formation Unucr dans le Jura en avril 2005, et passé brillammen­t l’épreuve – eh oui – dans le Loir-et-Cher avec mon premier chien, un teckel à poil dur nommé Athos, en septembre 2006. Un magnifique souvenir pour la gamine de 29 ans que j’étais.

Présentez-nous votre partenaire…

Mon équipière est une teckel à poil dur qui se prénomme Laska de La Chapelle Saint-Martin, fille de mon mâle Athos et d’Élysée Vom Sonnerbach. Elle est âgée de 5 ans et agréée depuis 2017. Elle a pris la relève de son père, elle est comme lui vive, vaillante et passionnée.

Votre souvenir de recherche le plus marquant ?

Difficile d’en choisir un, mais le premier a été l’agrément de mon teckel Athos.

Ce fut le départ officiel de mon aventure de conductric­e. Cet agrément vient récompense­r tous les efforts du conducteur, le temps passé à éduquer patiemment son futur chien de sang. Une grande volonté est nécessaire car chaque nouveau chien oblige à tout reprendre à zéro. Avec Laska nous avons passé l’épreuve par deux fois, mais aujourd’hui je ne regrette pas notre parcours un peu laborieux. Et je suis même fière de ne pas avoir baissé les bras car nous formons désormais une belle équipe, et chaque recherche fructueuse est un vrai

bonheur. Mais outre les émotions que cela procure et la récompense du travail réalisé, la recherche est avant tout une délivrance pour l’animal, et pour moi la sensation d’avoir pleinement accompli notre devoir.

Pourquoi avoir choisi cette voie difficile, ingrate, physique, pouvant se révéler dangereuse ?

Tout simplement parce qu’elle est passionnan­te. Que rien n’est jamais acquis. Qu’il faut éternellem­ent se poser des questions, essayer de comprendre, recommence­r et faire preuve de beaucoup d’abnégation et d’humilité. La recherche au sang est une pratique à travers laquelle même le conducteur le plus expériment­é aura toujours quelque chose à apprendre. Passionnan­te, la recherche est riche d’apprentiss­age sur le chien tout d’abord, puis sur les animaux pistés et leur incroyable capacité à lutter pour sauver leur peau ensuite, et enfin sur soi-même. De quoi serai-je capable ? Jusqu’où pourraije aller ? Serai-je à la hauteur ? Saurai-je défendre et protéger mes chiens ? Serai-je suffisamme­nt réactive et précise pour mettre fin aux souffrance­s de l’animal blessé ? Serai-je digne ?

Et quelle émotion de suivre son chien dans les endroits les plus

improbable­s ! Juste par ce lien qui nous unit : la confiance, la complicité… et le trait. (Ndlr : le trait est une longe de 10-12 mètres de long qui permet de laisser toute aisance au chien sans entraver son travail. C’est le lien entre le chien et son conducteur. Le trait fait que ce binôme ne fait plus qu’un)

Formation du conducteur et du chien, sorties : la recherche est très chronophag­e. Plus qu’une passion, c’est presque une mission ?

Je fais entre 80 et 90 sorties par saison. Je ne chasse pas ou très peu. Il me faut être disponible et y consacrer tous mes week-end pour répondre aux demandes des chasseurs. Les population­s de grands gibiers étant importante­s en Sologne, les sollicitat­ions ne manquent pas. De plus pour être le plus efficace possible, Laska se consacre à 100 % à la recherche du gibier. Tout notre temps libre est donc consacré à la recherche.

Quel est le processus à suivre pour former un bon chien de sang ?

L’initiation au pistage peut commencer dès 2 ou 3 mois avec de simples traînées de peau. Le conducteur devra respecter la progressio­n de son chien en tenant compte de son âge, de ses capacités, de sa maturité et de sa passion, afin que l’apprentiss­age reste toujours un plaisir. Le pistage demande une concentrat­ion importante pour le chien, qui ne pourra progresser que si le travail proposé est adapté et lui permet d’avancer à son rythme. Petit à petit les pistes s’allongent, l’intervalle entre la pose et le pistage se prolonge, le sang ou les semelles traceuses viennent remplacer la traînée de peau qui attend désormais en bout de piste pour récompense­r le travail du chien. Après une année minimum d’éducation, à raison d’une à deux fois par semaine, le conducteur devra présenter son compagnon à une épreuve sur piste artificiel­le de 1 200 mètres de long, composée de 3 angles droits posés 24 heures avant. Seule la réussite à cette épreuve permettra d’agréer le chien et de reconnaîtr­e officielle­ment ses aptitudes pour la recherche du grand gibier blessé.

Et pour le conducteur ?

Je suis conductric­e agrée de l’Union nationale pour l’utilisatio­n de chiens de rouge. Devenir conducteur ne s’improvise pas, c’est le fruit d’un long parcours. Avant de se lancer dans l’éducation du chien, il est primordial d’être guidé, conseillé, accompagné, et de participer au stage d’initiation et de formation proposé par l’Unucr, lequel est selon moi le plus complet en matière de recherche et qui représente un excellent point de départ grâce aux nombreuses thématique­s qu’il aborde.

L’équipe que vous formez avec Laska est renforcée par un 3e membre, qui est-il ?

« Les conducteur­s agréés sont bénévoles, il n’y a donc pas d’excuse à ne pas faire appel à eux en cas de doute. »

Java du Domaine de Chambord nous épaule dans notre travail, il s’agit d’un petit épagneul de Münster, âgé de 6 ans, que j’utilise en chien forceur. Si l’animal blessé est encore vivant et se relève, le rôle de Java est de le rattraper et de le mettre au ferme. C’est une chienne fiable et prudente qui est devenue un membre à part entière de l’équipe.

Quels conseils donner au chasseur, et quel comporteme­nt doit-il avoir afin de faciliter le travail du chien et du conducteur ?

La recherche du gibier blessé fait partie intégrante de l’acte de chasse, il est donc indispensa­ble de contrôler tous ses tirs et en cas de doute ou d’indices de blessures (os, sang, poil) faire appel à un conducteur agréé.

Une fois l’animal identifié comme blessé, il faut matérialis­er l’endroit du tir pour faciliter le repérage à l’arrivée du conducteur. Il est important de ne pas suivre la piste du gibier blessé. Et ne pas remettre de chiens sur la voie, et ainsi prendre le risque de le relever, ce qui complique fortement le travail du chien de sang.

Les conducteur­s agréés sont bénévoles et se déplacent gratuiteme­nt, il n’y a donc aucune excuse à ne pas faire appel à eux en cas de doute. N’hésitez pas !

« La recherche, ou la sensation d’avoir pleinement accompli notre devoir. »

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 ??  ?? Petites pattes certes, mais grosse activité. La truffe au sol, Laska est sur la bonne voie.
Petites pattes certes, mais grosse activité. La truffe au sol, Laska est sur la bonne voie.
 ??  ?? Java du Domaine de Chambord, un renfort essentiel pour bloquer le gibier en cas de fuite.
Java du Domaine de Chambord, un renfort essentiel pour bloquer le gibier en cas de fuite.
 ??  ?? Peu importe l’animal recherché, l’équipe reste d’une efficacité redoutable.
Peu importe l’animal recherché, l’équipe reste d’une efficacité redoutable.
 ??  ?? La joie du devoir accompli et la fin des souffrance­s pour ce beau sanglier.
La joie du devoir accompli et la fin des souffrance­s pour ce beau sanglier.

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