Connaissance de la Chasse

Bécasse, pointer et autour

Éleveurs de pointers, Camille et Pierre Vieillevil­le nous accueillen­t pour chasser la bécasse… sans fusil. Autour des palombes et pointer seront nos seules armes pour tenter de capturer la belle mordorée. Impossible n’est pas breton !

- par Gérald Soligny (texte et photos)

C’est à Lanvellec dans les Côtes-d’Armor, à quelques kilomètres du Finistère, que sont installés Camille et Pierre Vieillevil­le, chasseurs au chien d’arrêt depuis 2004. Ces deux trentenair­es, mariés et parents de deux jeunes enfants, élèvent des pointers anglais sous l’affixe « des Bords du Yar » (petit fleuve côtier d’une vingtaine de kilomètres) depuis 2012, et ont ouvert une pension canine depuis 2015. La devise de l’élevage est : « Produire des chiens qui chassent », et pour cela les Vieillevil­le mettent tout en oeuvre et y parviennen­t. Il suffit pour cela de voir les multiples récompense­s glanées en concours de travail. C’est en arpentant la campagne bretonne en toutes occasions et en mettant leurs chiens en présence de gibier naturel qu’ils entraînent les membres de l’écurie. La Bretagne, haut lieu de la chasse à la bécasse, se prête évidemment aux rencontres régulières avec la belle des bois, mais elle permet aussi, sur ses côtes, de faire travailler les chiens sur bécassine.

Par ailleurs, l’équipe des Bords du Yar traverse chaque année la Manche pour se rendre en Écosse et y entraîner les chiens sur le lagopède d’Écosse, plus connu sous le nom de grouse, et sur le tétras-lyre, mais aussi retrouver les lointaines racines de Camille.

Performant­s et réguliers

En plus des chiens de chasse, Camille est passionnée depuis son plus jeune âge par les oiseaux de proie. Après avoir travaillé dans plusieurs voleries en tant que saisonnièr­e dès 2003, c’est à son retour dans sa Bretagne natale qu’elle s’est initiée à la chasse au vol. Depuis 2012 elle intervient en sous-traitance dans le cadre de missions d’effarouche­ment sur des sites agroalimen­taires et aéroportua­ires. Son équipe de vol est constituée de quatre buses de Harris et d’un autour des palombes. D’un côté les pointers, de l’autre les oiseaux, tout ça en Bretagne, terre bécassière… L’idée de chasser la bécasse au vol a fini par germer dans l’esprit de nos deux passionnés. Et de se lancer un défi : chasser la bécasse à l’autour des

palombes et à l’arrêt d’un pointer, des Bords du Yar bien sûr. L’objectif de Camille et Pierre n’est pas de prendre un jour une bécasse au vol accidentel­lement ou de façon hasardeuse, l’objectif est de devenir performant et de faire prise régulièrem­ent. La tâche est ardue car il faut réunir toutes les conditions : arrêt du pointer, envol de la bécasse de façon à ce que l’autour la localise vite, libération du rapace dans le bon timing pour qu’une fois libéré il rattrape sa proie, qu’il déjoue les crochets, et enfin la capture. Les paramètres sont nombreux et compliqués à réaliser. C’est l’intérêt de cette quête. Si certains ont fait de « chasser le plus possible en tuant le moins possible » une devise, on peut dire que notre équipe pousse le concept à l’extrême non sans susciter le scepticism­e chez d’autres. Comme le dit Pierre, l’objectif étant de se rapprocher du meilleur du chien, du meilleur de l’oiseau, sur le roi des gibiers… et dans la plus belle région du monde, aurait pu ajouter ce Breton un brin chauvin.

Prédateur et trialer

Camille nous présente son oiseau : « Mon autour des palombes est un tiercelet [mâle chez certains oiseaux de proie, plus petit d’un tiers que la femelle] âgé de 2 mues, répondant au nom d’Asta-Buan qui en Breton signifie “dépêche-toi”. Oiseau au réclamé assez facile, il revient assez facilement au gant. C’est un oiseau encore très jeune qui manque d’expérience mais qui démontre à chaque sortie ses aptitudes de chasseur et sa créance sur bécasse. » Lorsqu’il est au poing, l’autour est toujours aux aguets, l’oeil vif, scrutant le moindre mouvement, attentif au moindre passereau qui s’envole et aux déplacemen­ts du chien, l’instinct de prédateur se lit dans le regard glacial de cet oiseau. Pierre, quant à lui, drive une très jolie petite pointer, Néraidocho­rie des Bords du Yar (du nom d’un petit village grec où ont lieu les championna­ts d’Europe sur bécasse), âgée de 3,5 ans, fille d’une trialer bécasse et d’un champion de grande quête. Et elle-même déjà trialer sur gibier tiré, championne de France

de conformité au standard et championne internatio­nale de beauté. C’est dans le bocage breton composé de fonds de vallées humides, bosquets de bois mêlés, zones de fougères entourées de bouleaux, d’ajoncs, de chemins creux et de houx que nous partons à la recherche de la bécasse des bois. Nous arrivons en fin de saison et la belle connaît la musique. Mais Nérai aussi connaît bien son affaire et n’en est pas à sa première bécasse bloquée. Elle entame sa quête, Pierre attentif au sonnaillon traditionn­el est aux aguets. Nos chasseurs sont habitués à arpenter ce beau territoire privé et savent où se remisent les oiseaux. Il ne faut que peu de temps pour voir le premier arrêt du chien. Camille, Asta au poing, reste toujours en retrait de Pierre et se positionne de façon à ce que le prédateur ailé puisse voir l’ensemble de la scène, car même si nous savons que la bécasse est bien là, difficile de savoir où exactement et si elle ne va pas profiter d’un bouquet de houx pour démarrer hors de vue. Pierre motive Nérai, la fait couler et soudain… le bruit typique de l’envol d’une bécasse. Mais où est

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 ??  ?? Le miroir sous ce houx nous confirme que la belle était bien là, au nez du chien.
Le miroir sous ce houx nous confirme que la belle était bien là, au nez du chien.
 ??  ?? Néraidocho­rie des Bords du Yar, équipée de sa cloche traditionn­elle.
Néraidocho­rie des Bords du Yar, équipée de sa cloche traditionn­elle.
 ??  ?? Camille et Asta, Pierre et Nérai : l’équipe du Bords du Yar au retour d’une mission difficile… mais pas impossible. Le tiercelet pillant sa bécasse.
Camille et Asta, Pierre et Nérai : l’équipe du Bords du Yar au retour d’une mission difficile… mais pas impossible. Le tiercelet pillant sa bécasse.
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Asta-Buan, toujours sur le quivive. Un prédateur redoutable.

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