Cosmopolitan (France)

Je suis la reine des sexfies

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Simon et moi nous sommes rencontrés dans le lycée lyonnais où nous enseignion­s tous les deux. À la rentrée suivante, il a été muté à Nîmes : échanger des promesses pleines d’accents circonflex­es était certes romantique, mais les soirées étaient longues. Très longues. Un soir, alors qu’il venait de me demander : « Tu fais quoi ? » par SMS, je lui ai répondu : « Je corrige des copies… », avec un selfie de mon décolleté, les bras croisés sur ma pile de copies. Une pulsion. Mes élèves n’avaient pas été très inspirés par Molière, tandis que je l’étais, moi, par l’idée du corps nu de Simon contre le mien. A débuté alors un échange très excitant : lui me racontait ce qu’il aimerait me faire si nous étions ensemble, et je répondais uniquement par des photos. On a tous les deux eu un orgasme d’autant plus fort qu’il était inattendu : c’était le premier échange vraiment « cul » que nous ayons jamais eu. Mais ça n’a pas été le dernier… Précaution­s d’emploi Une règle de base : la confiance que l’on a en son destinatai­re. Recevoir un « C ki ? » en réponse à la photo de sa chute de reins produit le même effet sur l’ego qu’un clou rouillé dans un pneu. Par ailleurs, si dans « sexfie », il y a « sexe », il n’y a pas « porno » : on n’envoie donc pas le dessert avant les amuse-bouches. Pas de photo entièremen­t nue, sous une lumière crue, on opte plutôt pour un striptease visuel, ou pour une photo hot, mais en contre-jour. Bien entendu, on ne passe pas trente minutes à essayer les filtres de ses dix applis photos (« Et en Amaro, ils n’ont pas l’air plus gros, mes seins ? »), on évite les effets glitter ou rainbow, personne n’a envie de voir un Bisounours à poil, et on mise tout sur le make-up – discret –, la lumière – naturelle –, et le décor – plutôt la chambre que la salle à manger (« Tiens, t’as changé le buffet de place, sympa ! »).

Anaïs, 32 ans

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