…MA VALISE CABINE
Qu’est-ce qui est sournois, toujours trop grand pour une hôtesse de l’air et trop petit pour moi ? Non, pas un caniche…Par
J’aurais aimé explorer le monde à l’époque où les globe-modeuses voyageaient avec une chaîne de bagages à peine moins haute que celle des Alpes, qu’elles confiaient à des avions dont la soute était vaste comme le stade de France, et gratuite comme un sourire. Hélas, il en va des soutes à bagages comme de l’immobilier à Paris : l’espace y est de plus en plus cher et de plus en plus petit. Depuis que la plupart des compagnies aériennes font payer l’enregistrement des bagages au prix d’une chambre avec vue sur mer, j’ai abandonné ma bonne vieille grosse valise pour un clutch à roulettes prétentieusement nommé « valise cabine » qui, à l’usage, se révèle presque aussi stressant qu’une belle-mère hyperactive.
Chihuahua du bagage
Le format standard d’une valise cabine 45x56x25 cm m’oblige à voyager léger, que dis-je : détox. Et me condamne en effet à un tri contre ma nature, et à un jeûne vestimentaire et cosmétique drastique. Pour un week-end, pas question d’emporter mes cuissardes à talons, option « on ne sait jamais », ni un gros pull, ni une serviette de plage, ni mon chat. La valise cabine me condamne donc à lire très lentement, ou sur une liseuse, dans un endroit sec et tempéré, sur un transat en caressant le sable. Évidemment, il est possible de tricher (en portant le maximum de vêtements sur soi). C’est ainsi que j’ai fait un Paris-New York dans deux vestes sous lesquelles j’avais superposé trois robes et deux pulls, le regard du douanier m’a dissuadée de porter mes mules en mitaines. L’avantage, c’est que je passe moins de temps à faire mon bagage : deux leggings, deux tee-shirts, une robe sans manches (ça prend trop de place sinon). Et, oh bonheur, je suis sûre d’avoir ma valise à l’arrivée, et pas perdue dans un endroit au nom composé exclusivement de consonnes dont elle ne reviendra que la veille du retour au bercail.
Bras de fer
Celle qui prétend que la taille ne compte pas ne s’est jamais trouvée face à une hôtesse de l’air immanquablement décidée à me faire enregistrer ma valise toujours trop grosse, même quand je peux la cacher derrière un timbre-poste. Au bout de cinq minutes de négociations (ressenti : cinq heures), l’homme ou la femme, dit personnel au sol (ça explique la frustration ?), tend un doigt martial vers le gabarit à côté de son comptoir. Si ma valise reste coincée, j’ai perdu, elle a gagné, je dois dépenser la moitié de mon budget vacances dans l’enregistrement de mes deux leggings : mon voyage commence mal. Si ma valise passe, j’ai l’impression d’avoir réussi le concours de l’ENA grâce à un jeu Duplo pour adultes mais mon voyage ne commence pas bien pour autant car se dresse alors devant moi un nouvel obstacle : le compartiment bagages dans lequel je suis supposée ranger ma valise cabine. Dans trois cas sur deux, le compartiment situé au-dessus de mon siège est plein comme un caveau de famille, ce qui m’oblige à remonter l’allée centrale – « pardon, excusez-moi, pardon, désolée… » – et à ouvrir un à un tous les casiers pour en trouver un vide, en général situé tout au fond de l’avion, à côté des toilettes. Je passe donc mon voyage le cou tourné à angle droit pour veiller à ce que personne ne fouille dedans : « Oh pardon, j’ai cru que c’était ma Lipault », tout en rêvant au jour où quelqu’un inventera les fringues téléchargeables et la brosse à dents téléportable qui me permettront de voyager les mains dans les poches. ENFIN.