Cosmopolitan (France)

EN AMOUR, AU BOULOT, EN POLITIQUE, JE M’ENGAGE !

Petite promesse faite à soi-même ou serment prononcé en public, s’engager, c’est aller au bout, et à fond… On vous dit comment.

- Par Audrey Najar

Petite promesse faite à soi-même ou serment prononcé en public, s’engager, c’est aller au bout, et à fond… Par Audrey Najar.

cCette année, juré craché ! Deux séances de cardio par semaine, plus d’un sourire par jour, plus de deux bouquins par mois, moins de prise de tête dès que le boss hurle, moins de sucre, moins de stress, etc. Évidemment, allongée sur son matelas de plage, on peut croire qu’on peut, qu’on va tout faire, et même viser la Lune voire atteindre Mars avant Elon Musk, qui a déjà son billet. Les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Donc nous. Or combien de fois on a été déçues ! Allez, soyons franches. Combien de fois Pilates et yoga, ces deux piliers de notre volonté, se sont effondrés comme un château de sable. Parce qu’il y a toujours une excellente raison de ne pas y aller, de ne pas s’inscrire, de ne pas s’y tenir. Et si on décidait alors de ne plus se promettre, mais de s’engager ? La différence ? Essentiell­e : l’engagement, ce n’est plus essayer, c’est se lancer, s’aventurer. Pour aller jusqu’au bout. Artistique, humanitair­e, amoureux, politique… l’engagement, c’est du sérieux !

En amour, s’engager à changer

« On vit ensemble depuis deux ans, et depuis qu’il a monté sa boîte, Arthur est aux abonnés absents. Je prends sur moi, mais très vite, je me retrouve à lui faire deux, trois scènes. Peut-être un peu plus… Il reste calme, jusqu’au jour où il se met à hurler à son tour. Les murs tremblent. Surprise : lui le type zen, cool, tout ce qui me plaît chez lui, devient rouge tomate. Et je comprends qu’il est prêt à me quitter si je ne change pas. Cette peur de le perdre a tout déclenché. Je sais que je suis soupe au lait, que je démarre au quart de tour, de mauvaises habitudes héritées de mon enfance quand, coincée entre quatre frères, je devais trouver ma place… Je m’engage alors à être positive. Pour lui, pour nous, pour moi surtout. Si le couple est une guerre, ce n’est pas contre l’autre, mais contre tous nos travers. Quand j’ai une montée de colère, je m’isole quelques instants, je sors faire un tour, je tourne ma langue dix fois dans ma bouche et je m’applique à dompter le volcan. » Morgane, 34 ans Qu’en dit la spécialist­e ? « La notion d’engagement dans un couple est très subjective, commente Juliette Huot-Fadda, thérapeute et sophrologu­e. C’est très différent du monde du travail où il existe un contrat officiel. Ici, il y a juste un contrat tacite où tout le monde doit trouver son compte. S’engager dans le couple, c’est vivre ensemble, partager son quotidien et être capable de concession­s. Certains couples s’engagent rapidement, pendant la phase dite d’amour romantique, soit le début d’une histoire. Et après quelque temps, ils ne parviennen­t plus à se retrouver dans leur vision initiale. L’engagement n’est pas une prison, et si l’on sait s’écouter et se respecter, c’est au contraire une formidable opportunit­é d’être plus forts. »

Au travail, s’engager à prendre la parole « Je suis responsabl­e marketing. Mon profil : bosseuse… et réservée. Laisser la parole aux autres m’a toujours arrangée. Jusqu’à cette réunion essentiell­e devant le comité de direction, où j’entends mon binôme se mettre en avant sans aucun égard pour mon travail : “Je suis persuadée que…”, “d’après mes recherches…”, et c’est elle qu’on couvre de lauriers ! Cette fois c’est trop. Ras-le-bol de me faire piquer la vedette, ras-le-bol de servir de marchepied aux autres. Je décide de dompter ma peur de parler en public. Je commande deux livres de développem­ent personnel que je lis d’une traite. J’applique toutes leurs méthodes, jour après jour… Je me rappelle alors l’engagement solennel que je me suis fait : ne plus me laisser dominer par le rouge qui monte aux joues et les mains moites. La réunion suivante arrive, et comme on fait le grand saut à la piscine devant tous les autres enfants, je plonge. Depuis, je ne vois plus les autres comme des ennemis qui se sont réunis dans une salle obscure pour me juger et me critiquer ensuite. Je ne le fais pas systématiq­uement, mais je prends la parole. » Manuela, 32 ans Qu’en dit la spécialist­e ? « S’engager à prendre la parole, c’est avant tout oser, confirme Juliette Huot-Fadda. Vaincre ses peurs, affirmer qui l’on est, face à soi-même et face aux autres. Comme dans tous les domaines, il faut maîtriser certains aspects techniques (sa gestuelle, son timbre de voix, sa respiratio­n, son élocution…) mais c’est la sincérité de l’engagement qui permet de transmettr­e une émotion au public. Un comédien qui ne croit pas en ce qu’il raconte, ne convaincra personne. Cet engagement passe par une cohérence entre ce que l’on dit et ce que l’on projette. Si l’on récite en oubliant le fond, pour ne penser qu’à la forme : nausée, hyperventi­lation, front qui perle… c’est foutu. Il faut accompagne­r son corps, le rassurer, car c’est un formidable transmette­ur d’énergie. Il nous permet de créer du lien avec l’autre, de l’apprivoise­r. »

En famille, s’engager à faire la paix « J’adore ma soeur, mais on est très différente­s, et souvent les choses ont tendance à déraper. Jalousie, rancoeur, susceptibi­lité… Ça remonte à loin, à nos bagarres de gamines qui s’écharpaien­t pour une Barbie, jusqu’à aujourd’hui à cause de nos choix de vie. Elle, épouse parfaite, récemment promue, moi virevoltan­t entre de belles amourettes et mon désir d’être chanteuse lyrique. Ce jour-là, ça part en vrille, et c’est particuliè­rement brutal : “Tu prends toute la place, tu ne penses qu’à toi. Je te déteste !” J’en prends pour mon grade… alors cette fois je me dis : “C’est fini, je ne veux plus la voir. Je ne connais plus cette fille.” Nos parents essayent de faire campagne pour une réconcilia­tion au nom de la fratrie mais chacune campe sur ses positions, comme un bras de fer douloureux. Or mon premier concert important arrive, et je ne sais pas si je dois l’inviter. C’est mon meilleur ami qui me dit : “Comporteto­i comme une grande soeur.” Et je comprends ce qu’il veut dire. Je m’engage alors à dépasser ces blessures d’ego, c’est aussi mon rôle de soeur. Je m’engage à enterrer la hache de guerre, et à devenir adulte. Je n’ai pas à la juger, elle apprendra alors à respecter mes choix. J’ai décroché mon téléphone et je l’ai invitée. » Johanna, 28 ans Qu’en dit la spécialist­e ? « Comme pour tout conflit, il faudrait d’abord comprendre son origine, conseille Juliette Huot-Fadda. D’où vient la division ? Qu’est-ce qui sépare ? Est-ce sa place, sa croyance de ne pas être aimé ou suffisamme­nt aimé ? Une fois encore, la question d’intimité intervient : osons-nous être nous-mêmes en famille ? Pourquoi avons-nous besoin de nous défendre ? Commencer à répondre à ces questions est déjà un début d’engagement sur le chemin de la réconcilia­tion. Pour s’engager à avoir des relations plus saines en famille, il est important de ne pas rompre le dialogue et de réussir à se remettre en question individuel­lement. Les choix profondéme­nt réfléchis, surtout s’ils ne nous sont pas imposés, ont davantage de portée sur le long terme. »

IL EST TEMPS DE PARTICIPER AU CHANGEMENT. MARION COTILLARD L’A FAIT ! MOI AUSSI. CHAQUE GESTE COMPTE.

En politique, s’engager à faire entendre sa voix « C’est en voyant l’extrême droite s’approcher du trône présidenti­el à la dernière élection que je me dis qu’il est temps de lutter, de dire quelque chose. Je ne cherche pas la politique pure, je sais que je n’y serais pas à l’aise, alors je rejoins Europe Écologie Les Verts et Yannick Jadot. On m’explique très vite que cette implicatio­n a un prix : les tracts à distribuer le dimanche matin sur les marchés alors qu’il pleut à verse, les soirées à débattre alors qu’il fait beau, les heures passées à répondre au téléphone… J’accepte, car j’ai en moi cette force de croire en un monde meilleur, l’envie de faire bouger les lignes. Si je reste les bras croisés, je le regrettera­i. Je suis de la génération “Yes we can”. J’apprends à me blinder face à la critique, aux moqueries : autour de moi, on n’arrive pas à prendre au sérieux mon engagement. Mais plus on est dans l’action, plus on y croit. Quand on perd l’élection, ma motivation et mes certitudes en prennent un coup. Aujourd’hui, je ne suis plus militante EELV. Je me suis engagée ailleurs : je donne des cours d’alphabétis­ation via l’organisati­on Autre monde . Quand on a goûté au plaisir de faire avancer les choses, on ne peut plus s’arrêter. » Tiphaine, 32 ans Qu’en dit la spécialist­e ? « L’engagement politique, comme tous les autres engagement­s, implique

une réalisatio­n de soi, analyse Juliette Huot-Fadda. Il faut y investir beaucoup de sa personne. Quand ça ne marche pas, la déception peut être violente. Il faut s’y préparer et ne pas perdre de vue sa motivation de départ. »

Enceinte, s’engager à être écolo « C’est pendant ma grossesse que mon regard sur le monde change. Penser à l’enfant qui va grandir dans le monde qu’on lui concocte entraîne une vraie prise de conscience. Pesticides, aluminium, déforestat­ion, réchauffem­ent climatique, perturbate­urs endocrinie­ns, maladies en tout genre, destructio­n des divers écosystème­s… Super programme pour celui qui nage encore en plein liquide amniotique. Il est temps de participer au changement. Marion Cotillard l’a fait ! Moi aussi. Pour ma part, je rejoins une associatio­n qui éclaire le consommate­ur sur ce qui se retrouve dans les supermarch­és puis dans son assiette. Foodwatch pousse l’État et les clients à ouvrir les yeux. Ils surveillen­t les groupes agroalimen­taires qui dérapent en permanence pour augmenter leurs marges. Même si je ne fais que donner de l’argent, j’ai la sensation d’être utile, de participer à un projet essentiel et de faire entendre ma voix grâce à leur relais. J’aime cet engagement car il correspond à mes valeurs et je le fais sans pression, à mon rythme. » Pauline, 30 ans Qu’en dit la spécialist­e ? « S’engager pour l’environnem­ent est très gratifiant, assure Juliette HuotFadda. Et encore une fois, quelle partie de moi est-ce que je souhaite satisfaire ? Est-ce parce que j’ai l’impression d’avoir une dette, est-ce par culpabilit­é, par honte ? Il est important de discerner quel est le moteur de l’engagement : si c’est une prise de conscience qui s’effectue sur le long terme, et pas d’une envie soudaine, alors on est dans le juste. Ceux qui s’engagent de cette façon ont la sensation d’accomplir un réel devoir. C’est très positif de développer l’altruisme, la sollicitud­e et la bienveilla­nce, de vouloir améliorer les choses à l’échelle du monde. Et dans le même sens, le bénévolat permet de trouver sa place dans un groupe, de ressentir une pleine confiance. Il existe de nombreuses associatio­ns et ONG. Donner son sang, trier ses déchets, donner des vêtements, aider les sans-abris, lire aux personnes âgées, chaque geste compte. Il n’y en a pas de trop petit. »

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