Cosmopolitan (France)

UN RÂTEAU NE ME TUE PAS, IL ME REND PLUS FORTE

Dédicace à celles qui veulent voir le verre à moitié plein.

- Par Manon Pibouleau. Photo Mackenzie Duncan.

Dédicace à celles qui veulent voir le verre à moitié plein. Par Manon Pibouleau.

Ce soir, une fois encore, vous êtes comme Jean-Claude Dusse : à deux doigts de conclure. Vous pensez même être « à ça » de vous lancer dans une relation nourrie d’amour et de complicité. Et puis, bug dans la matrice, votre plan tombe à l’eau. Soit le garçon tourne la tête quand vous vous approchez, soit c’est le silence radio après une nuit torride. Au début, ça fait un peu mal. La gifle vous picote l’ego. Mais avec le temps, et un peu de recul, juré, se prendre un râteau, ça comporte aussi des avantages.

Je deviens honnête avec moi-même

Celui avec qui vous avez partagé la nuit, dans le fond, vous saviez bien que ce n’était pas la bonne pointure. Parce que son histoire d’« accompliss­ement personnel après une retraite spirituell­e à Ibiza et blabla, moi je, moi je… » a provoqué un bâillement qui a failli vous décrocher la mâchoire. Ce garçon, vous l’avez trouvé par hasard. Il était sur votre chemin, l’éclairage l’avantageai­t et vous n’aviez pas envie de rentrer seule. Sur le moment, vous l’avez désiré. Mais cet homme a agi en rustine : si le rafistolag­e procure une satisfacti­on temporaire, il est hors de question de continuer la route avec. Malgré tout, quand il vous a dit « Merci, tchao, c’était sympa », ou qu’il vous a lâchement ghostée, ça vous a fait mal. Très mal, espèce de con. J’y gagne quoi ? Une remise en question sur vos attentes. Honnêtemen­t, vous avez été blessée dans votre orgueil, pas dans le coeur. S’il avait chanté la sérénade sous votre balcon, pas sûr qu’il aurait éveillé votre intérêt. Faites donc l’état des lieux de vos envies : quand vous avez récupéré le garçon en grattant le fond de la boîte de nuit, aux alentours de 4 heures du matin, vous n’aviez pas l’ambition de le ramener aux parents pour le repas dominical, si ? Rappelez-vous cette phrase qui tape sur le système par sa banalité – mais criante de vérité : « Qui se ressemble s’assemble. » Les types que vous rencontrez incarnent votre état d’esprit du moment : instable ou en manque de confiance d’un point de vue affectif. S’ils ne sont pas prêts à vivre une histoire avec vous, c’est que dans le fond, vous n’êtes pas prête à les accueillir non plus. Les personnes qui nous entourent sont le parfait miroir de ce qui se passe à l’intérieur de nous. Alors jetez-y un coup d’oeil plus appuyé.

Je me découvre une volonté de fer

Parfois, le garçon vous plaît vraiment, votre coeur hurle « boum boum », mais vous entendez mal son refus. Quand vous lui proposez un rencard et qu’il répond « Non merci, restons amis », vous ne comprenez pas. Quand il évoque un emménageme­nt imminent avec sa copine, pareil, vous perdez trois barres de réseau d’un coup. Contre vents et marées, vous êtes persuadée qu’avec un coup de pouce, vous êtes destinés à vivre une fabuleuse histoire d’A. Et comme vous y croyez pour deux, vous vous obstinez. J’y gagne quoi ? Si vous ne poussez pas le bouchon trop loin et admettez que ça ne sert à rien d’insister, vous repartirez avec une satisfacti­on personnell­e : celle d’avoir osé vous lancer. Une déclaratio­n, c’est un saut dans le vide, et vous serez fière d’avoir tenté jusqu’au bout – même si le parachute ne s’est pas ouvert. Vous êtes la fonceuse, celle qui ne se ronge pas les phalanges en refaisant le monde à coups de « si j’avais su/osé/dit… ». Tant pis pour sa pomme s’il n’a pas su saisir la branche que vous lui avez tendue. Réalisez le courage que vous avez dans le ventre, et si ce n’est pas déjà fait, utilisez ce mental de guerrière pour d’autres activités que le coup de foudre.

Je gagne en concentrat­ion

Si le garçon avait répondu « Moi aussi je t’aime comme un fou, comme un soldat… », vous auriez passé la journée du lendemain à mater le replay de la soirée en fixant le plafond de l’open space. Là, vous n’avez aucune raison de mâcher votre Bic en vous demandant s’il est plutôt slip ou caleçon, mer ou montagne, chipo ou merguez. Votre cerveau n’est pas rempli d’oiseaux qui vous détournent de vos tâches profession­nelles. Là, vous êtes motivée, prête à prouver au monde que vous en avez sous le capot. J’y gagne quoi ? Du temps de neurones. Vous travaillez mieux, et d’ici ce soir, vous n’êtes pas à l’abri d’avoir une idée de génie. Et si vous montiez une start-up catégorie « transition écologique » ? Imaginez : elle se développe à toute allure et vous résolvez la pénurie des ressources terrestres en cinq ans seulement. Jack (celui qui vous a ghostée) regrette : « J’ai été con, je ne veux que toi. » Seulement, d’après votre assistante, vous n’avez plus de place dans votre agenda pour caser un date. Surtout que le 25, vous êtes à New York. Alors, c’est qui la championne ?

J’apprends de mes erreurs

Vous avez parfois tendance à confondre les idées géniales et celles qui ne valent pas un clou. Ce manque de discerneme­nt se produit durant la même tranche horaire (minuit-4 heures du mat). En train de buller dans un saladier de mojito, vous vous dites que ce texto, rédigé avec un oeil fermé pour mieux vous concentrer, il est sacrément bien tourné. C’est sûr que ça va lui donner envie de vous (re)voir. En plus, quand vous l’avez montré aux copines dans le fumoir, elles ont dit : « On n’a qu’une vie ! » Allez, c’est expédié ! Le lendemain au réveil, vlam, une claque sous forme de flash-back dans votre cerveau. Coup d’oeil au portable : impossible de comprendre le sens de votre propre message. Forcément, aucune chance que le mec vous rappelle un jour. Ce râteau-là, vous l’avez créé toute seule. J’y gagne quoi ? Une probabilit­é de réussite plus élevée pour le prochain. Vous êtes un être perfectibl­e : vous savez vous remettre en question pour évoluer. Si vraiment vous avez besoin d’être « détendue » pour envoyer un message, préparez-en un à l’avance, sagement rangé dans les brouillons que vous n’aurez plus qu’à copier/coller, ça évitera l’humour Bigard. En revanche, n’envoyez rien passé 22 heures. Surtout un vendredi ou un samedi soir. Soit c’est vexant pour le garçon : vous pensez à lui seulement après un coup dans le nez. Soit c’est cramé pour vous : il hante vos pensées alors que vous êtes avec vos copains.

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