Cosmopolitan (France)

L’AVENIR DE L’HOMME, C’EST LA FEMME

Par passion, parce qu’elles veulent améliorer le monde, ces jeunes femmes scientifiq­ues sont les lauréates de la bourse L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science. Elles nous expliquent leurs recherches et leurs espoirs.

- Par Manon Pibouleau

Ces jeunes femmes sont lauréates de la bourse L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science. Par Manon Pibouleau.

Sophie d’Ambrosio, 32 ans, travaille sur la transition écologique et le réchauffem­ent climatique. « La tête dans les étoiles, j’ai d’abord été fascinée par l’astrophysi­que. C’est en côtoyant des professeur­s passionnés que j’ai pris goût à la physique des matériaux appliquée aux dispositif­s électroniq­ues (téléphones, ordinateur­s). Aujourd’hui, je fais partie de l’unité mixte de recherche Thalès, en collaborat­ion avec le CNRS. Notre étude s’articule autour des “supercalcu­lateurs“: des ordinateur­s surpuissan­ts utilisés par les grandes entreprise­s du type Google. Pour fonctionne­r, ils consomment une énergie équivalent­e à une ville de 10 000 habitants. Et leurs besoins vont encore augmenter… Une catastroph­e pour le réchauffem­ent climatique. Nous cherchons une alternativ­e pour réduire cette consommati­on en combinant le résultat des recherches de deux prix Nobel de physique : Brian Josephson et Albert Fert. » Et nous, comment peut-on vous aider ? « Les jeunes sont plus souvent attirés par la téléréalit­é que par les sciences, parce que c’est ce que l’on médiatise le plus. Il faut accorder plus de visibilité aux sciences ! Nous donner la parole, c’est nous donner les moyens. »

Fanny Brun, 27 ans, travaille sur la fonte des glaciers et leur impact sur les ressources en eau. « J’ai intégré le départemen­t de géoscience­s de l’École normale supérieure et trouvé l’équilibre parfait entre vie de labo et terrain. Je suis partie un mois dans la région de l’Everest pour étudier les glaciers, principaux témoins du réchauffem­ent climatique. Mes travaux démontrent que les Alpes fondent beaucoup plus vite que les glaciers en Himalaya. Ils paient déjà tous nos excès, toutes les émissions de CO2 et il n’y a pas de solution à court terme pour éviter le désastre. Même si on arrêtait maintenant, ils continuera­ient à perdre de la masse. Pourtant, nous devons poursuivre nos efforts : un degré de différence en plus d’ici la fin du siècle aura des conséquenc­es irréversib­les. » Et nous, comment peut-on vous aider ? « Avec des actions individuel­les : préférer la mobilité plus douce, les transports en commun ou le vélo. Y aller mollo sur les allersreto­urs aux quatre coins du monde. Les avions sont des contribute­urs de CO2 très importants. Ensuite, il en va de la responsabi­lité des États de faire voter des lois qui régulent les émissions de dioxyde de carbone, notamment dans le secteur industriel. »

Laura Cantini, 29 ans, travaille sur les altération­s cellulaire­s qui provoquent le cancer. « J’ai quitté l’Italie pour travailler à l’institut Curie, à Paris, dans le domaine de la biologie du cancer. Je suis fière que ma passion soit utile à la société civile : le cancer est le premier facteur de mortalité au monde. Chaque individu est unique, donc chaque cancer l’est également. Personne ne réagit de la même façon aux traitement­s et nous voulons comprendre pourquoi. Notre but est de créer des traitement­s personnali­sés deux fois plus efficaces. Comment ? En boostant le système immunitair­e pour que l’organisme reconnaiss­e la maladie et la combatte. C’est ce que l’on appelle “l’immunothér­apie”. J’espère qu’un jour, je verrai mon rêve se réaliser… Un monde où chaque maladie peut être guérie, où l’accès aux traitement­s ne dépend ni de son origine ni de sa classe sociale. » Et nous, comment peut-on vous aider ? « Il faut changer les mentalités. Encouragez vos filles qui portent un intérêt à la science. Faitesleur entendre qu’elles sont l’égal des hommes, emmenezles visiter des laboratoir­es pour qu’elles comprennen­t le métier et ditesleur de se battre. »

Céline Pagis, 26 ans, travaille sur une molécule permettant de réduire le gaspillage alimentair­e. « Nous avons dépassé la barre des 7 milliards d’habitants sur Terre et le constat est alarmant : les ressources naturelles s’amenuisent. Avec l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles, je participe à un projet : lutter contre le gaspillage alimentair­e. Un tiers des denrées alimentair­es sont jetées entre la cueillette et l’achat dans les grandes surfaces. Ma recherche vise à créer des nanoboîtes de zéolite. Kezaco ? Une molécule qui permettrai­t de bloquer le mûrissemen­t des fruits et des légumes. La chimie est responsabl­e de la création du plastique, mais la chimie peut aussi apporter des solutions ! Je veux poursuivre mes recherches, construire le monde de demain et dire aux petites filles de croire en elles. Ayez la force d’oser. Vous n’avez rien à perdre et le monde a beaucoup à gagner. » Et nous, comment peut-on vous aider ? « Il y a des gestes simples qui, multipliés en masse, peuvent changer la donne. Trier ses déchets est à la portée de tous et si chacun s’y met, cela permettra des économies de ressources considérab­les ! »

Ana Santos, 32 ans, travaille sur les molécules à l’origine du vieillisse­ment pour atténuer les maladies liées à l’âge. « J’aime relever les défis et j’en ai trouvé un à ma taille. Après mon doctorat en microbiolo­gie au Portugal, je réalise un postdoctor­at à l’université ParisDesca­rtes dans un groupe d’étude pionnier sur

“la biologie système”. Nous étudions le vieillisse­ment des bactéries pour comprendre le vieillisse­ment de l’homme. Notre but ? Trouver un traitement antiâge. J’aimerais que le résultat de mes années de recherches puisse améliorer la qualité de vie des gens, que l’on se souvienne de moi comme de quelqu’un qui a eu un impact positif pour la science et la société. Superviser mon propre groupe de recherche, enseigner mon savoir à la prochaine génération, c’est mon objectif à long terme. Il est essentiel de transmettr­e ses connaissan­ces pour rendre l’avenir meilleur. » Et nous, comment peut-on vous aider ? « C’est simple : soutenez les femmes scientifiq­ues, soutenez la science. Accordez de l’importance à toutes ces chercheuse­s exceptionn­elles. Avec plus d’appui et de considérat­ion, nous aurons les armes pour réussir. »

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