Cosmopolitan (France)

LA CHARGE ÉMOTIONNEL­LE, C’EST PAS NOUVEAU !

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La sociologue américaine du travail Arlie Russell Hochschild a conceptual­isé le « travail émotionnel » (« emotional work ») dans son oeuvre pionnière « Le Prix des sentiments » (éd. La Découverte), publiée en 1983 mais traduite en français en 2017. D’après elle, ce n’est pas un hasard si les métiers du soin (infirmière, aide-soignante, enseignant­e…) et du service (vendeuse, coiffeuse…) sont en majorité assurés par des femmes. Pour certains boulots (comme l’hôtesse de l’air obligée de sourire à un client irascible), ça fait partie du job. Mais la sociologue a remarqué que chez les femmes, cette fonction de « lubrifiant social » s’étend bien au-delà de la zone profession­nelle. À cause d’une éducation genrée, elles ont intérioris­é cette capacité sacrificie­lle à soulager les autres jusqu’à s’oublier. « Depuis la plus tendre enfance, on apprend aux petites filles à se taire, ne pas se mettre en colère, être toujours mignonnes, tandis qu’on dit aux garçons de ne pas être sensibles, et on bride leurs émotions », souligne la dessinatri­ce Emma. On s’attend encore à ce que les femmes disposent de qualités humaines spécifique­s : souriantes, polies, bienveilla­ntes, bref le plus agréables possible. Or afficher des émotions positives pour que les autres se sentent bien, ce n’est pas naturel, ça demande un effort. Cet effort ne doit pas disparaîtr­e, mais être partagé à parts égales entre femmes et hommes.

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