Cosmopolitan (France)

MA MEILLEURE AMIE A TROUVÉ L’AMOUR (ET PAS MOI)

Le couple ? Très peu pour nous. Mais que faire lorsque notre meilleure amie rencontre l’amour avec un grand A, comme Adieu ? Les six grandes étapes de la reconstruc­tion.

- PAR LAURE ROGER-MALEK

Que faire lorsque notre meilleure amie rencontre l’amour avec un grand A, comme Adieu ? Les six étapes de la reconstruc­tion.

1 LE CHOC

Quand BFF nous annonce que « nous deux » désormais, c’est « elle et lui » on peut se sentir trahie, voire rejetée, abandonnée dans une grande solitude. Le monde s’arrête de tourner, c’est la sidération.

« Ma meilleure amie n’avait carrément pas osé me dire qu’elle était tombée amoureuse, je l’ai découvert par hasard, je n’en revenais pas, raconte Anna, 32 ans, c’est comme si elle m’avait quittée moi. » Tout à coup, elle a moins de temps pour nous, plus de rendez-vous chez l’esthéticie­nne et même pas envie de regarder l’oeuvre intégrale de Ryan Gosling. « J’ai eu la sensation que notre lien était brisé, elle ne parlait que de lui, de lui, de lui », explique Salomé, 28 ans. Subitement, on ne s’intéresse plus du tout aux mêmes choses (nous, on veut aller à Calvi, elle aussi, mais avec lui).

On a la sensation qu’on n’est pas indispensa­ble, voire qu’on ne sert plus à rien. On se coupe en deux. Une partie de nous sait pertinemme­nt ce qui est en

train de se passer (BFF a un nouveau number one dans son coeur), et l’autre partie ne supporte pas cette nouvelle donne. Alors on tombe dans le déni. On lui dit que ce mec est juste un flirt, et qu’elle va bientôt se rendre compte qu’il est possessif, autoritair­e, jaloux (comme nous, en fait). Elle n’a pas besoin de lui. CQFD.

ON FAIT QUOI ? Par définition, un choc, ça ne se prévoit pas. BFF a rencontré l’amour, et ça nous fait l’effet de tomber d’une falaise. Une haute falaise, avec tout en bas une petite plage. La mer est pleine de vagues, d’écume et de tourbillon­s. C’est la mer de nos émotions. Pas de bol, Notre-Dame de la gravité est claire sur ce point : on n’a pas d’autre choix que de tomber dedans.

2 LA COLÈRE

Colère contre lui d’abord. C’est qui, ce Billy ? Il a inventé un vaccin ? Gagné un oscar ? Pondu un oeuf ? « Elle le ramenait tout le temps avec elle, se rappelle Mounia, 34 ans, et même si au fond il était sympa, je me suis mise à le haïr. » Patatras, on tombe dans le piège de la jalousie et de la comparaiso­n. Vite, trouver un responsabl­e. Forcément, c’est lui, alors on lui déclenche une guerre froide et sanglante, saupoudrée de mauvaise foi. Il dit rouge ? On dit vert. Il lui offre un bracelet ? Des menottes, ouais. Il écoute de la musique ? Ouh là là ce gros nul, il a des oreilles ? Colère contre elle, aussi. Mais dans le fond, qu’est-ce qu’elle a de plus que moi ? Un bonnet C ? Un mètre de jambe ? Un coeur ? « Je n’arrêtais pas de me demander pourquoi elle avait trouvé THE ONE alors que j’enchaînais les amours non réciproque­s », se souvient Anna. Et les réseaux sociaux n’arrangent rien. Avant, sur ses selfies, c’était nous deux. L’estime de soi en prend un coup, se transforme en jalousie, escortée par la culpabilit­é. « Je suis devenue désagréabl­e avec elle, passive agressive » avoue Salomé. Et si cette colère racontait surtout et avant tout notre désamour de nous-même ? ON FAIT QUOI ? Maintenant qu’on a chuté dans l’eau froide, notre premier réflexe, c’est de nager à contre-courant, vite, pour rejoindre la plage où BFF et Billy font du naturisme. Notre cerveau gauche et notre cerveau droit sont en guerre ? Normal. L’un, super crawler, pense que les émotions, ça se gère, alors que l’autre se noie dans ses larmes. Sauf qu’on ne veut pas couler, alors on s’entête, on s’acharne à nager contre les vagues, on boit la tasse, et on n’aime pas spécialeme­nt ce petit goût d’eau salée. Mais on s’interdit d’être emportée au large. On préfère pester que de se laisser noyer.

3 LE MARCHANDAG­E

Ça fait plusieurs mois qu’on nage à contre-courant en espérant rejoindre la falaise de notre passé. On a maintenant de très gros bras, à cause du crawl, mais on se demande si on n’est pas devenue Casper, parce qu’on a beau les remuer en l’air, BFF ne vient pas nous chercher. On se sent comme la cinquième bouée de la charrette.

ON FAIT QUOI ? Fatiguée de lutter contre le courant, une petite voix chuchote : « Qui sommes-nous sans l’autre ? » Et si on essayait de répondre à cette question ? Pour de vrai. Sans tricher.

4 LA TRISTESSE

Malgré tous nos efforts pour faire partie de cette grande histoire d’amour qui n’est pas la nôtre, on réalise un jour que c’est pour de vrai. Nous n’irons pas toutes les deux élever des chevaux en Tasmanie, comme c’était prévu. « Je m’accrochais à cette idée que ce serait magique, qu’on allait tout réussir ensemble, et

Certes, les choses ne sont plus comme avant. Pourtant rien ne les empêche d’être encore plus belles…

tout à coup, j’étais seule » se rappelle Anna. C’est la phase où les émotions se libèrent. Tristesse, angoisse, mélancolie, les trois nouvelles copines qui nous obligent à nous confronter à nous-mêmes. « Je me suis dit qu’une partie de moi était morte, et que je ne pouvais pas la faire revenir », confesse Salomé. Alors on accueille l’émotion, tant bien que mal, on lui offre un bol de céréales et on l’écoute parler.

ON FAIT QUOI ? Ça y est, les vagues ont eu raison de nous. Fatiguée de crawler, on fait la planche et on se laisse dériver, emportée doucement par le courant, en voyant s’éloigner la falaise de notre passé. Sur quelle île invisible allonsnous nous échouer ? Le temps peut sembler long. Pourtant, c’est hier qu’on est tombée dans la mer. Notre meilleure amie nous manque beaucoup, certes, mais on arrête de lutter.

5 L’ACCEPTATIO­N

La vie d’avant ne reviendra pas. On verra BFF le week-end, les mois en « bre », les années bissextile­s. Deal. C’est l’étape du lâcher prise. La vie nous résiste, oui. Les chemins se séparent, d’accord. BFF ne partira pas en virée avec nous ce week-end, soit. Alors on ira seule ! Accepter, c’est se donner la possibilit­é de rencontrer quelqu’un : nous-même. « Je me suis rendu compte que j’étais capable de passer du temps toute seule, que ce n’était pas si désagréabl­e », reconnaît Mounia. On commence à sortir de sa zone de confort, à se challenger, et ça nous fait du bien ! En lâchant prise, on se donne aussi l’opportunit­é de rencontrer les autres, et pour de bon. Plop, notre bulle de solitude éclate, on réalise qu’on n’est pas si mal entourée et qu’on a d’autres interlocut­eurs que notre meilleure amie : Mamie veut nous apprendre à tricoter, cousinette nous propose une soirée beuverie, et deux potes pas revus depuis un an nous invitent deux jours à la campagne… Sans parler de ce nouveau mec mignon qu’on a croisé au travail. Notre mer de solitude se peuple enfin de poissons. « J’ai beaucoup échangé avec mon père à ce moment-là, il m’a écoutée et on est devenus très complices », se souvient Anna. « Je suis partie en voyage seule en Thaïlande, raconte Salomé, et je me suis fait de nouveaux amis. » Enfin, on se sent mieux. Notre vie se réorganise, nos émotions s’apaisent, et on commence à se réjouir pour notre meilleure

amie. Billy est un chic type, dans le fond, on l’a toujours su.

ON FAIT QUOI ? Après avoir dérivé pendant au moins trois pousses de poils, on rencontre enfin un petit rocher. On s’y agrippe. C’est pas bien grand, mais c’est chez nous. On peut s’y reposer et faire bronzette. Avant de replonger, pour trouver un rocher plus grand. La mer nous emmène toujours plus loin de notre passé, de plus en plus près de notre nouvelle vie. Au loin, il y a toujours la falaise. Mais quand on la regarde, on ne pleure pas. Mieux, on se réjouit.

6 LA LIBÉRATION

On prend un café ensemble. Notre meilleure amie, nous, et son ventre rond. Une nouvelle vie va voir le jour, pour elle comme pour nous. « Je suis heureuse parce qu’elle est vraiment heureuse, et quand je les vois, je ne me sens plus jamais en trop », explique Anna. Le temps, notre meilleur allié, nous a permis de prendre de la distance. Certes, les choses ne sont plus comme avant, mais rien de les empêche d’être encore plus belles. De nouveaux horizons voient le jour. « Ils m’ont même proposé de partir en vacances avec eux, c’est comme une famille. Quand on est juste tous les trois, j’adore, je me sens comme Joey de Friends, qui par moments squatte chez eux », raconte Mounia. « Je me suis sentie ridicule de lui en avoir voulu, enchaîne Salomé, mais ça m’a appris à grandir et à entrer dans une nouvelle phase de ma vie, et maintenant notre lien est encore plus fort. »

ON FAIT QUOI ? Un matin, debout sur notre rocher, il nous semble apercevoir un îlot des Bahamas avec le torse de Ryan Gosling qui nous fait des coucous. Vite, on plonge. C’est sûr, pendant la traversée, on a perdu des certitudes, des habitudes, parfois des fantasmes. Mais on a trouvé une écoute intérieure et de nouvelles envies. Enfin, on arrive sur la plage, et on boit un jus de noix de coco. On enverra une carte postale à BFF.

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