Cosmopolitan (France)

Joann Sfar

Génial dessinateu­r de BD, il avait adapté au cinéma Le Chat du rabbin, son oeuvre la plus connue. Six ans après, il revient à l’animation avec Petit Vampire, tiré de ses albums à succès.

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« Moi, je crois aux monstres », dit-il. Entre Joann Sfar, 48 ans, l’auteur de BD et réalisateu­r (Gainsbourg, vie héroïque, Le Chat du rabbin), et les freaks, c’est même une longue histoire. À Nice, où il a passé son enfance, il collection­nait les magazines de cinéma fantastiqu­e et allait voir tous les films d’horreur, même les plus ringards, avec son grand-père. « Celui qui m’a le plus traumatisé, et en même temps enchanté, s’appelait Le Commando des morts-vivants » , se souvient-il. Normal alors que certains décors et personnage­s de son nouveau film d’animation en 2D, Petit Vampire, s’inspirent de ses souvenirs enfantins, et notamment des films de la Hammer, comme Dracula ou Frankenste­in. Pour les petits et les grands, Petit Vampire n’est pas un inconnu. Voilà plus de vingt ans qu’il en dessine les histoires et que ses volumes sont même utilisés par les professeur­s pour aider les enfants ayant eu des traumatism­es ou vivant dans des familles dysfonctio­nnelles. « Lorsque mes monstres parlent de leur famille, on peut comprendre en filigrane qu’ils évoquent la maltraitan­ce. J’ai toujours écrit pour des gamins qui considèren­t qu’ils ont un état civil compliqué », expliquet-il. Lui-même a eu la douleur de perdre sa mère à l’âge de 4 ans, même s’il réfute l’idée d’avoir eu une enfance triste. « C’est tout le paradoxe, j’ai eu le malheur d’être orphelin, mais pourtant je connais peu de gens qui aient eu une enfance aussi joyeuse que la mienne. Je me méfie d’ailleurs beaucoup de l’époque actuelle, où les gens sont très heureux d’expliquer qu’ils ont souffert ou qu’ils sont des victimes, moi je refuse cette assignatio­n. » Même chose pour les personnage­s de Petit Vampire, son oeuvre la plus autobiogra­phique. Son héros, le petit Michel, 10 ans, a beau avoir perdu ses parents, il rêve qu’on le considère comme n’importe quel autre gamin. Et si Petit Vampire souffre d’être enfermé dans sa demeure familiale, il prend le premier prétexte pour s’en échapper et aider son ami Michel à faire ses devoirs. « Je crois que le sujet principal de mon film est l’amitié, car j’aime bien parler des choses chouettes et c’est un âge où on attend tout de l’amitié. D’ailleurs, les autres relations qu’on a après dans la vie n’ont pas ce goût d’absolu. » Autre personnage central du film ? Le monstre Marguerite, que Joann Sfar a lui-même doublé, à côté de comédiens plus chevronnés comme Alex Lutz ou Camille Cottin. « Je suis un clown, j’adore prendre des voix. Et puis c’est un gros bébé un peu terrifiant, et j’aime les gros bébés. J’aime les gens bizarres, capricieux, pas raisonnabl­es. » Bref, les mutants et les monstres à qui notre chouchou rend hommage, de la façon la plus poétique qui soit.

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