DIRECTION LES ÉTOILES
Inspiration martienne et cosmique : l’hiver sera intergalactique !
En avril dernier, Thomas Pesquet et ses copains astronautes décollent à bord de SpaceX vêtus de combinaisons blanches à l’allure sixties. Après enquête, on apprend qu’elles ont été dessinées par un costumier hollywoodien, Jose Fernandez, qui a créé des tenues pour Iron Man,
Captain America, Tron… Elles ont tout des panoplies de super-héros : combi façon Marvel, bottes cavalières, casques à la Buzz l’Éclair… Ne manque que la cape. Preuve que la mode, ça compte, même dans l’espace ! Preuve aussi que le cosmos fascine la fashion sphère, comme le montrent les tendances repérées sur les défilés de cet hiver. Prêtes à grimper dans votre soucoupe volante et revêtir votre plus belle combi argentée ?
Rêver et échapper au quotidien
Pour sa collection hiver 2018, Karl Lagerfeld avait fait décoller une fusée au Grand Palais. Rien n’est impossible pour la mode… et surtout pour Chanel. Cette saison, bien qu’aucune capsule ne se soit envolée dans les airs, les créateurs ont été très inspirés. Olivier Rousteing chez Balmain a fait défiler ses mannequins sur les ailes d’un avion Air France, nous embarquant ainsi dans un délire de looks futuristes, parsemés de poches et de lanières pour survivre en cas d’attaque martienne. Chez Rick Owens, les mannequins avaient l’air de débarquer d’une autre planète avec des tenues de guerrières de l’espace. Chez Salvatore Ferragamo, même topo,
mais avec un décor qui rappelait 2001 l’Odyssée de l’espace et des tenues minimalistes accessoirisées de bottes de cosmonautes. Pourquoi cette passion pour l’espace ? Les confinements successifs et la crise nous ont-ils donné des envies d’ailleurs ? A-t-on besoin de rêver plus grand quand tout semble se rétrécir autour de nous ? « Tout à fait », confirme Claire Remy, designer responsable du pôle prêtà-porter femme pour le bureau de tendances Carlin. « Indéniablement, nous avons passé des mois difficiles, repliés chez nous. C’était une situation inédite. Et comme notre quotidien et notre environnement se sont subitement réduits à quelques mètres carrés, nous avons eu besoin de voyager et de nous échapper. D’une certaine façon, cette escapade s’est matérialisée par la conquête de l’espace. » Et elle n’a jamais autant été d’actualité, nous rappelle Claire Remy : « Le tourisme spatial se dessine comme une réalité ! Virgin Galactic s’apprête à vendre des vols suborbitaux pour le grand public alors que Blue Origin, la société de Jeff Bezos, se lance également dans cette course aux étoiles. C’est un vrai phénomène historique – même si, évidemment, c’est un luxe expérientiel qui ne sera pas accessible à tous. Cependant, on peut imaginer que ce type de voyage se démocratisera dans les décennies à venir. De tout cela, il découle une forme de poésie futuriste et un appel à l’imaginaire que l’on retrouve dans la mode. »
Un écho aux années 60
En 1961 et en 1963, Youri Gagarine et Valentina Terechkova réalisent les premiers vols spatiaux. Un exploit qui inspire les créateurs André Courrèges, Pierre Cardin, Paco Rabanne… C’est le début du « space age fashion » : une tendance venue tout droit de la voie lactée avec des looks improbables et des matières complètement délurées pour l’époque. D’un côté, Pierre Cardin bouscule les codes avec des vêtements aux coupes arrondies qui rappellent la lune et des chapeaux d’un nouveau genre font penser aux scaphandres des cosmonautes. De l’autre, la collection Moon Girl de Courrèges crée le buzz avec sa flopée de minijupes, bottes plates et matières plastiques. Pas top écolo mais super avant-gardiste. À tout ce joyeux trip viennent s’ajouter les robes cotte de mailles du couturier Paco Rabanne et des matières inédites comme le jersey d’aluminium ou le cuir fluorescent. Ces années marquent aussi le triomphe de la jeunesse. Issus du babyboom, les jeunes veulent rompre avec les codes vestimentaires de leurs parents et imposer leur culture et leur esthétique inspirées des Anglo-Saxons. C’est le début du prêt-à-porter et d’un effacement des genres dans la mode. « Il y a beaucoup de points communs entre les années 60 et notre époque, soulève Claire Rémy, et ce n’est absolument pas anodin de constater des réminiscences sixties aujourd’hui. Pour ces deux périodes, il s’agit d’un moment de conquête spatiale et de bouleversement sociétal. Il y a une envie d’aller ailleurs et de renouveler les codes établis. On sent que les choses bouillonnent et que l’on va assister à des expansions sur tous les plans. »