Cosmopolitan (France)

Je veux pas enlever mes chaussures à ta soirée

Mais apparemmen­t, c’est obligatoir­e.

- PAR MATHILDE EFFOSSE

« Ah, Mathilde ! Bienvenue ! » chantonne Chloé en m’ouvrant. Je lui tends la bouteille de vin que j’ai apportée, elle me montre un petit meuble dans l’entrée :

« En revanche, si tu peux juste enlever tes chaussures… » Pardon ? Je me marre, pensant à une blague. « Non, mais sérieux. »

Privation de liberté

Enlever mes chaussures chez quelqu’un quand je passe prendre le café ou qu’on est en petit comité, ça ne me dérange pas, je respecte. Mais là, c’est une soirée, il y a trente personnes – j’ai moyen envie de me balader pieds nus dans un appart avec trois cents orteils pour la plupart inconnus. Ça me dégoûte. Autre problème : ma tenue. Mon pantalon, sans mes talons, il fait

10 cm de plus que moi. Je vais avoir l’air d’un gosse qui a piqué le fute de sa mère – et je risque de me prendre les pieds dedans aussi. Chloé m’oblige à passer la soirée mal à l’aise, elle tue mon look ; à tous ceux qui comparent le vaccin obligatoir­e à une dictature, vous n’avez probableme­nt jamais été invités à une soirée où il faut enlever ses chaussures. Relativise­z un peu, les gars !

Pas de chaussette­s… Et alors ?

Chloé fait volte-face et disparaît au milieu de ses invités. Je louche sur leurs chevilles : ah ouais, ils ont obéi quand même… La majorité a des chaussette­s, ouf. Manquerait plus que ça sente les pieds. Une petite lumière s’allume : j’ai qu’à dire que j’ai pas de chaussette­s ! « J’ai pas de chaussette­s », je lâche à Chloé tout sourire. « C’est pas grave », elle me répond tout sourire aussi. « Bah si », je réponds sans sourire. Elle secoue la tête en rigolant et disparaît dans le couloir. Du coup, c’est grave, c’est pas grave… ?

Pantalonné­e

Chloé réapparaît alors que je bugge toujours devant le meuble à chaussures. « Je t’ai apporté des chaussette­s », me dit-elle en me les tendant. Je serre les dents. « Tout va bien ? » Bah non, tout va mal à vrai dire. Deuxième tentative : je lui confie mon problème de longueur de pantalon. « Tu veux que je te prête un jean ? » me demande-t-elle. Elle se fout de moi ou quoi ? Je tente d’appuyer sur la corde sensible : ce pantalon, je l’ai acheté spécialeme­nt pour sa soirée, alors ça me foutrait un peu les boules. « Tu peux faire un petit revers ! » Bah oui tiens, bien sûr.

Reine déchue

« Garde tes chaussures si ça te gêne, hein », me lance Chloé. Pardon ? C’est maintenant que tu le dis ? « Bah ouais, c’est mieux mais c’est pas grave. » Je me débloque enfin de ma position, fière comme un pou. Sur mes talons, j’en jette au milieu de tous ces va-nu-pieds ! J’en imp… CRAC ! Je viens de me péter un talon dans une rainure du parquet. Va-nu-pieds, me voilà.

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