Cosmopolitan (France)

Alors Gaëlle Prudencio On trinque à quoi?

- PAR SOPHIE BILLAUD PHOTO LOKONHOUND­E ENOCH

« À ma pool party ! Tous les étés depuis deux ans, j’organise une fête entre femmes dans une villa avec piscine. L’idée ? Mettre fin aux injonction­s liées au corps, et à cet a priori qu’il faudrait un “summer body” pour se mettre en maillot de bain… En parallèle, je lance ma collection de vêtements grande taille fabriquée en wax et confection­née au Bénin. J’ai hâte ! » Enthousias­te et engagée, Gaëlle Prudencio est une femme multicasqu­ette : blogueuse et porteparol­e du mouvement « body positive » en France, elle est aussi créatrice de vêtements, autrice et militante dans la lutte anti-grossophob­ie. Une voix qui porte et qui fait du bien ! On aimerait croiser plus de femmes comme elle, qui font bouger les lignes d’une société trop normée. Dans l’hôtel parisien où nous la rencontron­s, elle nous confie son histoire. « Je suis originaire du Bénin mais je suis née et j’ai grandi au Sénégal. À 18 ans, j’ai tout quitté pour faire mes études de droit en France et j’ai atterri à Douai. Un vrai choc, aussi climatique que culturel ! La fac, ce n’était pas mon truc, mais j’en ai profité pour faire des stages. J’ai été embauchée dans une agence de garde d’enfants où je m’occupais des recrutemen­ts. À ce moment-là j’ai commencé mon blog. J’ai toujours été grosse et je ne trouvais pas facilement de vêtements pour m’habiller. En cherchant, je suis tombée sur des forums où des filles échangeaie­nt des plans et postaient des photos d’elles, que je trouvais magnifique­s. Ça m’a donné envie de faire pareil, alors je me suis lancée. » Et ça prend ! Dix ans plus tard, Gaëlle décide de quitter son CDI pour se consacrer à son activité de blogueuse. Le body positive et l’acceptatio­n de soi deviennent des moteurs : « J’ai créé une communauté solidaire sans m’en rendre compte, car j’étais moi-même en train d’apprendre à m’accepter par les vêtements. » . Elle nous confie aussi qu’elle a toujours adoré écrire : « Petite, j’avais un journal intime où j’écrivais ce que je ressentais. J’avais 12 ans quand ma grande soeur est morte : je me suis beaucoup livré dans ce journal. Un jour, une de mes tantes est tombée dessus. Elle l’a lu et a tout déchiré ! Je me suis sentie bâillonnée, réduite au silence, alors que j’ai un besoin viscéral de m’exprimer. Même si mon blog parlait de mode, c’était aussi un formidable moyen d’expression. ». Quelques années plus tard, Gaëlle publie son premier livre, Fière d’être moi-même (éd. Leduc) et réalise un autre rêve, créer Ibilola, sa marque de vêtements grande taille. « Tout a commencé à Dakar. J’ai trouvé du wax dans les placards de ma mère et j’ai fabriqué mes premières pièces, que j’ai mises en vente sur le Web. En un quart d’heure, tout était « sold out » et ma communauté m’a poussée à continuer. Je suis allée chercher des tissus au Bénin car c’est là qu’on trouve les plus jolis imprimés, et on m’a présenté une coutière. J’ai découvert le pays de mes parents où je me suis vite sentie chez moi. Six ans plus tard, ma marque cartonne. C’est aussi un projet social, car je crée de l’emploi à Cotonou. Si j’ai choisi le wax, c’est parce qu’on associe ce tissu à l’Afrique et je tiens à mettre ce continent au centre. » Mais pas seulement. Avec le wax, Gaëlle fait passer un autre message : « Les personnes grosses sont invisibili­sées dans notre société et c’est important de faire des vêtements qui se voient. Finalement, mon travail cherche à habituer le regard des gens à la diversité. Pour moi, le body positive, c’est préserver sa santé mentale en s’acceptant telle qu’on est à un instant T. »

★ Un site où vous aimez faire votre shopping ? Eloquii ou Asos.

★ Un podcast qui vous inspire ? Change ton schéma amoureux, de Fanny Gippa.

★ Une chaîne YouTube que vous binge-watchez ? Les vlogs de Best of D.

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