HYBRIDES ET ÉLECTRIQUES
La transition s’accélère
Longtemps annoncée, toujours retardée, la montée en puissance des motorisations électrifiées commence peu à peu à se concrétiser. Si la fin du moteur thermique n’est pas encore une réalité, son sort à long terme semble bien scellé. Il est donc temps de faire le point sur ce qui va le remplacer.
En matière d’industrie, les évolutions sont toujours lentes. Après plus d’un siècle de règne sans partage du moteur thermique dans l’automobile, son remplacement par l’électrique semble acquis. Certes, l’heure n’est pas encore tout à fait venue de rouler en voiture “zéro émission” en toutes circonstances. Mais le contexte politique, écologique et les progrès réalisés sur le plan technique militent de plus en plus en faveur des motorisations électrifiées. Ces derniers mois, les prémices de cet avènement se sont multipliées. En Europe, trois nations, l’Autriche, la Norvège et les Pays-Bas, sont en passe d’interdire purement et simplement la commercialisation de véhicules thermiques d’ici 2025. En Allemagne, une décision similaire est en discussion mais l’échéance serait fixée à 2030. Ces réflexions sont motivées notamment par l’objectif ambitieux de réduction des émissions de CO2 fixé par la conférence de Paris (COP21) l’année dernière. En dépit de ces annonces volontaristes, le moins que l’on puisse dire est qu’il y a loin de la coupe aux lèvres. Ainsi, Outre Rhin, le parc automobile comprend à l’heure actuelle 25 000 véhicules électriques contre… 14,5 millions de Diesel ! Bien entendu ces pays n’envisagent pas d’interdire la circulation aux voitures thermiques déjà mis à la route à cette date. Mais ils espèrent aboutir à un parc roulant “zéro émission” ou presque à l’horizon 2050. Du côté des constructeurs, ces projets sont envisagés avec une prudence certaine :
“Je ne suis pas capable de dire aujourd’hui si ce type d’initiative est réaliste. À l’heure actuelle la voiture électrique ne peut pas encore couvrir tous les usages automobiles. Mais c’est révélateur du niveau de maturité qu’elle a atteint et cela constitue une impulsion forte pour son développement”, explique Éric Feunteun, directeur du programme véhicules électriques chez Renault. Si la question n’est pas encore débattue en France, les mesures d’interdiction de circulation pour les véhicules polluants à Paris, qui frapperont tous les modèles immatriculés avant 2011 à l’horizon 2020, risquent de faire des émules dans les grandes villes de région. Après de nombreux atermoiements, l’appareil
législatif permettant la mise en place de ces zones à circulation restreinte est prêt, et ce genre d’initiative constitue un sérieux coup de pouce à l’électrique qui, par nature, n’est pas concerné. DES PROGRÈS TECHNOLOGIQUES RÉELS Au premier semestre 2016, l’Hexagone a été le premier pays d’Europe en matière de vente de voitures électriques. Renault s’y taille la part du lion. Éric Feunteun précise :
“Entre janvier et août la progression a été très forte puisqu’elle a atteint 40 % par rapport à la même période de l’année dernière. Sur les 14 000 ventes de voitures particulières électriques, Renault est massivement leader puisque nous représentons 50 % des ventes. Cette hausse s’explique bien sûr par les incitations gouvernementales mais aussi par le taux de satisfaction très élevé de nos clients. Il y a un véritable effet de bouche-à-oreille.”
Cette évolution spectaculaire doit tout de même être tempérée : les ventes d’électriques ne représentent toujours qu’à peine plus de 1 % du total !
“L’Autriche, la Norvège et les Pays-Bas sont en passe d’interdire purement et simplement la commercialisation de véhicules thermiques d’ici 2025.”
On le voit, les voitures électriques sont encore marginales. À cela trois raisons, toujours les mêmes avancées depuis les origines: leur autonomie insuffisante, leur coût élevé et les difficultés posées par leur recharge. Peu à peu, le premier inconvénient est en passe d’être réduit. Ainsi le constructeur américain Tesla vient d’annoncer que la dernière version de son modèle S pourrait dépasser 613 km sans recharge. Plus près du commun des mortels, la Nissan Leaf, la voiture électrique la plus vendue du monde, a depuis son lancement voici cinq ans fait progresser son autonomie de presque 100 km pour atteindre aujourd’hui 250 km. Au Mondial de l’Auto, Opel présentera son nouveau modèle Ampera-e qui revendique quant à lui 350 km. Certes, ces chiffres ne permettent toujours pas d’envisager de partir en vacances à l’autre bout de la France, mais ils incitent à envisager avec plus de sérénité tous les déplacements du quotidien.
précise Éric Feuteun.
“Ces progrès vont se poursuivre, Le prix des batteries va continuer à baisser et il sera possible de proposer des véhicules encore plus compétitifs en termes de prix et de coût
d’usage. D’un autre côté, certains constructeurs vont poursuivre leur course à la performance”. Dès aujourd’hui, l’offre de modèles accessibles s’étoffe peu à peu grâce aux très importantes subventions de l’État. Par ailleurs, un marché de l’occasion commence à apparaître : on peut désormais s’offrir une Renault Zoe usagée pour moins de 10 000 euros. Du côté des infrastructures, les progrès sont également tangibles : selon le site spécialisé Chargemap, on trouve désormais 7 048points de recharge dans notre pays, et le chiffre ne cesse d’augmenter.
“Aujourd’hui on compte plus de points de recharge que de stations-service dans notre pays même s’ils sont inégalement répartis”,
note Éric Feuteun. Cependant les bornes hautes performances qui permettent de recharger des batteries en moins d’une heure restent rares. HYBRIDE : UNE TRANSITION QUI PREND DE L’AMPLEUR En attendant la disparition pure et simple du moteur à explosion, une solution de transition a le vent en poupe. L’hybride, qui associe la motorisation thermique et moteur électrique pour diminuer la consommation de carburant, marque des points. Les ventes augmentent nettement, même au sein des flottes qui étaient encore réfractaires à ce type de propulsion. Arnaud Martinet, responsable de Toyota Entreprise (Le groupe Toyota Lexus représente près de 75 % des ventes d’hybrides en France, NDLR) ne cache pas son optimisme :
“À fin juillet, nous avons enregistré une hausse de 4 % des ventes d’hybrides aux sociétés et nous pourrions faire encore mieux d’ici la fin de l’année”.
Alors qu’il est enfin question d’introduire la déductibilité de la TVA sur l’essence en 2017, le mouvement devrait encore s’accélérer. “Pour nous cette hypothèse serait un plus mais à nuancer suivant l’articulation du bonus dans la nouvelle loi de finance 2017. Une diminution du bonus pourrait amoindrir son effet”. En dehors des malheurs du Diesel, la montée en puissance des hybrides doit bien sûr beaucoup à une offre en constante augmentation. La fameuse Prius, qui a introduit ce type de motorisation sur le marché en 1997, n’est plus seule au monde. Le groupe Toyota cuisine ses moteurs hybrides à toutes les sauces. Depuis la citadine Yaris jusqu’au SUV Lexus NX tous les modèles de la gamme ou presque y ont droit ! Le succès du japonais fait des envieux, comme on le verra dans les travées du Mondial de l’auto. Ainsi, le groupe coréen Hyundai Kia vient de lancer deux modèles, la Hyundai Ionic et le Kia Niro. La première est très inspirée par la Prius et le deuxième est un SUV compact, une offre nouvelle qui correspond parfaitement aux tendances du marché. Du côté des constructeurs allemands, on joue toujours la course à la technologie avec l’introduction de nouveaux modèles hybrides rechargeables, très coûteux mais capables de rouler quelques dizaines de kilomètres en mode zéro émission. Les constructeurs français ont accumulé un retard certain en la matière qu’ils comptent rattraper. Renault, qui avait tout misé sur l’électrique se prépare seulement à lancer une Mégane Diesel avec une petite assistance électrifiée d’ici la fin de l’année. Après avoir abandonné la solution de l’hybride Diesel, PSA a quant à lui annoncé son intention de lancer sept nouveaux modèles hybrides rechargeables à l’horizon 2019. On le voit, l’électrification de l’automobile est en marche. Un mouvement qui permet sans doute de diminuer drastiquement les émissions à l’échappement. Elle ne résout cependant pas tous les problèmes de pollution : la production d’électricité et la fabrication des batteries ne sont pas des activités neutres en la matière.
“Le prix des batteries va continuer à baisser et il sera possible de proposer des véhicules encore plus compétitifs.”