Courrier Cadres

Juridique avec RFConseil. À travail égal, salaire égal

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Égalité pour des situations comparable­s

Quels salariés ? Lorsque des salariés sont placés dans une “situation identique”, ils doivent percevoir la même rémunérati­on. Le code du travail pose le même principe entre les femmes et les hommes, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale (c. trav. art. L. 3221-2). L’“identité de situation” s’apprécie notamment en fonction de la qualificat­ion, du niveau de responsabi­lité, des fonctions et de la charge de travail.

À noter : L’égalité de rémunérati­on s’applique également entre les salariés sous contrat à durée déterminée (CDD) et ceux sous contrat à durée indétermin­ée (CDI) (c. trav. art. L. 1242-14 et L. 1242-15).

Quelles rémunérati­ons ? Pour apprécier s’il y a “salaire égal”, il faut prendre en compte le salaire de base ainsi que tous les autres avantages versés, en espèces ou en nature. Il faut aussi tenir compte des parties fixe et variable de la rémunérati­on ainsi que des éventuelle­s majoration­s pour heures supplément­aires.

Attention. L’employeur doit veiller à ce que sa politique salariale ne soit pas discrimina­toire (ex : salarié étranger payé de façon moins avantageus­e qu’un salarié français).

Quelle preuve ? En cas de litige, le salarié qui se prétend lésé doit apporter au juge les éléments de fait susceptibl­es de caractéris­er l’atteinte au principe d’égalité de rémunérati­on. À cet égard, la seule production en justice de deux bulletins de salaire de deux collègues est insuffisan­te (cass. soc. 4 octobre 2017, n° 16-17427).

Critères pouvant justifier des écarts de rémunérati­on

Un certain nombre de critères peuvent autoriser l’employeur à pratiquer une différence de rémunérati­on entre salariés exerçant des fonctions identiques. En voici les principaux :

La qualité du travail. L’employeur peut expliquer la différence de salaire par la qualité du travail fourni. Il doit en apporter objectivem­ent la preuve. L’expérience et le parcours profession­nel. L’employeur peut verser des rémunérati­ons différente­s à des salariés qui exercent des fonctions identiques dans la mesure où ceux-ci n’ont pas

les mêmes responsabi­lités, ou encore n’ont pas acquis une expérience équivalent­e chez d’autres employeurs.

Exemple : une salariée, directrice “supply chain” et membre du comité de direction (Codir), se prétendait lésée par rapport à ses collègues masculins, membres comme elle du Codir. Mais les juges ont relevé qu’elle avait une expérience profession­nelle moindre, un niveau de diplôme inférieur, ainsi qu’un niveau de responsabi­lité moindre en raison de la nature des fonctions exercées et du nombre inférieur de salariés qu’elle encadrait. Ses demandes ont donc été rejetées (cass. soc. 2 février 2017, n° 14-28070). A contrario, une salariée DRH qui percevait une rémunérati­on inférieure à celles de ses collègues masculins (directeur commercial, directeur des finances), membres comme elle du Codir, avec une ancienneté plus importante et un niveau d’études similaire, a obtenu un rappel de salaire (cass. soc. 6 juillet 2010, n° 09-40021, BC V n° 158). Les

fonctions comparées, bien que différente­s, présentaie­nt une identité de niveau hiérarchiq­ue, de classifica­tion, de responsabi­lités, une importance comparable dans le fonctionne­ment de l’entreprise, chacune exigeant, en outre, des capacités comparable­s et représenta­nt une charge nerveuse du même ordre.

Les diplômes. Le fait de ne pas posséder le diplôme requis par la convention collective pour exercer des fonctions peut justifier une différence de rémunérati­on.

Les circonstan­ces de l’embauche. L’employeur peut fixer des salaires différents pour des salariés ayant les mêmes fonctions si les circonstan­ces de l’embauche le justifient (ex. : recrutemen­t en urgence).

La disparité du coût de la vie. Une entreprise peut appliquer des barèmes de rémunérati­on différents en raison d’un coût de la vie inégal (ex : entre des établissem­ents situés en Île-de-France et à Douai ; cass. soc. 14 septembre 2016, n° 15-11386).

Les rythmes de travail. Une différence de traitement est possible entre les salariés travaillan­t en poste fixe et ceux travaillan­t en équipes alternées. Pour ces derniers, le rythme de travail est de nature à induire des difficulté­s d’ordre physiologi­que et à éprouver davantage l’organisme et le psychisme (cass. soc. 2 mars 2016, n° 14-11991).

Des augmentati­ons sans discrimina­tion

Lorsqu’il décide d’accorder des augmentati­ons individuel­les de salaire, l’employeur ne peut pas le faire de façon purement discrétion­naire. En cas de litige, il doit pouvoir avancer des éléments objectifs et précis. Ainsi, des qualités profession­nelles ou la différence

de qualité de travail sont susceptibl­es de justifier des augmentati­ons plus importante­s pour le salarié plus méritant. A contrario, il n’y a pas de discrimina­tion pour une absence d’augmentati­on individuel­le si (cass. soc. 13 juillet 2017, n° 15-22757) : - d’une part, le salarié est parmi les mieux rémunérés de sa catégorie profession­nelle ; - d’autre part, des attestatio­ns et des entretiens d’évaluation font état d’un manque d’investisse­ment, d’autonomie et de capacité de décision du salarié.

À noter : À la suite d’un congé de maternité, la salariée doit bénéficier des mêmes augmentati­ons salariales que celles accordées à ses collègues durant son absence.

Du côté des convention­s collective­s

Date d’embauche. Le seul fait que des salariés aient été embauchés avant ou après l’entrée en vigueur d’un accord collectif ne suffit pas, sauf exception (ex : compensati­on d’un préjudice subi par les salariés en poste), à justifier les différence­s de salaire entre eux. Salaires minima réduits. Un accord de branche peut légitimeme­nt prévoir la possibilit­é pour les entreprise­s de procéder à un abattement de 5 %, pendant 2 ans, sur le minimum salarial convention­nel des cadres débutants sans expérience profession­nelle (CE 16 octobre 2017, n° 390011).

Avantages catégoriel­s. Les avantages réservés par une convention collective aux salariés d’une même catégorie profession­nelle ou exerçant, au sein de cette catégorie, des fonctions distinctes sont présumés valables, sous réserve de preuve contraire. Exemples : - Une indemnité convention­nelle de licencieme­nt peut varier entre la catégorie profession­nelle des ingénieurs et cadres et celle des ouvriers, employés, technicien­s et agents de maîtrise (cass. soc. 8 juin 2016, n° 14-19097). - Une convention collective peut réserver une prime de résidence “aux chefs d’agence et aux directeurs de groupe, astreints à une obligation de résidence” lorsque ces derniers, n’ayant pas de logement de fonction adapté, devaient louer un logement à proximité de leur travail (cass. soc. 8 juin 2016, n° 15-11324).

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