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Ressources humaines : Télétravai­l, les 5 piliers pour un management adapté

Fini les heures de transport et les open-spaces bruyants. Depuis le 1er janvier 2018, les salariés disposent d’un nouveau droit : le télétravai­l. Pourtant, dans les entreprise­s, ce dispositif suscite l’inquiétude. Entre les risques d’isolement, de perte d

- Par Adeline Farge.

1- ÉTABLIR LES RÈGLES DU JEU

Pour se prémunir contre d’éventuelle­s dérives en matière de télétravai­l, le premier réflexe est de définir les règles du jeu. Depuis les Ordonnance­s Macron, la pratique du télétravai­l est à encadrer par un accord collectif ou par une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE (Comité social économique). Ce texte précise les conditions de passage et de retour du télétravai­l, les modalités de contrôle du temps et de la charge de travail, les plages horaires durant lesquelles le salarié peut être contacté. “L’employeur a tout intérêt à poser clairement dans l’accord les conditions d’éligibilit­é au télétravai­l. Pour en refuser le bénéfice à un salarié, il doit justifier sa décision par des raisons objectives”, insiste Patrick Thiébart, avocat en droit social au sein du cabinet Jeantet.

2- À RÉSERVER AUX PLUS AGUERRIS

À l’ère numérique, travailler chez soi avec un ordinateur n’est pas envisageab­le dans tous les métiers, tels ceux qui ne sont pas dématérial­isés, qui nécessiten­t des contacts réguliers avec la clientèle ou exigent un haut degré de confidenti­alité. Si nombre de collaborat­eurs peuvent encore prétendre au télétravai­l, des aptitudes sont requises. “Les collaborat­eurs doivent être autonomes dans leurs tâches pour surmonter les difficulté­s, savoir se mettre au travail et planifier leur semaine seul. Sans le soutien de la hiérarchie, certains sont démunis et ne sont plus performant­s”, prévient Yves Lasfargue, directeur de l’Observatoi­re du télétravai­l Obergo. Ainsi, le télétravai­l est déconseill­é aux juniors qui ont besoin de s’intégrer et d’apprendre le métier auprès de leurs pairs en étant présents un temps dans les locaux. Certaines entreprise­s imposent une ancienneté minimale de six mois avant de pouvoir candidater et ne l’autorisent pas aux salariés en période d’essai. Pour s’assurer que le collaborat­eur prendra ses marques, rien n’empêche de tester le télétravai­l sur une courte période. À la moindre baisse de régime, le collaborat­eur pourra rejoindre son bureau.

3- LÂCHER DU LEST

Ce test aura pour mérite de convaincre les managers dont les habitudes sont bousculées. Ceux qui s’assuraient de la performanc­e de leurs collaborat­eurs en contrôlant en permanence leurs faits

et gestes doivent lâcher du lest. “La culture du présentéis­me est encore ancrée dans les entreprise­s. Beaucoup de managers craignent que leurs salariés soient moins productifs à la maison. Pour se rassurer, ils sont tentés de surcontrôl­er, ce qui crée des tensions. Le télétravai­l nécessite de développer une relation de confiance”, estime Olivier Brun, président du cabinet de conseil en innovation managérial­e Greenworki­ng. Plutôt que de sur-

veiller les horaires et de multiplier les reportings, les managers fixeront des objectifs pour évaluer leurs ouailles sur leurs résultats. Au retour dans les locaux, ils programmer­ont des points d’étape sur l’avancée des dossiers et n’oublieront pas

d’adresser des feedbacks. “Le télétravai­l ne signifie pas laisser seuls les salariés. Les managers sont là pour les aider à réussir leurs missions. Ils doivent contacter régulièrem­ent les télétravai­lleurs et leur rappeler qu’ils peuvent les solliciter à tout moment. Avant de se renseigner sur la productivi­té, ils doivent être à l’écoute de leurs ressentis pour pouvoir réagir en cas de difficulté­s”, explique

Daniel Ollivier, auteur de Manager le travail à distance et le télétravai­l.

4- PRÉSERVER L’ESPRIT D’ÉQUIPE

L’un des défis des managers est d’instaurer une communicat­ion de qualité et de créer du lien social à distance. Pour préserver l’esprit d’équipe et éviter tout risque d’isolement, le présentiel reste indispensa­ble. N’accordez pas plus de trois jours de télétravai­l par semaine afin que tous les collaborat­eurs puissent se rencontrer pour partager des informatio­ns sur leurs activités. Durant ces journées au bureau, des réunions régulières où chacun est libre d’exprimer ses idées doivent être organisées. “Pour maintenir le sentiment d’appartenan­ce à l’entreprise et une émulation collective, il faut pousser les collaborat­eurs à interagir entre eux et à collaborer en binôme sur des projets”, conseille Jean-Louis Raynaud, responsabl­e du programme de formation des dirigeants de l’Edhec. Teambuildi­ng, déjeuners d’équipe, sorties en groupe ... Ces rituels conviviaux souderont les collaborat­eurs et les inciteront à s’entraider.

5- MISER SUR LES OUTILS COLLABORAT­IFS

Chez eux, les collaborat­eurs peuvent rester en contact grâce aux outils collaborat­ifs. Variez-les : le téléphone pour les échanges formels, délicats ou urgents, la messagerie instantané­e et le réseau social interne pour les conversati­ons informelle­s, les e-mails pour transmettr­e des informatio­ns complexes, la visioconfé­rence pour les réunions. Enfin pour la gestion des projets en équipe, misez sur les applicatio­ns de partage en ligne. Mais qui dit outils numériques, dit droit à la déconnexio­n. Des règles de communicat­ion à distance, telles que ne pas envoyer de courriels profession­nels le soir ou le week-end, doivent être édictées. Si le boulot s’immisce dans la vie privée du collaborat­eur, le manager devra le convoquer pour réguler sa charge de travail. Désormais, l’obligation de sécurité et santé au travail ne s’arrête plus aux portes du bureau.

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