Producteurs de vide
À travers des actus insolites et sérieuses autour du monde, Courrier Cadres vous propose un regard incisif sur la Planète travail. Revue de presse par Aline Gérard.
Avoir un vrai job à la con consiste à être conscient que, si votre boulot était supprimé du jour au lendemain, cela ne changerait rien à la marche du monde .” Dans une tribune publiée dans le Guardian, et traduite par Courrier International, Eliane Glaser revient sur les travaux de David Graeber, dont l’ouvrage Jobsàla
con paraîtra en français en septembre. Alors qu’en 1930, Keynes prédisait que les progrès technologiques nous per- mettraient de travailler quinze heures par semaine, nous sommes apparemment encore plus débordés qu’auparavant .“Les travailleurs qui produisent vraiment quelquechose croulent sous la charge de travail, tandis que les grattepapier et les pousseurs de boutons se multiplient. À une époque qui érige en valeur absolue la compétitivité du capitalisme, la prolifération des boulots inutiles reste une énigme .” Puisqu’ils n’ont aucun sens économique, les “jobs à la con” doivent selon David Graeber avoir une fonction politique : une population occupée à faire semblant de travailler ne risque pas de se révolter. Sauf que nous ne travaillons pas uniquement pour payer nos factures, mais aussi pour donner du sens à nos vies et à la société .“Avoir conscience de passer ses journées à accomplir des tâches inutiles est très douloureux sur le plan psychique et laisse‘ des traces indélébiles sur notre âme collective ’”.