Business travel : Centres d’affaires, à la croisée des chemins
Pour répondre aux besoins de plus en plus nomades des entreprises, les centres d’affaires se multiplient et diversifient leurs offres, mêlant bureaux privés et espaces de coworking.
Des bureaux haut de gamme et des services à l’unisson, avec même un service de conciergerie… Pour sa nouvelle offre premium baptisée “Signature”, inaugurée il y a quelques mois dans un chic immeuble parisien, le spécialiste des centres d’affaires Regus (3 000 adresses dans 120 pays) a placé la barre très haut. Cette ouverture ne doit rien au hasard. Inventés dans les années 80 aux États-Unis, les centres d’affaires se multiplient pour répondre aux besoins actuels des entreprises : flexibilité pour mieux s’adapter aux marchés, externalisation pour réaliser des économies et nomadisme des salariés. La demande est aussi dopée par la multitude de plates-formes (Instant Offices, Bureaux à Partager, Neo-Nomade, Choose & Work…) qui permettent de réserver un bureau en quelques clics sur Internet, comme on le ferait pour un hôtel avec Booking. La France compterait ainsi plus de 300 sites aujourd’hui, contre 199 en 2010. Contrairement aux baux classiques “3-6-9” contraignants, la formule est souple et sans engagement, avec des locations de bureaux tout équipés et généralement cloisonnés, à la journée, à la
semaine, au mois…. Le prix (à partir de 300 euros par poste de travail et par mois) inclut l’électricité, Internet, l’entretien, les assurances, ainsi qu’un certain nombre de services (accueil téléphonique et physique, réception du courrier…) auxquels il est possible d’ajouter un éventail de prestations à la carte, par exemple des salles de réunion, des aides administratives ou juridiques… Au final, l’économie atteindrait 15 à 35 % par rapport à un bureau “ordinaire” selon les spécialistes du secteur, comme Regus ou Servcorp.
SE RÉINVENTER
En toute logique, les centres d’affaires séduisent les entreprises en phase de démarrage, qui apprécient de disposer d’une adresse de domiciliation bien située et de bureaux modernes sans casser leur tirelire, le temps de pérenniser leur activité. L’offre répond aussi aux PME en phase de croissance qui ont besoin soudainement d’espaces supplémentaires pour de nouveaux collaborateurs ou à l’inverse, doivent réduire la voilure. Les sociétés qui recherchent des bureaux secondaires dans une autre ville ou à l’étranger pour prospecter de nouveaux marchés y trouvent également leur compte. Enfin, les géants de CAC 40 plébiscitent le co concept, pour leurs cadres en déplacement qui utilisent les centres d’affaires un ou deux jours dans la semaine, mais aussi pour réunir des équipes “éphémères” qui travaillent sur un projet spécifique durant quelques mois, à l’écart des regards indiscrets du siège. Si les voyants sont au vert avec une croissance annuelle de 3 à 4 %, le développement des pépinières d’entreprises et surtout l’émergence d’espaces de coworking, à mi-chemin entre le bureau et le télétravail, obligent toutefois les acteurs à se réinventer. Tous développent parallèlement de nouveaux concepts, axés autour du coworking. Au-delà de bureaux qui ne sont plus cloisonnés mais partagés, la différence réside dans le réseau collaboratif qui doit favoriser l’émulation. Né à San Francisco au milieu des années 2000, le coworking demeure l’apanage des start-upers, consultants free-lance et prestataires de services, qui recherchent un bureau “comme à la maison”, pour quelques heures ou quelques jours. Pour autant, cette méthode de travail et d’appropriation de l’espace pénètre progressivement l’économie traditionnelle. Au point que de grandes entreprises installent désormais certains de leurs
TOUS DÉVELOPPENT PARALLÈLE MENT DE NOUVEAUX CONCEPT S, AXÉS AUTOUR DU COWORKING
salariés dans ces espaces de coworking pour une période plus ou moins longue. Au-delà d’une optimisation des charges immobilières, elles espèrent ainsi attirer de nouveaux talents issus des générations Y et Z réticents au bureau traditionnel. Essentiel car en 2020, les salariés nés entre 1980 et 2000 composeront la moitié des effectifs ! Elles espèrent aussi sortir de la routine pour initier de nouveaux projets. Acteur américain emblématique du coworking, WeWork a notamment séduit des multinationales telles Microsoft.
SÉDUIRE LES GÉNÉRATIONS Y ET Z
Plusieurs centaines de salariés ne sont plus hébergés dans les bureaux du géant de l’informatique mais peuvent évoluer librement dans les différents WeWork de New York. Le groupe, dont l’offre mêle espaces privés et postes de travail non attribués, s’est implanté à Paris en 2017 (près de la gare Saint Lazare, dans le Marais…) et gère plus de 500 sites, dans 96 villes. Et ce n’est qu’un début ! La France comptait ainsi plus de 350 lieux de coworking en 2017, un chiffre bondissant à 14 000 dans le monde selon l’étude Global Coworking Survey. Ces espaces “flexibles” pourraient représenter entre 10 % et 20 % de l’offre de bureaux dans l’Hexagone d’ici cinq ans, contre 2 % aujourd’hui. Dans ce contexte dynamique, l’offre se structure et se segmente. Tous les grands noms de l’immobilier investissent le marché, en concurrence avec les acteurs plus petits (Morning Coworking, Wereso…). Au risque de voir disparaître l’esprit d’origine du coworking ! Nexity fait le forcing avec ses Blue Office ; Bouygues Immobilier met le paquet avec Nextdoor via une joint-venture signée avec Accorhôtels ; et Icade parie sur Smart Desk. Face à l’émergence de ces nouveaux acteurs, Regus ne reste pas les bras croisés. Le groupe développe son enseigne Stop & Work (créée avec Orange et la Caisse des Dépôts) en périphérie et les Regus Express dans les gares et aéroports. Surtout, il a récemment lancé en France ses propres lieux de coworking, baptisés “Spaces” ; à Paris-Réaumur où BNP Paribas a installé une centaine de collaborateurs pour développer un centre de créativité ; et tout récemment à la Défense. Avec 1 800 postes de travail, des restaurants, des salles de fitness, un barbier et même un rooftop, il se présente comme le plus grand espace de coworking en France !