DEVIENT L’AFFAIRE DE TOUS
de personnalités qui connaissent parfaitement les rouages et les effets de la concurrence sur l’activité. Chacun est à même d’observer, saisir ou commenter les conditions concurrentielles d’une entreprise ; chacun critique le bien-fondé concurrentiel des décisions, et le plus souvent avec raison. Plus que cela, avec les pratiques collaboratives, chacun est à même de percevoir des idées ou saisir des ressources pour contribuer à une performance. Avec l’ouverture des enjeux de la stratégie, l’ensemble des parties prenantes peut s’engager dans des conversations stratégiques propices à l’ajustement des idées et des actions au quotidien. C’est ainsi que l’Open-Strategy devient une source de compétitivité. Il s’agit alors d’organiser la stratégie comme une pratique collaborative et non plus comme la chasse gardée de dirigeants qui, de toute façon, ne maîtrisent ni le temps des décisions, ni les asymétries d’information dans des mondes politiques de plus en plus kaleidoscopiques(2). En pratique cela implique deux nouvelles dimensions managériales : la transparence et l’inclusion des personnalités, internes et externes. Il s’agit d’ouvrir les portes de la réflexion stratégique pour récupérer les idées et les ressources compétitives. La transparence suppose d’aménager des espaces de discussions. L’inclusion requiert de prendre chaque partie-prenante comme étant porteuse d’une information clé à expliciter, à sortir de l’ombre et à intégrer dans un schéma toujours transitoire. L’usage des technologies collaboratives permet cette ouverture et cette dynamique. Ainsi est-il devenu possible d’organiser des blogs collaboratifs entre les collaborateurs internes et des personnes clés externes pour élargir les sources de réflexion jusqu’à des collectifs de participation de plusieurs centaines de personnes ou plus encore. La digitalisation des entreprises implique aussi de penser la digitalisation de la réflexion stratégique au travers de ces technologies d’ouverture et de partage !
TRANSPARENCE ET INCLUSION
Les compétences du management stratégique changent alors du tout au tout. Initialement il s’agissait de maîtriser des plans, pratiques, expertises et technologies connus et centralisés. Avec l’OpenStrategy il conviendra de dominer les effets d’une régulation de plus en plus étroite, de collaborateurs de plus en plus free-lance, d’organisations en plateforme et de plus en plus transnationales, avec des expertises extrêmement volatiles et des risques liés à l’accélération des conditions politiques, économiques et sociales. L’Open-Strategy est une démarche qui rompt radicalement avec l’ancienne vision de l’enseignement et de la pratique du management mais aussi avec la valeur d’avenir d’une entreprise. Si la stratégie reste la chasse gardée des dirigeants dans l’entreprise, plus personne n’apportera sa valeur singulière au travail mais seulement son temps de présence. ■ (1) Open Innovation: The New Imperative for Creating and Profiting from Technology, 2003.
(2) Georges Shackle avait anticipé dès les années 70 l’idée de disruption en décrivant une économie et des sociétés soumises à des renversements rapides au sein d’un même cadre. D’où cette notion de kaléidoscope.
Catou Faust