Juridique avec RF Social. Organisation des équipes : Quelle amplitude pour une journée de travail ?
L’amplitude maximale quotidienne de la journée de travail, c’est la durée à respecter entre le début et la fin de la journée de travail. Elle n’est pas fixée en tant que telle par le Code du travail, mais se déduit de la durée minimale du repos journalier
Définir l'amplitude maximale quotidienne
De la prise de poste au départ. L’amplitude de la journée de travail correspond à la période qui s’écoule entre le début et la fin de la journée de travail. Elle comprend le temps de travail, mais aussi les heures consacrées au repos (restauration, pause, etc.) (cass. soc. 23 septembre 2009, n° 07-44226, BC V n° 202).
Par exemple, si le salarié travaille de 9h à 12h30, prend une pause de 12h30 à 14h, puis reprend le travail jusqu'à 18h30, l'amplitude de sa journée de travail est de 9h30.
À distinguer de la durée quotidienne. L’amplitude de la journée de travail ne se confond pas avec la durée quotidienne de travail, qui correspond à la durée de travail effectif.
À noter : La durée quotidienne de travail effectif effectuée par un salarié majeur ne peut pas, en principe, excéder 10 heures. Des dérogations sont toutefois possibles soit sur autorisation de l’inspecteur du travail, soit dans certains cas d'urgence, soit en application de dispositions conventionnelles (c. trav. art. L. 3121-18).
pour les jeunes salariés de moins de 16 à 18 ans, de 12 heures (repos quotidien de 12 heures) ;
pour les jeunes salariés de moins de 14 à 16 ans, de 10 heures (repos quotidien de 14 heures). À titre d'exemple, un salarié majeur qui a débuté sa journée de travail à 6 h du matin doit quitter son poste au plus tard à 19 h, quels qu’aient été la durée et le nombre de ses pauses.
À noter : Suite à l'amplitude excessive de sa journée de travail précédente, un salarié conducteur de poids lourd avait exercé son “droit de retrait” pour refuser un nouveau transport de marchandises (c. trav. art. L. 4131-1 ; voir Dictionnaire Social, “Droit d'alerte de retrait en cas de danger”). L'exercice de ce droit a été jugé justifié (cass. soc. 2 mars 2010, n° 08-45086 D).
Preuve. Les règles de répartition de la charge de la preuve entre l'employeur et le salarié en cas de litige sur les heures de travail (c. trav. art. L. 3171-4) ne sont notamment pas
Amplitude maximale. L’amplitude de la journée de travail se calcule par journée civile, soit de 0 h à 24 h (cass. soc. 18 décembre 2001, n° 99-43351, BC V n° 392).
Compte tenu des exigences de repos quotidien, l’amplitude maximale de la journée de travail est différente selon la tranche d'âge du salarié. Elle est
(c. trav. art. L. 3131-1 et L. 3164-1) :
pour les salariés de plus de 18 ans, de 13 heures (repos quotidien de 11 heures) ;
applicables au repos quotidien minimal de 11 h consécutives par 24 h (dir. 2003/88/CE du 4 novembre 2003, art. 3 ; cass. soc. 23 mai 2013, n° 12-13015 D). La preuve repose donc sur l'employeur. Cela concerne, par ricochet, la preuve de l'amplitude journalière.
Droit à la déconnexion. S'assurer du respect de l'amplitude la journée de travail nécessite d’assurer le respect du droit à la déconnexion (voir encadré). En effet, tout salarié a le droit de ne pas être connecté aux technologies de l'information et de la communication (TIC) mises à disposition par l'entreprise (ex. : mail professionnel, intranet) en dehors du temps de travail (c. trav. art. L. 2242-17).
Gérer l'amplitude pour les cas particuliers
Travail de nuit. Pour les travailleurs de nuit, la période de référence n'est pas la journée civile (0-24 h), comme dans le cas général. L'amplitude de la journée de travail s'apprécie sur une période de 2 jours (voir Dictionnaire Social, “Travail de nuit”).
Les juges ont ainsi estimé qu’un salarié prenant son service à 20 h jusqu'à 14 h le lendemain dépassait l'amplitude journalière autorisée (cass. soc. 23 septembre 2009, n° 07-44226, BC V n° 202).
Heures d’équivalence. Dans certaines professions où il existe des périodes d’inaction liées au métier, une durée de présence supérieure à la durée légale (35 h) est considérée comme étant équivalente à la durée légale (c. trav. art. L. 3121-13 ; voir Dictionnaire Social, “Heures d’équivalence”).
Pour ces salariés, l’amplitude maximale de la journée de travail s'apprécie en retenant les périodes d'inaction prises en compte au titre du système d'équivalence (cass. soc. 29 juin 2011, n° 10-14743, BC V n° 184).
Dérogations prévues par convention ou par décret. Des exceptions aux amplitudes maximales quotidiennes peuvent se créer par le jeu des dérogations possibles au repos quotidien (dérogations conventionnelles, dérogations en cas d’urgence ou en cas de surcroît exceptionnel d’activité, etc.) (voir Dictionnaire Social, “Repos quotidien”).
À noter : Ces dérogations supposent que les salariés concernés bénéficient d’une période de repos au moins équivalente ou, lorsque cela est impossible, d’une contrepartie équivalente prévue par un accord collectif (c. trav. art. D. 3131-2).
Amplitude des salariés en forfait jours
Contrôler l'amplitude. La convention de forfait en jours sur l’année suppose la conclusion préalable d’un accord collectif prévoyant la possibilité d’y recourir (accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, convention ou d’un accord de branche) (c. trav. art. L. 3121-63).
Avant la loi du 8 août 2016, le thème de l’amplitude devait être explicitement abordé par l’accord : celui-ci devait comporter suffisamment de garanties pour permettre “à l’amplitude et à la charge de travail de rester raisonnables” et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié (cass. soc. 26 septembre 2012, n° 11-14540, BC V n° 250). D'ailleurs, la
Cour de cassation continue à exercer son contrôle sur ces accords (cass. soc. 9 novembre 2016 n° 15-15064, BC V n° 214
; cass. soc. 5 octobre 2017, n° 16-23106,
BC V n° 173).
Pour les accords collectifs conclus après cette date, l’employeur soit s’appuie sur l’accord s’il contient des dispositions “pertinentes” sur les modalités d’évaluation et de suivi régulier de la charge de travail (c. trav. art. L. 3121-64, II, 2°), soit, à défaut, met en oeuvre les règles supplétives légales de suivi (dont une évaluation de la charge de travail pour s’assurer de sa compatibilité avec les repos quotidiens et hebdomadaires) (c. trav. art. L. 3121-65, I). En tout état de cause, les salariés en forfait annuel jours doivent bénéficier d'un repos quotidien de 11 h minimum, leur amplitude quotidienne de travail est donc de 13 heures (c. trav. art. L. 3121-62).
Preuve. Quelle que soit la date de l'accord collectif régissant la convention de forfait jours, la preuve que l'employeur a respecté les termes de l'accord en matière de contrôle de la charge de travail et de l’amplitude du temps de travail pèse sur lui (cass. soc. 19 décembre
2018, n° 17-18725 FPB). Faute d'apporter cette preuve, la convention est sans effet et le salarié peut solliciter le paiement de ses heures supplémentaires. ■