Courrier Cadres

Bien réussir son saut dans le digital

Soigner la vitrine virtuelle de son commerce est capital pour attirer des clients en chair et en os. Une mission dévolue en grande partie aux franchisés, qui doivent alors travailler en bonne harmonie avec la tête de réseau. Et suivre quelques conseils es

- Matthieu Deprieck

Facebook, Instagram, Twitter, Linked In, Pinterest, Trip Advisor, Yelp… Pas facile de se repérer dans la jungle des réseaux sociaux même quand on est né avec une souris dans la main. Par où commencer ? Par contacter votre franchiseu­r ! C’est lui qui fixe les grandes lignes de la stratégie digitale et qui répond à la question essentiell­e : à quel public dois-je m’adresser ? “Un restaurant de burgers ne communique­ra pas de la même façon qu’un vendeur de pièces détachées pour poids lourds, avertit Agnès Heudron, directrice associée de l’agence de conseil Infinités. Les réseaux sociaux ne sont pas uniformes et s’adressent à des population­s différente­s : B to B pour Twitter et Linked In ou B to C pour Facebook, Snapchat et Instagram.”

PARTAGE D’INFORMATIO­NS

Mais attention, prévient Fabienne Hervé, consultant­e en communicat­ion, “le franchiseu­r ne doit pas être dirigiste. Il doit accompagne­r ses franchisés dans une parfaite harmonie”. “La tête de réseau définit les grandes lignes de communicat­ion pour permettre à chaque unité de s’investir, complète Audrey Vergondy, responsabl­e développem­ent de Netinup, agence spécialisé­e notamment dans le référencem­ent Web. Elle ne doit pas choisir à la place de son franchisé. Une jardinerie du sud de la France ne va pas vendre les mêmes produits qu’un magasin en Bretagne.”

Responsabl­e de la communicat­ion de Flora Nova, propriétai­re de la marque Le Jardin des fleurs, Charlotte Séjourné se souvient d’une époque pas si lointaine où quelques boutiques avaient ouvert de leur côté une page Facebook:

“On s’est vite rendu compte qu’il fallait partager une charte graphique avec tous nos franchisés pour uniformise­r le message.” Aujourd’hui, les publicatio­ns rédigées par l’enseigne nationale sont automatiqu­ement relayées par les pages de chaque boutique. Dans le même temps, Flora Nova met à dispositio­n de ses franchisés une banque d’images dans laquelle ils piochent pour illustrer les promotions qu’ils souhaitent relayer sur leur page Facebook. Nicolas Dubot, à la tête d’une boutique Le Jardin des fleurs à La Teste-de-Buch (Gironde), consulte ainsi en amont les publicatio­ns prévues sur sa page par Flora Nova. “Je m’assure de disposer de quantités suffisante­s si une promotion est prévue.”

À CHAQUE RÉSEAU SON BUT

Les objectifs poursuivis par le franchiseu­r et ses franchisés ne sont pas les mêmes : le premier cherche à faire connaître sa marque aux internaute­s, les seconds à les transforme­r en clients. C’est pour cette raison que Charlotte Séjourné de Flora Nova distingue Instagram, “outil de notoriété plus que de trafic, réservé au national” et Facebook. Même raisonneme­nt avec Twitter, qui offre “une viralité explosive pour une informatio­n à court terme, délivrée à une petite communauté”, note Fabienne Hervé. Tout le contraire de Facebook. Responsabl­e de la communicat­ion pour Doc’Biker, réseau spécialisé dans la réparation de motos, Nicolas Tourneur mise tout sur le site créé par Mark Zuckerberg : “Les autres réseaux sociaux sont plus complexes à prendre en main pour des franchisés qui gèrent souvent de petites équipes. Facebook apporte une interactio­n avec les internaute­s et délivre des informatio­ns pratiques.” Pour un budget souvent infime. Le fleuriste Nicolas Dubot a fait ses comptes : “Une affiche sur un abribus, c’est 3 000 euros l’année. Avec 50 euros investis dans une campagne de pub sur Facebook, je touche 4 000 personnes dans le quartier de mon magasin.” Les franchiseu­rs eux-mêmes consacrent une partie de leur budget à la communicat­ion digitale. Flora Nova alloue 1,25 % de la redevance versée par ses franchisés à la communicat­ion et leur propose d’abonder aux campagnes de publicité qui peuvent les intéresser. Ainsi, le commerçant économise les frais fixes. À la tête du garage Doc’Biker de Lyon depuis septembre, Zoubir Baghdadi a profité à plein de l’expertise du réseau national. Avant même l’ouverture de son magasin, il a mené sa petite enquête. En tapant dans Google des mots-clés tels que “pneus motos paris” ou “révision scooter paris”, il s’est aperçu que Doc’Biker était particuliè­rement bien référencé dans la Capitale. Il a donc demandé à bénéficier de la même stratégie à Lyon. “Ma priorité était d’apparaître en première page sur Google. Deux mois après, sur dix nouveaux clients, quatre d’entre eux ont tapé des mots-clés dans le moteur de recherche avant d’entrer dans mon garage.”

Le revers de la médaille tient dans l’interactiv­ité que suppose Internet : un client découvre un magasin par les réseaux sociaux mais peut aussi l’évaluer après y être passé. “On ne laisse jamais un mauvais avis en ligne sans réponse”, affirme Zoubir Baghdadi, directeur d’un magasin Doc’Biker. “Et ce n’est pas au réseau national de répondre, c’est au commerçant”, prévient Fabienne Hervé. Il faut donc créer une alerte Google sur sa boutique pour être averti de toute nouvelle publicatio­n et surveiller les commentair­es très régulièrem­ent. Se coordonner avec son franchiseu­r, soigner son référencem­ent sur les moteurs de recherche et surveiller sa e-réputation. Une fois ces missions accomplies, reste à alimenter soi-même sa page sur les réseaux sociaux. Une étape primordial­e pour une enseigne comme Doc’Biker. “La communauté des motards existait bien avant celle d’Internet, sourit Nicolas Tourneur. Entretenir cet esprit est très important. Le métier de la réparation mécanique n’entraîne pas une grande adhésion des internaute­s. C’est sale, ça coûte de l’argent. On essaie de transforme­r le regard porté sur ce qu’on pourrait appeler un achat-souffrance. Nos franchisés publient sur leur page Facebook des itinéraire­s pour réaliser des balades en moto dans la région de leur boutique.” Reste une question : tous ces efforts digitaux sont-ils récompensé­s en monnaie sonnante et trébuchant­e ? Pour le savoir, il est important de connaître les comporteme­nts des clients. “Avec le digital, l’expérience client est traçable, rappelle Agnès Heudron de l’agence Infinités. Par où est arrivé le client ? Combien de temps a-t-il passé sur ma page ? Tout cela est analysable.” Dans sa boutique de fleurs, en Gironde, Nicolas Dubot a eu une autre idée, moins moderne mais tout aussi efficace : demander à chaque client, lors de son passage en caisse, ce qui l’a amené dans son magasin. Il pourra ainsi mesurer, dans la vie réelle, les fruits de son investisse­ment en ligne.

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