Courrier Cadres

CALCULER L’INDEMNITÉ DE RUPTURE CONVENTION­NELLE

L'employeur et le salarié peuvent conclure une rupture convention­nelle individuel­le pour mettre fin au contrat de travail. Cette rupture ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité, dont le montant minimum obéit à un calcul particulie­r.

-

Déterminer le montant plancher de l'indemnité

Montant fixé d'un commun accord. Au cours du ou des entretiens relatifs à la rupture convention­nelle individuel­le (RCI), l'employeur et le salarié doivent discuter, et se mettre d'accord, sur le montant de l'indemnité spécifique qui sera versée (c. trav. art. L. 1237-12). Si ce montant doit respecter un certain plancher, rien n'empêche l'employeur et le salarié de se mettre d'accord sur une somme supérieure.

Employeurs relevant de l'ANI du 11 janvier 2008. Si l'employeur entre dans le champ de l'accord national interprofe­ssionnel (ANI) du 11 janvier 2008, il doit se baser sur l'indemnité convention­nelle de licencieme­nt, dès lors que cette dernière est plus élevée que l'indemnité légale de licencieme­nt (avenant n° 4 du 18 mai 2009, étendu par arrêté du 26 novembre 2009, JO du 27).

Si la convention collective prévoit une indemnité de licencieme­nt pour motif personnel et une indemnité en cas de licencieme­nt économique, le minimum à respecter est (instr. DGT 2009-25 du 8 décembre 2009) :

l'indemnité légale, si au moins une des indemnités convention­nelles est inférieure à l'indemnité légale ;

l'indemnité convention­nelle la plus faible, si les deux indemnités convention­nelles sont supérieure­s à l'indemnité légale.

Minimum prévu par le Code du travail. Lorsque l'employeur n'entre pas dans le champ de l'ANI de 2008, l'indemnité de RCI ne peut pas être inférieure au montant de l'indemnité légale de licencieme­nt (c. trav. art. L. 1237-13 ; circ. DGT 2008-11 du 22 juillet 2008 ; instr. DGT 2009-25 du 8 décembre 2009 ; cass. soc. 27 juin 2018, n° 17-15948 D). L'employeur n'est alors tenu que par le montant de l'indemnité légale de licencieme­nt, sauf si un accord spécifique lui impose le versement de l'indemnité convention­nelle.

À noter : Dans son rapport annuel 2018 présenté le 27 septembre 2019, la Cour de cassation réitère une propositio­n de réforme. Elle suggère de modifier le Code du travail afin de prévoir que l'indemnité spécifique de RCI ne puisse être infé

rieure à l'indemnité de licencieme­nt prévue par un accord collectif ou des dispositio­ns légales plus favorables. La DGT a indiqué prendre bonne note de cette propositio­n. Précisons qu'au 10 février 2020, aucune modificati­on en ce sens n'était encore intervenue.

Calculer l'indemnité

Ancienneté à retenir. En théorie, l'indemnité légale de licencieme­nt est réservée aux salariés ayant au moins 8 mois d'ancienneté dans l'entreprise (c. trav. art. L. 1234-9). Toutefois, l'administra­tion estime que cette indemnité est due même à un salarié qui conclurait une rupture convention­nelle en ayant une ancienneté inférieure. L'indemnité se calculerai­t alors au prorata de son nombre de mois de présence dans l'entreprise (circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009, § 5-3). En pratique, il y a donc toujours une indemnité de rupture convention­nelle à verser.

Pour calculer l'indemnité, il convient de tenir compte de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise à la date de la rupture du contrat de travail que l'employeur et lui ont déterminée dans la convention de rupture (circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009, § 5-2). À titre d'exemple, pour un salarié ayant 5 mois d'ancienneté, l'indemnité de rupture convention­nelle légale minimale est au moins égale à : (salaire brut mensuel moyen × 1/4 × 5/12) (c. trav. art. R. 1234-2).

À noter : L'employeur et le salarié peuvent convenir de différer la date de rupture (CA Rouen, 2 octobre 2012, n° 11-03752). Il faut alors tenir compte de l'ancienneté et du montant de la rémunérati­on du salarié à cette date.

Modalités de calcul. L'assiette de calcul de l'indemnité de rupture convention­nelle est identique à celle utilisée pour calculer l'indemnité légale de licencieme­nt. L'employeur se base donc sur les derniers mois de salaire du salarié, c'est-à-dire les 3 ou les 12 derniers mois, selon ce qui avantage l'intéressé ou, en cas d'ancienneté inférieure à un an, la moyenne mensuelle de la rémunérati­on de l'ensemble des mois précédant la rupture (c. trav. art. R. 1234-4).

Attention cependant, l'employeur et le salarié ne pouvant inscrire que les 12 salaires versés précédemme­nt à la demande d'homologati­on, et non les 13 mois précédant la date de rupture du contrat, l'administra­tion invite le salarié à vérifier que ses rémunérati­ons à venir jusqu'à la date effective de la rupture ne modifient pas en sa défaveur la base de calcul de l'indemnité convenue (circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009, § 5-3).

Mention et versement. Le montant de l'indemnité de rupture convention­nelle doit figurer dans la convention de rupture (c. trav. art. L. 1237-13). L'indemnité est versée à la date de rupture du contrat indiquée dans la convention. Toutefois, un retard dans le versement ou un défaut de paiement ne remet pas en cause la validité de la rupture convention­nelle (CA Colmar, ch. soc. sect. A. 14 juin 2012, n° 11/00239 ; CA Reims ; ch. soc., 16 mai 2012, n° 11/00624).

Contentieu­x

Contentieu­x sur le montant. Devant les prud'hommes, le salarié peut contester le montant de l'indemnité de rupture convention­nelle qui lui a été versé sans avoir à contester la validité de la rupture en elle-même (cass. soc. 10 décembre 2014, n° 13-22134, BC V n° 286).

Par ailleurs, le fait que le salarié et l'employeur aient convenu, dans la convention de rupture convention­nelle, d'une indemnité d'un montant inférieur à l'indemnité légale de licencieme­nt n'entraîne pas, en lui-même, la nullité de la rupture convention­nelle. Le juge condamne l'employeur

à compenser l'écart entre l'indemnité versée et la somme normalemen­t due (cass. soc. 8 juillet 2015, n° 14-10139, BC V n° 144). Il en est de même si le montant de l'indemnité est inférieur à l'indemnité convention­nelle de licencieme­nt (cass. soc. 4 novembre 2015, n° 13-27873 D).

En revanche, si le montant insuffisan­t de l'indemnité relève d'une fraude ou d'un vice du consenteme­nt, la convention peut être annulée.

Remboursem­ent de l’indemnité. Si la convention de rupture est annulée, la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licencieme­nt sans cause réelle et sérieuse et l'employeur est condamné à verser une indemnité à ce titre (cass. soc. 30 janvier 2013, n° 11-22332, BC V n° 24). Mais la nullité de la convention de rupture suppose également que le salarié restitue les sommes perçues en exécution de cette convention. Par conséquent, l'employeur ne verse pas l'indemnité de licencieme­nt sans cause réelle et sérieuse en plus de l'indemnité de RCI. En pratique, le juge ordonne plutôt la compensati­on entre l'indemnité due par l'employeur suite à la requalific­ation en licencieme­nt sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité spécifique de rupture convention­nelle versée (cass. soc. 30 mai 2018, n° 16-15273 FSPB). Le cas échéant, l'employeur verse le delta au salarié. ■

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France