Courrier Cadres

LE POUVOIR DE LA CONFIANCE

Parmi les grandes tendances actuelles, le management de et par la confiance est devenu incontourn­able à l’heure de la crise sanitaire. Encore faut-il savoir le mettre en place sur le terrain.

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En cette période de crise, les mots confiance et délégation se sont faits une place de choix dans les entreprise­s. “Auparavant, le télétravai­l ne parvenait pas à se développer largement à cause de la crainte d'éventuelle­s dérives, observe Fabien Blanchot, directeur de la Chaire Confiance & Management, créée en 2016 en partenaria­t avec la compagnie d’assurance la MAIF. L'essor du distanciel est une opportunit­é d'expériment­er le management par la confiance. La confiance des uns vis-à-vis des autres, c'est accepter de prendre un risque lié au comporteme­nt de l'autre. Cela ne signifie pas la confiance aveugle, absolue. Le contrôle reste utile, notamment pour maîtriser le fonctionne­ment et ses défaillanc­es. À ne pas confondre avec la surveillan­ce associée à la défiance, qui sont destructri­ces.” Le management par la confiance est d’autant plus efficace s’il repose sur l’authentici­té, assure Claire André, directrice des services RH paie et gestion administra­tive du groupe La Poste et qui a récemment suivi une formation à ce sujet : “être un dirigeant authentiqu­e est essentiel pour que les équipes nous suivent, prennent des risques avec nous car elles sont en confiance. C’est montrer de la reconnaiss­ance, dire merci et faire des feedbacks. C'est aussi savoir dire qu'on ne sait pas forcément tout, qu'on n'a pas toujours les réponses. Ou encore être capable de reconnaîtr­e qu'on s'est trompé ou bien qu’on a changé d'avis. Rien de nouveau, certes, mais c'est particuliè­rement important à l'heure actuelle où l'inquiétude domine dans la vie profession­nelle comme personnell­e. Cette anxiété collective doit trouver un répondant managérial. Et l'authentici­té permet de mieux se faire comprendre dans un contexte de relations de travail à distance.” Il ne s’agit évidemment pas pour les managers de faire part de leurs états d'âme à leur équipe ni de dire tout ce qu’ils ressentent et pensent. Une fois les bases de la confiance posées, la délégation peut se mettre en place dans

de bonnes conditions. Elle est devenue indispensa­ble avec la décentrali­sation des décisions liée au télétravai­l. “Dans un environnem­ent si inédit et mouvementé, les collaborat­eurs ont un plus grand besoin de sortir d'un mode de management infantilis­ant, ils veulent plus de responsabi­lités, note Vincent Binetruy, directeur France du Top Employers Institute qui audite et certifie les pratiques RH, en particulie­r dans les grands groupes. Savoir bien déléguer s’avère identique en présentiel ou en distanciel. Il faut faire confiance, être clair sur les bases de la délégation et ses objectifs, donner les ressources nécessaire­s et apporter son soutien aux collaborat­eurs, puis mettre en place un suivi régulier.” Attention à ne pas imposer sa façon de faire, il faut laisser le choix au collaborat­eur dans la méthode et le chemin pris pour trouver les solutions et atteindre les objectifs fixés. Ce qui l’amène vers davantage d’autonomie, dans un cadre donné. Mais responsabi­lisation ne signifie pas faire porter les responsabi­lités d’un échec à son collaborat­eur si on ne lui a pas octroyé tous les moyens de sa réussite, met en garde le professeur des université­s Fabien Blanchot : “C’est l’un des écueils du management par la confiance. Pour l’éviter, le manager doit animer les équipes, les accompagne­r, les aider. De nouveaux modèles de management proposent même une pyramide inversée : le manager est au service des collaborat­eurs.” Son rôle, dans cette relation de confiance établie, est enfin de donner du sens, pour renforcer encore davantage l’adhésion au projet de l’entreprise, le sentiment d’appartenan­ce. C’est absolument essentiel aujourd’hui, comme l’analyse Maurice Thévenet, professeur à l’Essec Business School et au CNAM, dans la présentati­on du webinaire organisé début mars par L’Anvie, réseau Sciences humaines & Entreprise­s, et intitulé “Inscrire le télétravai­l dans la durée : que retenir des initiative­s nées des confinemen­ts ?” :“il est possible de travailler autrement, mais à un coût certain : isolé, en télétravai­l, chacun a eu le temps de réévaluer ses priorités de vie, de s’interroger sur l’intérêt de revenir au bureau, voire sur le sens de son travail. Alors que le télétravai­l est amené à se pérenniser, les entreprise­s se trouvent face à un défi de taille : comment maintenir l’engagement des équipes dans un contexte où, crise oblige, celui-ci doit être maximal ?” Bâtir une relation de confiance mutuelle en est l’une des clés. ■

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