Courrier Cadres

LE DÉFI DU “CARE MANAGEMENT”

Face à la crise que nous traversons, il n’y a pas que le faire, il faut également le “care”. Une notion qui nécessite notamment une bonne dose d'écoute dans les pratiques managérial­es.

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Dans un contexte général anxiogène où, qui plus est, les liens sont distendus à cause du télétravai­l, le renforceme­nt de la bienveilla­nce et de la reconnaiss­ance au sein des équipes s’avère indispensa­ble. “Le management bienveilla­nt, c’est appeler le salarié juste pour demander 'comment ça va' et 'en quoi je peux t’aider', être à l’écoute, au service de l’équipe, se rendre disponible pour elle, souligne Frédéric Balletti, directeur Expérience Collaborat­eur chez KPAM-RH, cabinet d’études et de conseil en ressources humaines et accompagne­ment du changement. Faire preuve d’empathie les uns envers les autres devient encore plus indispensa­ble qu’avant. Cela permet de repérer les signaux faibles, le langage non verbal, même à distance.” Il a déjà travaillé, avant la pandémie, sur le care management avec Michelin, qui a déployé un programme intitulé “I Care”. “Il est fondé sur la notion de reconnaiss­ance et lié au sens que l'on donne au travail, à l'envie de s'engager, de se projeter, détaille Delphine Girault, responsabl­e Expérience Employé du groupe clermontoi­s. Dans ce cadre, nous venons d'organiser un concours au niveau internatio­nal, appelé 'the great experience' avec 126 projets participan­ts et trois finalistes. Le but est de promouvoir le sens du collectif, la solidarité mais aussi l'autonomie, l'inventivit­é, la réactivité et l'agilité de nos équipes face à la crise. Certaines ont, par exemple, donné aux services d'urgences des pneumatiqu­es pour les ambulances. Des petites vidéos ont été réalisées pour témoigner du travail accompli et sont diffusées en interne : c'est une manière d'être individuel­lement et collective­ment reconnu au sein du groupe.”

Au-delà de ce type de communicat­ion positive, il est plus que jamais nécessaire d’instaurer, au quotidien, la culture du feedback, assure Biljana Kostic,

DRH groupe de Setec, un des plus importants groupes d'ingénierie pluridisci­plinaire français : “C'est encore plus fondamenta­l avec le travail à distance. Il faut donner du feedback et accepter d'en recevoir, adopter le réflexe de se dire les choses car on ne se croise plus dans les couloirs. C’est pourquoi nous avons mis en place un outil permettant de poser des questions aux collaborat­eurs, de provoquer des discussion­s, de faire du feedback au fil de l'eau et pas seulement au moment de l'entretien annuel !” Les solutions digitales d’enquêtes auprès des salariés se sont développée­s dans les entreprise­s qui entendent ainsi maintenir le lien, le dialogue et la cohésion, même à distance.

SENS DU COLLECTIF

L’écoute se renforce donc au coeur de la mission managérial­e qui évolue avec la pérennisat­ion, au moins partielle, du télétravai­l : les managers transforme­nt leurs activités classiques de prescripti­on des tâches et de contrôle de l’atteinte des objectifs, pour s’orienter aussi vers un rôle de facilitati­on, d’appui des équipes. Sachant que la bienveilla­nce n’exclut évidemment pas l’exigence. Il y a toujours une demande de résultats, mais également une compréhens­ion des difficulté­s rencontrée­s et des efforts consentis par les salariés. La reconnaiss­ance prend ainsi des formes plurielles (lire encadré). Et elle se traduit par une valorisati­on des salariés qui ne passe pas seulement par la rémunérati­on, insiste Frédéric Balletti, de KPAM-RH qui mène des enquêtes pour de grands groupes à travers l’analyse de verbatim :“On entend parfois des managers dire 'si je lui dis merci, il va me demander de l’argent'et c’est donc, chez eux, un frein à la reconnaiss­ance. Ils alertent quand ça ne va pas, mais ne savent pas féliciter quand tout va bien. Or, du côté des collaborat­eurs, il ressort souvent cette phrase : 'un simple merci aurait suffi'… Ou même une boîte de chocolats! Des petits gestes qui comptent beaucoup, en réalité.” Une autre matérialis­ation capitale de la reconnaiss­ance, c’est la formation, qui valorise les collaborat­eurs. Face à l’urgence de la situation qui s’inscrit dans la durée, elle a eu tendance à être négligée depuis un an. Or il est indispensa­ble qu’elle revienne sur le devant de la scène managérial­e, que ce soit en présentiel, en distanciel ou en mode hybride, avec les multiples propositio­ns de blended learning. C’est l’une des nombreuses manières de prendre soin de ses salariés… ■

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