Courrier Cadres

Ressources humaines : Rétention des talents, redoubler d’inventivit­é en temps de crise

La crise sanitaire étant passée par là, certains collaborat­eurs vont inévitable­ment vouloir quitter le navire. Un enjeu essentiel pour les organisati­ons qu'il faut absolument anticiper.

- Par Marie Roques.

Au moment où les entreprise­s rouvrent leurs portes aux salariés, la gestion de ce retour au bureau constitue la priorité des responsabl­es RH. Car, ce changement brutal promet d’être difficile, voire insupporta­ble pour certains collaborat­eurs en télétravai­l depuis près de 18 mois. Une phase de transition qui pourrait pousser certains à vouloir quitter le navire. Comment travailler sur la rétention des talents dans ce contexte post-crise. "Travailler sur la rétention des talents ou l’attractivi­té en cette période post-crise est fondamenta­l, estime d’emblée Audrey Richard, présidente de l’ANDRH et directrice des ressources humaines du groupe Up. Déjà, les entreprise­s qui imposeront un retour sur site trop brutal sans proposer de travail hybride auront du souci à se faire."

MODERNISER LES PROCESS RH

Car, selon l’experte, la crise a montré que le télétravai­l à temps plein permettait de poursuivre la plupart des activités et si certaines organisati­ons souhaitent revenir au rythme de travail d'avant la crise, cela risque de crisper non seulement les salariés, mais aussi les organisati­ons syndicales en plus de candidats. "Si plusieurs collaborat­eurs souhaitent quitter l’entreprise, celle-ci va se retrouver dans une spirale plutôt négative en matière d’image et cela aura un impact sur le business", prévient Audrey Richard. Dans ce contexte, il ne faut pas perdre de vue que, durant cette période de crise, le management a considérab­lement évolué, l’autonomie des collaborat­eurs a été mise au centre de tout. "Si les entreprise­s proposent un retour en arrière également sur ces modes de management, les salariés seront malheureux et vont rapidement aller voir ailleurs", poursuit Audrey Richard. Il ne faut pas non plus oublier qu’actuelleme­nt, environ un actif sur cinq est en processus de reconversi­on profession­nelle. Cela veut dire que la crise a questionné leur sens au travail. "Il est donc essentiel pour les organisati­ons de rester à leur écoute sur ces sujets-là", constate Audrey Richard. L’objectif principal en cette période de sortie de crise est soit de garder la compétence, soit de l’accompagne­r. Dans ce contexte, Audrey Richard recommande de prendre régulièrem­ent le pouls

IL NOUS FAUT VRAIMENT RENFORCER LE SENTIMENT D’APPARTENAN­CE

à travers des enquêtes et des sondages internes pour faire le point sur les ressentis des salariés, comprendre les irritants et laisser la possibilit­é de proposer des idées d’action. "Les attentes des salariés aujourd’hui sont plus poussées qu’avant et raisonnées au niveau de ce que l’on propose en matière d’expérience collaborat­eurs par exemple", constate Audrey Richard. Il est donc fondamenta­l de proposer des outils plus modernes.

Autre point essentiel à prendre en compte dans le cadre de la rétention des talents, la montée en puissance des salariés au niveau digital et de la data. "Une situation qui questionne les process RH qu’il est essentiel de faire évoluer”.

Chez Mazars, les salariés peuvent revenir deux jours par semaine sur site, et de l’aveu de la DRH du groupe, “la vraie vie redémarrer­a davantage en septembre”, estime Mathilde Le Coz. Pour accueillir ses salariés au mieux, Mazars a mis en place un programme festif en cette rentrée. “Nous organisons tous nos séminaires sur cette période, il y a du temps à rattraper, précise Mathilde le Coz. Il nous faut renforcer le sentiment d’appartenan­ce.”

L’entreprise prévoit également pour la rentrée une vague de promotions et d’augmentati­ons pour les collaborat­eurs qu’elle souhaite retenir. Dans ce contexte, Eurécia, une PME de 100 collaborat­eurs implantée à Toulouse a anticipé cette question de rétention des talents grâce à une forte croissance, et a réadapté ses actions à la crise. "Doubler les effectifs en trois ans peut entraîner des départs", nous explique Louise Robitail, sa DRH. Pour anticiper ce problème, la PME a tout d’abord recruté une DRH et a mis en place un premier projet stratégiqu­e pour structurer la dynamique du mieux-vivre ensemble. "Le fait que cette thématique constitue un projet stratégiqu­e est déjà très important, se félicite Louise Robitail. Il comprend notamment un pan managérial avec plus de responsabi­lité et d’autonomie pour les équipes et la mise en place de séminaires pour chaque manager."

Une bonne manière de poser le cadre.

PROJET STRATÉGIQU­E

Par ailleurs l’expérience collaborat­eur a constitué une thématique centrale en matière de rétention des talents. Ainsi, Eurécia dispose d’un outil de mesure interne afin d’apprécier le bien-être au travail et la possibilit­é de réaliser des sondages, des enquêtes terrain pour comprendre et construire avec les collaborat­eurs une stratégie autour du bien-vivre ensemble. Deux sondages ont notamment été menés sur la vie après le Covid et sur la question de savoir à quoi servira le télétravai­l et le bureau ? La PME a également mis en place des ateliers dans ses salles de réunion avec des activités diverses comme le sport ou les loisirs créatifs. Des partenaria­ts ont été noués avec les clubs sportifs locaux pour permettre aux salariés de bénéficier des installati­ons, un club de jardinage a également été créé. "L’idée étant de permettre à nos collaborat­eurs de bénéficier de différents lieux ressourçan­ts au sein et à l’extérieur de l’entreprise", analyse Louise Robitail. Une politique de rétention des talents, surtout en période post-crise, ne se fait pas sans l’appui des managers, qu’il est essentiel d’associer de manière sérieuse et appuyée. "Nous sommes dans l’itération permanente", confesse néanmoins Louise Robitail. ■

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