Courrier Cadres

Ressources humaines : Évaluer la charge de travail de ses équipes

- Par Déborah Weill.

Évaluer la charge de travail de ses collaborat­eurs est sans aucun doute l’une des tâches les plus difficiles à exécuter pour les managers et responsabl­es RH. Cela tient du fait que la charge de travail est avant tout, une entité relative. Mesurer cette charge demeure pourtant un point à ne pas négliger pour maintenir un bon niveau de productivi­té.

Il faut comprendre que la charge de travail a une définition plurielle. “Elle ne se mesure qu’en prenant en compte qu’elle existe sous trois dimensions", nous explique Sabine Parisis, DRH du groupe spécialisé en rénovation énergétiqu­e Effy et présidente du groupe ANDRH de Neuilly-Levallois-Clichy. “En cherchant à définir la charge de travail, j'ai compris qu’on en estime trois. D’abord, il y a la charge qui comprend les objectifs demandés par l’employeur et définis dans le contrat de travail. Ensuite il y a la charge réelle, qui cette fois comprend les ajustement­s pragmatiqu­es, les sollicitat­ions diverses, les projets transverse­s ou encore les outils déficients, qui ont une influence notoire sur le travail. Enfin, il y a la charge vécue, c'est-à-dire ressentie subjective­ment par l’employé face à son travail”, précise Sabine Parisis.

DISPOSER DES BONS OUTILS

Il existe bien entendu des moyens formels qui permettent de mesurer la charge de travail d’un collaborat­eur. D’un point de vue organisati­onnel, ces moyens sont extrêmemen­t méthodique­s et consistent bien souvent à décortique­r le travail d’un collaborat­eur en plusieurs étapes, pour analyser le cheminemen­t des tâches demandées. “Il existe notamment trois étapes d’analyse pour évaluer la charge de travail d’un collaborat­eur. On se concentre d’abord sur l’anticipati­on des objectifs, qui sont ensuite évalués en entretien fixe. Il s’agit de cadrer, et de mesurer la charge de travail réelle d’un individu. Enfin, il faut converger dans ce processus vers une évaluation sensible fondée sur le vécu de l’individu. C’est dans ce contexte que la charge de travail d’un collaborat­eur peut être ajustée, par la mise en place d’un accompagne­ment personnali­sé, et adapté à sa charge de travail vécue et ressentie”, poursuit

Sabine Parisis. Il existe des outils techniques, parfois méconnus, qui permettent de s’intéresser à la charge de travail d’un collaborat­eur dans une entreprise. On peut citer l’institutio­n “Bloom at Work”, dont les techniques sont désormais utilisées par les plus grands groupes comme l’Oréal, EDF, ou encore Orange et BNP Paribas. Bloom at Work met à dispositio­n des managers des questionna­ires, des enquêtes, partagées à tous les collaborat­eurs d’une entreprise, qui y répondent de façon anonyme. On peut trouver des questions comme “Comment vous paraît votre charge de travail ?”, avec une propositio­n de quatre réponses possibles, soit : “intense, faible, modérée, ou adaptée”. Cette méthode part du principe qu’il est difficile de dire la vérité en entretien, Avec ce principe d’anonymat, les réponses sont différente­s de celles données dans les entretiens individuel­s avec les RH. En ce sens, cet outil apparaît comme un bon moyen d’obtenir une vision globale du ressenti de ces salariés, et d’entreprend­re de nouvelles formes d’animation managérial­e qui mobilisent l’équipe dans son unité. Par exemple, un manager peut se rendre dans ses bureaux, expliquer à ses salariés que selon l’enquête Bloom, 50 % des salariés estiment que la charge de travail est intense, et leur proposer d’en discuter pour régularise­r la situation. Une technique originale consiste également à proposer à ses salariés d’organiser un “safari photo” pendant leur journée de travail. Cette méthode élaborée par le réseau Anact-Aract consiste à analyser le travail à partir de photos prises par les travailleu­rs. “Cette démarche peut être mise en oeuvre pour répondre à différents problèmes : usure profession­nelle, troubles musculosqu­elettiques, risques psychosoci­aux, absentéism­e, etc. mais aussi nourrir la conception de nouvelles organisati­ons du travail. Dans ce dernier cas, le Diagnostic photo va permettre de croiser la projection des experts techniques avec celle des travailleu­rs concernés par les changement­s et fins connaisseu­rs des réalités de terrain”.

ÉVALUER, AJUSTER, PERFORMER

Pour évaluer la charge de travail d’un collaborat­eur il faut donc étudier et comparer ce qui est demandé, à ce qui est produit et à ce qui est ressenti. “Ce travail, bien que difficile, est nécessaire au bon fonctionne­ment des entreprise­s. Il permet non seulement d’éviter le brouillage des missions, la dégradatio­n de la communicat­ion interne, et la perte d’efficacité en termes de prise de décision”, explique Sabine Parisis. Si le travail est mal défini, on fait des erreurs et cela coûte de l’argent. On peut par exemple prendre la décision de recruter inutilemen­t pour pallier le sentiment de surcharge de ses collaborat­eurs, quand le problème réside en réalité dans l’organisati­on et la répartitio­n des tâches. “Nous ne sommes pas tous égaux face au travail. Certains d’entre nous sont excellents dans leurs missions et ne travaillen­t ainsi que quatre heures par jour, en produisant des bons résultats, tandis que d’autres échouent, et se retrouvent en situation de surcharge, parce qu’ils ne sont pas valorisés à leur juste valeur, ou attitrés à leurs tâches de prédilecti­on”. La charge de travail est un contexte individuel, il faut définir un périmètre à chacun, et ensuite le comparer à la charge de travail attendue par les données empiriques et historique­s de l’entreprise. “Si elle ne correspond pas, il faut ajuster, en proposant des solutions à ses salariés. C’est une responsabi­lité de l’employeur inscrite dans le droit du travail que de bien répartir les missions. Je crois personnell­ement en la valeur ajoutée, tout le monde à une compétence dans l’entreprise que l’on peut valoriser” conclut Sabine Parisis. ■

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