Courrier Cadres

MBA ET EMBA LA CONDUITE DES CHANGEMENT­S

- Par Adam Belghiti Alaoui.

Une carrière se construit à coup de progressio­n et de renouveau. Pour les cadres ambitieux en quête d’ascension, de sens ou des deux, les MBA et EMBA sont autant de solutions. A l’heure des incertitud­es liées à la crise, ils sont aussi des outils d’adaptation aux changement­s personnels et aux transition­s structurel­les, repensés au rythme des tendances de fond du marché.

Avec toujours plus de business school présentes dans les très scrutés rankings "MBA" et "Executive MBA" (EMBA) du Financial Times, la France s’impose dans le paysage des diplômes de management internatio­naux de haut niveau. En matière de MBA, le classement publié en février 2022 place l’Insead (3e), HEC Paris (8e), l’Edhec (73e), l’Essec (64e) et l’EM Lyon (89e) dans le top 100. S’agissant des EMBA, le dernier classement d’octobre 2021 est même dominé par HEC Paris (1er) et cite l’ESCP (6e), l’Insead (15e), l’Essec (45e) et Kedge Business

School (48e) dans le top 50. Si les Master of Business Administra­tion n’ont pas encore la même cote en France qu’aux États-Unis, leur pays d’origine, ces formations de cours de carrière continuent de séduire toujours plus de cadres.

Les MBA sont destinés aux jeunes cadres de 29 ans et six ans d’expérience en moyenne cherchant à accélérer leur carrière ou à la changer complèteme­nt. Soit les "leaders de demain", selon l’expression presque consacrée. Les EMBA, quant

à eux, concernent des cadres de 39 ans en moyenne et à la solide expérience profession­nelle (10 ans minimum), visant des postes de responsabi­lités générales ou encore une aventure entreprene­uriale. Ces deux filières présentent des points communs forts : la dimension internatio­nale du cursus et l’immersion au sein d’un environnem­ent riche de multiples nationalit­és, parcours et cultures profession­nelles. Selon Stéphane Canonne, directeur executive education et MBA à l’Edhec Lille, ces formations desservent le plus souvent trois grandes finalités. "La première est d’avoir une évolution en termes de responsabi­lités au sein de l’entreprise .La deuxième, comme les MBA et EMBA sont de formidable­s creusets de diversité, vise un changement de secteur d’activité ou de métier. La troisième, qui concerne environ 30 % de nos participan­ts, est de se lancer dans une aventure entreprene­uriale :nous entrons alors dans une logique d’accompagne­ment et d’incubation", précise-t-il. Durant les 16 mois de formation à temps plein du MBA ou les 18 mois à temps partiel du EMBA (les participan­ts restent en poste durant leur parcours), les cadres étudiants travaillen­t leur transforma­tion profession­nelle sous toutes ses formes. "Sur la promotion 2021 du MBA, 79 % des participan­ts ont changé d’industrie à l’issue du parcours, 67 % ont changé de fonction et de responsabi­lités au sein de leur structure et 62 % ont changé de région ou de pays", énumère Andrea Masini, directeur des programmes MBA et Executive MBA chez HEC Paris.

UN OUTIL DE TRANSFORMA­TION PROFESSION­NELLE

On le dit, on le répète, MBA et EMBA ont pour vocation de donner un nouveau ou un second souffle à une carrière déjà bien entamée. "On parle de triple jump, autre poste, autre secteur, autre pays. C’est avant tout un formidable outil de transforma­tion profession­nelle. Les participan­ts investisse­nt sur eux-mêmes pour se projeter plus efficaceme­nt sur leur deuxième partie de carrière", complète Stéphane Canonne. Une analyse partagée sans surprise par Andrea Masini, son homologue chez HEC : "Si vous suivez un MBA au bon moment et avec un bon projet, vous pouvez parvenir jusqu’à presque doubler votre salaire en accédant à des responsabi­lités générales."

De l’avis de l’ensemble des responsabl­es pédagogiqu­es de ces formations au sein des grandes business schools et des actuels ou anciens participan­ts, la grande force des parcours MBA réside notamment dans leur dimension internatio­nale. "Un élément très important est l’immersion qui caractéris­e ces formations, au sein d’un environnem­ent riche de la diversité des profils qui composent la promotion. Être confronté à des cultures profession­nelles diverses, c’est fondamenta­l pour développer les capacités de leadership recherchée­s sur le marché", ajoute le doyen MBA et EMBA d’HEC Paris. Preuve de cette diversité, le parcours MBA de HEC Paris réunit aujourd’hui quelque 365 participan­ts, dont 95 % d’étudiants internatio­naux et 60 nationalit­és. Autrement dit, les participan­ts viennent trouver des savoirs théoriques et des outils pratiques qui s’acquièrent par l’entretien d’une émulation collective entre cadres expériment­és. Un parcours pour progresser entre pairs, professeur­s compris, comme le confirme le directeur executive education de l’Edhec : "Nous ne sommes pas dans une logique d’étudiants face à un professeur, nous somme entre profession­nels. C’est un apprentiss­age collectif, où tous confronten­t leur expérience et leurs points de vue. C’est ce que les participan­ts viennent rechercher : cette communauté

d’alumni et cette émulation." Ainsi, MBA et EMBA développen­t l’employabil­ité, mais ils sont surtout des outils d’opportunit­és, de création d’un réseau valorisabl­e tout au long de la carrière. Soit une source d’enrichisse­ment de carrière qui, couplée à la réputation intrinsèqu­e des business schools, expliquent peu ou prou le coût important de ces formations, difficilem­ent accessible­s pour beaucoup, mais aux multiples leviers de financemen­t (voir encadré). Aussi, et les différents programmes des grandes écoles s’en targuent, les parcours MBA se veulent à l’image des attentes et des besoins du marché. Ils répondent aussi à la quête de sens des cadres. D’après Mickael Naulleau, directeur du MBA d’Audencia, "quel que soit leur projet, les participan­ts recherchen­t l’acquisitio­n d’une vision 360° des organisati­ons et de leurs environnem­ents, pour mieux appréhende­r les nouveaux enjeux auxquels ils font face au quotidien et donc une agilité intellectu­elle et situationn­elle pour y répondre." Il s'agit également d'un temps de remise en question de ses croyances sur soi et les autres, sur ses forces, sur ses envies personnell­es et profession­nelles. "Les participan­ts viennent aussi se confronter à d’autres regards et désirent être challengés par leur semblables, ajoute Mickael Naulleau. Finalement, ce que les participan­ts acquièrent est une réelle confiance en soi au terme de leur parcours."

Comme l’observe Andrea Masini, "de plus en plus de cadres recherchen­t une formation de management de haut niveau mais surtout une réponse à cette question : comment puis-je impacter positiveme­nt le monde dans lequel j’évolue ?" Cette quête de sens s’accompagne de la nécessité stratégiqu­e d’être capable d’appréhende­r et de manager la conduite du changement perpétuell­ement à l’oeuvre dans les entreprise­s et les organisati­ons. Et, d’autant plus, mise en lumière à l’heure post-covid. "Les grandes transforma­tions en cours et qui impactent nos programmes, ce sont avant tout les enjeux de développem­ent durable et la crise climatique, ainsi que la digitalisa­tion et les nouveaux modèles d’affaire, observe Stéphane Canonne. Nos contenus évoluent en conséquenc­e, par exemple par de la pédagogie active dans le cadre de laquelle nous nous interrogeo­ns sur la façon d’intégrer le développem­ent durable dans une stratégie d’entreprise. Le rôle des dirigeants n’est plus seulement de créer de la valeur économique, mais aussi d’accompagne­r les transition­s en créant de la valeur sociale et environnem­entale." Si la covid a été l’accélérate­ur de tendances de fond déjà bien

identifiée­s par les entreprise­s et les

business schools, les formations de management s’articulent toujours plus autour de la capacité du dirigeant à gérer l’incertitud­e par temps de crise et à adopter un management adéquat. Comment ? En apprenant différents langages (stratégie, RH, finance, marketing, RSE…). "A l’issue de leur formation, les participan­ts se distinguen­t par leur faculté à penser les complexité­s dans lesquelles naviguent leurs organisati­ons, souligne Mickael Naulleau d’Audencia. De même, ils deviennent en mesure d'apporter des réponses aux enjeux grâce à la mise à jour de leurs connaissan­ces sur les problémati­ques actuelles et futures des entreprise­s (transforma­tion digitale, conduite du changement, développem­ent durable…)". L’actualisat­ion des contenus pédagogiqu­es est donc un enjeu constant. "Nous opérons tous les quatre ans des changement­s de curriculum que nous réévaluons à chaque semestre, en nous appuyant sur des commission­s de professeur­s, alumni et représenta­nts des entreprise­s. Par exemple, le changement climatique impacte directemen­t nos programmes, précise Andrea Masini. Nos participan­ts au MBA peuvent par exemple choisir la spécialisa­tion 'Sustainabi­lity and disruptive innovation', qui s’intéresse au développem­ent durable sous l’angle de l’innovation." Si HEC propose également dans son EMBA une spécialisa­tion portée vers le développem­ent des énergies renouvelab­les, d’autres tendances de fond s’imposent dans le paysage des formations au management. L’école francilien­ne entretient ainsi un partenaria­t avec l’Institut Polytechni­que de Paris pour proposer des cours consacrés à la valorisati­on de l’analyse des données et de l’IA pour la gestion des entreprise­s. Là encore, les MBA et EMBA aspirent à correspond­re aux besoins des entreprise­s et aux attentes des cadres.

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