Le stade Bollaert, une structure architecturale rassembleuse depuis bientôt un siècle
Symbole de l’histoire minière de la commune de Lens et du RCL (Racing club de Lens), le stade Bollaert-Delelis vient il y a quelques mois de fêter ses 90 ans. Il est en lice pour devenir Monument préféré des Français !
Inauguré en 1933, la « placeforte » de l’équipe et des supporters des « Sang et Or » a bien changé, pour accueillir de nombreuses rencontres et compétitions internationales.
Histoire populaire et patrimoniale
Ce stade possède une histoire à la fois populaire et patrimoniale exceptionnelle, tant il fédère des publics variés : descendants de mineurs, bien sûr, notamment d’origine polonaise, mais également des salariés des PME, des étudiants, des cadres, des commerçants, des intellectuels ou des fonctionnaires assidus au Louvre-Lens voisin, comme des familles ou des scolaires.
Rares sont les sites patrimoniaux réunissant si souvent tant de personnes (presque 40 000 aux jours d’affluence) de tous les milieux, hommes ou femmes, vieillards, enfants (parfois même très jeunes…) Tout ce monde (une quarantaine de clubs de supporters, y compris « ultras » : 35 000 personnes ?) communie avec ferveur dans une série de rites : drapeaux, tambours, « tifos »...
Tous ou presque arborent les couleurs du club, étendent leur écharpe pour honorer les joueurs, entonnent les hymnes traditionnels (« Chez nous, c’était le corons », ou « La Lensoise », version ch’ti de « la Marseillaise »… ), rugissent en choeur les slogans du RCL « On est là, les gars »…Ceux qui se proclament « Fiers d’être Lensois » parfois descendent de bus venant d’Arras, de Béthune, de Maubeuge, ou de Saint-Quentin… Et ce dans une ambiance passablement bon enfant (malgré les pintes de bière) qui tranche avec celle parfois d’autres stades, d’autres villes, d’autres clubs…
Améliorations et déménagements
Ce stade, célèbre régionalement et nationalement, a accompagné la genèse et le développement du football en France, en même temps que la notoriété durable d’une équipe, reflet d’une culture. D’abord et longtemps nommé le « Stade des Mines », il trouve son origine dès 1906 (date facile à retenir : elle surmonte le logo même du RCL) à l’emplacement de la Place de la République (jadis « Place Verte », recouverte de nos jours par un parking).
Les joueurs durent changer plusieurs fois de lieu d’entrainement et de match jusqu’à ce que la Compagnie (privée) des mines de Lens leur propose un terrain proche de la Cité St Théodore (l’ex-fosse n° 9 où se trouve depuis 2012 le Musée du Louvre-Lens).
Les terrassements furent effectués par des centaines de mineurs et de chômeurs sous la direction de deux ingénieurs-architectes (Hanicotte et Spriet.)
Ce stade, ovale à l’époque et comportant deux tribunes assez exiguës, fut inauguré en juin 1933 ; il prit le nom de
Félix Bollaert en 1936 après la mort de celui qui, patron de la Compagnie de mines de Lens, fut l’instigateur de cette installation sportive.
Cette époque précédant et suivant le Front populaire vit de nombreuses municipalités (souvent de gauche) encourager les sports collectifs, les pratiques dites « hygiénistes », financer des équipements novateurs permettant la professionnalisation progressive de ce milieu, créateur d’emplois : Piscine de Roubaix, StadeParc de Bruay, Vélodrome de Roubaix, Stade de Reims (où se révéla Raymond Kopa, natif de Noeux-les-Mines, Ballon d’Or 1958), etc.
4 tribunes de légende
De nombreuses métamorphoses architecturales ont conduit à l’aspect actuel de ce stade : grandiose oiseau de métal (longues « fermes » en alliages et polycarbonate) et de béton blanc où des goélands viennent à certaines saisons picorer le sol jonché de… frites. Le maire de Lens, André Delelis, avait fait racheter ce site par la ville pour sauver le club lors du désengagement des HBNPC. Les succès sportifs et la chaude ambiance de camaraderie du RCL allaient offrir un regain de lien social et une sorte de compensation symbolique face à la crise économique du Bassin houiller artésien lors des années 1970.
Comme les trois autres tribunes, la Marek constitue la partie basse de la tribune nord, réunissant le « kop » lensois, les supporters les plus « fans », et la Xercès la partie haute. Construite en 1978, la tribune Marek-Xercès a été restructurée en prévision de la coupe d’Europe 1984, puis de la Coupe du Monde 1998, enfin pour l’Euro 2016 par l’agence Cardete & Huet associée à Pierre Ferret (le concepteur de l’architecture dite « patataoïde » du Grand Stade P. Mauroy.) Ces reconstructions ont permis d’améliorer les conditions de jeu et d’accueil du public : éclairage, nouvelle toiture couvrant toutes les places debout sur gradins ou assises, mise en conformité avec les normes de sécurité exigées par l’UEFA etc.
La Tribune Lepagnot, au sud, face à la Marek-Xercès, accueille des supporters nouveaux arrivants, les salons VIP et la tribune de presse. La tribune Trannin est l’une des deux tribunes placées derrière un but, attribuée plutôt aux familles et aux supporters « visiteurs ».
La Tribune Delacourt, à l’est, face à la précédente, est un « virage populaire »
où les supporters restent plutôt debout pour permettre les gestes de leurs « chorégraphies démonstratives »
! Ainsi, le stade a-t-il pris sa configuration de stade rectangulaire avec angles morts dit « à l’anglaise » avec une excellente visibilité, tout en permettant aux spectateurs les plus « mordus » de se tenir au plus près de la pelouse et de mieux supporter « leur » équipe.