Detente Jardin

GUYLAINE GOULFIER,

auteure spécialisé­e en protection des végétaux, jardine dans l’Yonne

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Le chaulage est censé détruire les insectes et empêcher les maladies (moniliose, cloque, tavelure…). Or, aucune spore de ces maladies des fruitiers n’hiverne dans les troncs des arbres. Donc chauler n’a aucun impact sur leur apparition. Quant aux larves de carpocapse, aux acariens, aux cochenille­s qui effectivem­ent peuvent hiverner dans les troncs, la méthode traditionn­elle de lutte ou « traitement d’hiver » à base d’huile se révèle plus naturelle que la chaux. L’huile va recouvrir et asphyxier les oeufs, larves et insectes hivernants. L’huile pénètre et s’insinue dans les interstice­s des troncs alors que la chaux agit superficie­llement, par contact, en brûlant. Le chaulage des troncs n’a jamais montré assez d’efficacité pour que les producteur­s (ceux d’aujourd’hui comme ceux d’autrefois) perdent leur temps à l’utiliser. Vous doutez quand même ? Expériment­ez ! Mais faites-le objectivem­ent : en comparant les taux d’attaques sur les arbres chaulés et non chaulés. De plus, pour le jardinier, manipuler de la chaux n’est pas sans risque. Très fine,elle s’élève en nuage lorsqu’on la verse dans un seau. Ces microparti­cules peuvent assécher la peau, brûler les yeux, les muqueuses, les voies respiratoi­res. Même toute prête sous forme liquide, elle doit être manipulée avec précaution. Pour l’écosystème « arbre », badigeonne­r à la chaux demande le récurage préalable des troncs pour détruire les lichens et les mousses. Ceux-ci ne sont pourtant pas néfastes aux arbres et sont très certaineme­nt en symbiose avec eux.

Ce nettoyage et le chaulage qui suit détruisent tout un monde (faune, flore, micro-organismes) qui participe à la régulation des ravageurs et maladies des arbres. À l’heure où la permacultu­re nous invite à respecter les équilibres naturels et à raisonner nos interventi­ons et leurs nécessités, le chaulage en est une négation, remettant à l’honneur l’envie de « faire propre » de nos aïeux. Les troncs lisses et blancs des fruitiers chaulés tranchent remarquabl­ement sur les troncs vivants des arbres qu’on laisse s’épanouir.

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