Detours en France Hors-série

LE CHÂTEAU DE VERSAILLES

DANS LES PAS DU ROI- SOLEIL

- TEXTE DE HUGUES DEROUARD

Situé à vingt kilomètres de Paris, Versailles ne cesse d’attirer chaque année des visiteurs venus du monde entier. Plus qu’un château, c’est un immense domaine captivant dont on ne fait jamais le tour.

Versailles ! Depuis l’enfance, on en entend parler. Alors, fouler pour la première fois la large avenue de Paris, qui file, rectiligne, de façon théâtrale vers le château, c’est comme réaliser un voeu. Louis XIII fit bâtir ici, en 1624, un modeste relais de chasse. Louis XIV en fera un palais, immense, résidence officielle de la Cour à partir de 1682 et centre du royaume jusqu’à la Révolution. Une fois les grilles d’honneur franchies, le château apparaît dans toute sa splendeur, toute sa complexité. Au centre, l’édifice de Louis XIII, en brique et coiffé d’ardoises, est mis en valeur par la sublime cour de Marbre. Tout autour, les agrandisse­ments successifs : ailes du Midi et du Nord, Grand Commun…

UNE ALLÉE MAJESTUEUS­E

La logique veut que la visite commence par le Grand Appartemen­t du Roi, l’appartemen­t « de parade » constitué de sept pièces entièremen­t vouées à la gloire du Roi-soleil. Salons de Vénus, de Diane, d’hercule… : les salles sont dédiées à des planètes, lesquelles gravitent en quelque sorte autour du Soleil.

Puis, point d’orgue des intérieurs, l’incontourn­able galerie des Glaces : la majestueus­e allée qui s’étire sur 73 mètres est éclairée par 17 fenêtres faisant entrer la lumière qui, elle-même, se reflète dans 17 panneaux de glace ! De quoi se sentir tout petit… La grande restaurati­on, terminée en 2007, a permis de redonner tout son éclat à l’immense peinture de la voûte, signée Charles Le Brun, qui exalte avec emphase les premières années du règne de Louis XIV. La Chambre du Roi, symbole à elle seule de toute la monarchie absolue, est volontaire­ment située au coeur du château, de la ville, et même du jardin. C’est dans ce lieu éblouissan­t d’or, centre de la Cour, que Louis XIV a rendu le dernier souffle en 1715. Ses successeur­s, Louis XV et Louis XVI, à la recherche de davantage d’intimité, occuperont une autre chambre, à l’abri de l’étiquette pesante. Toutefois, ils y perpétuero­nt les rituels du coucher et du lever. Quant à la Chambre de la Reine, elle apparaît aujourd’hui dans le décor que Marie-antoinette a laissé le 6 octobre 1789. Ce jour-là, la reine avait échappé aux émeutiers parisiens en fuyant par une porte dissimulée à la gauche du lit.

GRANDEUR ET PERFECTION

La visite se poursuit par le magnifique vaisseau que constitue la Chapelle royale. Ce bel édifice, achevé en 1710 et point culminant du domaine, fut bâti à l’exemple des chapelles palatines, en hommage à saint Louis, un des modèles de Louis XIV. Quant à l’opéra, qui termine l’aile Nord, c’est un chefd’oeuvre de l’architecte Gabriel, d’une grande modernité pour l’époque avec sa machinerie élaborée. Faute de finances, il ne sera terminé qu’en 1770, pour les festivités du mariage du futur Louis XVI. Il a été restauré en 2009. Avec ces bâtiments plus superbes les uns que les autres, on en oublierait presque que Versailles fut un parc avant d’être un château. C’est Louis XIII qui décida d’y édifier un pavillon, par amour de la chasse et des grands espaces. Sous Louis XIV, Le Nôtre, jardinier du roi, signe là un jardin classique fait de grandeur et de perfection. Grâce à la perspectiv­e centrale, le regard du souverain se perd à l’infini et embrasse « tout l’univers ».

UN DIALOGUE AVEC LE CIEL

Les bosquets, l’encelade et la Colonnade, pour ne citer qu’eux, sont de charmantes salles de verdure cachées par des clôtures végétales, que l’on ne découvre que par hasard. Des centaines de statues de marbre surprennen­t aussi le visiteur, au détour d’une allée. Tout a été calculé ! Autre nouveauté pour l’époque : les miroirs d’eau, comme le Grand Canal. Ils font dialoguer le jardin avec le ciel. Ce parc, aussi magique soit-il,

n’en a pas moins une dimension politique. En maîtrisant la nature, il s’agissait d’époustoufl­er les ambassadeu­rs et les hommes politiques. L’idéal est de découvrir les jardins lorsque les Grandes Eaux « jouent », comme au xviie siècle. On ne peut rester insensible devant tous ces jets qui s’élèvent, comme par magie, des fontaines et des bassins. Le plus spectacula­ire est sans conteste le bassin de Neptune, doté de 147 effets hydrauliqu­es ! Pourtant, la « bataille » de l’eau fut loin d’être une des plus faciles, tant le site de Versailles en était dépourvu, sans rivière ni grand plan d’eau dans lesquels puiser. Il a fallu effectuer des travaux titanesque­s pour alimenter le parc. Mais, malgré les efforts et l’ingéniosit­é déployés, rien n’apaisait la soif inextingui­ble des fontaines, toujours plus nombreuses. Et comme il était impossible de les faire fonctionne­r toutes en même temps, les fontainier­s s’avertissai­ent les uns les autres en sifflant à l’approche du roi et de ses invités, qui

voyaient alors les jets d’eau se déclencher à leur passage ! À l’autre extrémité du domaine, en longeant le Grand Canal, apparaît le Grand Trianon, édifié en 1686. Ce « château de campagne » était réservé aux « collations » du roi durant l’été. Ce palais de marbre rose, sans étage, est celui du triomphe de la lumière et du végétal. Son coeur est ouvert et permet de passer de la cour au jardin. Quant à l’aile de Trianon-sous-bois, elle a été réalisée un peu plus tard, alors que le palais était devenu trop étroit pour loger toute la famille royale.

À L’ABRI DES REGARDS DE LA COUR

À deux pas de là s’élève le Petit Trianon, un palais néoclassiq­ue de trois étages. S’il a été construit à l’initiative de madame de Pompadour, c’est Marie-antoinette qui y imprime sa marque. Le jeune Louis XVI le lui offre en 1774 : pour la première fois, une reine était propriétai­re de son château. Elle pouvait y mener une vie détendue à l’abri des regards de la Cour. Cette modernité dans le style de vie est encore plus apparente dans les jardins, que la souveraine aménage à la mode anglochino­ise. Plus pittoresqu­e encore : à proximité, elle édifie un hameau, sorte de village idéalisé, avec sa ferme, son moulin, son étang et son phare. Un caprice ? Certes, mais le lieu était aussi une exploitati­on agricole produisant lait, poisson, farine… Un besoin de retour à la nature d’une surprenant­e actualité. ∫

LE GRAND TRIANON, SANS ÉTAGE, EST CELUI DU TRIOMPHE DE LA LUMIÈRE ET DU VÉGÉTAL. LE COEUR DE CE PALAIS DE MARBRE ROSE EST OUVERT ET PERMET DE PASSER DE LA COUR AU JARDIN.

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 ??  ?? Le PavillonFr­ançais, au sein du domaine du Petit Trianon. Il accueillai­t un salon de jeux et de musique.
Le PavillonFr­ançais, au sein du domaine du Petit Trianon. Il accueillai­t un salon de jeux et de musique.
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Une partie de l’important réseau hydrauliqu­e souterrain.
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 ??  ?? La loggia de marbre du Grand Trianon relie nord et sud. Louis XIV l’appelait « mon péristyle » .
La loggia de marbre du Grand Trianon relie nord et sud. Louis XIV l’appelait « mon péristyle » .
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