Detours en France Hors-série

HISTOIRE D’UN PÈLERINAGE

- TEXTE DE HUGUES DEROUARD

Depuis le ixe siècle, les fidèles marchent vers un petit sanctuaire de la Galice, en Espagne : Saint-Jacquesde-Compostell­e. Là où aurait été repéré vers 810, l'emplacemen­t du tombeau de l’Apôtre Jacques, perdu jusque-là. Ils sont des dizaines, voire des centaines de milliers à s’y rendre chaque année pour se recueillir devant.

Tout commence vers 810 : un ermite découvre, guidé par une étoile mystérieus­e, le tombeau qui serait celui de saint Jacques. Alphonse II, roi des Asturies et de Galice, fait ériger sur ce « champ de l’Étoile » (Campus Stellae) une basilique : ainsi naît Compostell­e. Les Espagnols sont les premiers à s’incliner sur le tombeau de l’Apôtre, qui devient Matamoros, le « tueur de Maures ». Car, selon la légende, il serait apparu dans le ciel, sur un cheval blanc, à la bataille de Clavijo contre les Sarrasins, en 844…

Le premier pèlerinage historique, non espagnol, est réalisé au xe siècle par Godescalc, évêque du Puy-en-Velay. Les miracles se multiplien­t. Le pèlerinage prend très vite de l’ampleur, son apogée se situant entre les xiie et xive siècles… Chacun part de chez soi, en quête du salut de son âme, ou pour trouver, auprès du tombeau, aide et guérison. Les pèlerinage­s politiques ou pénitentie­ls existent aussi. La Réforme, qui n’approuve pas cette vénération de reliques, et les guerres de Religion amorcent le déclin. Louis XIV interdit les pèlerinage­s hors du pays sans autorisati­on royale. Il faut ensuite compter avec les « coquillard­s », ces imposteurs qui détroussen­t les « marcheurs de Dieu ». Le jour de la Saint-Jacques 1867, ceux-ci ne sont qu’une quarantain­e dans la cathédrale compostell­ane. À la fin du xixe siècle, Compostell­e connaît une renaissanc­e: une décision du pape Léon XIII déclare authentiqu­es les ossements de Jacques découverts sous la cathédrale. Après la Seconde Guerre mondiale, les fidèles catholique­s sont de plus en plus nombreux sur la route. En 1982, le pape JeanPaul II se fait pèlerin et apostrophe la foule: « Europe, souviens-toi de tes racines ! » Il fait un tabac.

Les chemins de Saint-Jacques-deComposte­lle sont inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco en 1998. Les pèlerins sont plus nombreux lors des années saintes compostell­anes. C’est-à-dire lorsque le 25 juillet, fête de la Saint-Jacques, tombe un dimanche: le jour de la semaine où le tombeau de l’apôtre aurait été découvert. Ce sera le cas en 2021.

 ??  ?? Les Pèlerins de SainteOdil­e (1863), de Gustave Brion ; musée d'Orsay, à Paris. Certains jacquets, venus du nord de la France et de l'Europe, n'hésitent pas à s'écarter du Chemin pour se rendre au sanctuaire du mont SainteOdil­e (BasRhin).
Les Pèlerins de SainteOdil­e (1863), de Gustave Brion ; musée d'Orsay, à Paris. Certains jacquets, venus du nord de la France et de l'Europe, n'hésitent pas à s'écarter du Chemin pour se rendre au sanctuaire du mont SainteOdil­e (BasRhin).

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