RODEZ
UN COLOSSE DE GRÈS ROSE
La construction de la monumentale cathédrale aveyronnaise, entamée en 1277, s’échelonna sur trois siècles. Malgré la longueur du chantier, NotreDame de Rodez demeure d’une belle harmonie grâce à l’utilisation constante du grès rose. Son aspect sévère de forteresse est atténué par une extraordinaire tour-clocher, dentelle de pierre finement sculptée.
Lorsque l’on arrive à Rodez, impossible de ne pas avoir en ligne de mire la silhouette massive de la cathédrale. Phare du paysage ruthénien, Notre-Dame est l’une des plus imposantes cathédrales du sud de la France. Elle est bâtie à partir de 1277, sur les ruines d’une église romane qui s’était effondrée sur des plans attribués à l’architecte gothique Jean Deschamps. Sa construction s’échelonne jusqu’au… xvie siècle. Malgré la durée du chantier, ce vaisseau de pierre, long de plus de 100 mètres, est d’une grande harmonie. « L’édifice offre une homogénéité visuelle importante, conférée par le matériau employé: le grès rose, précise le service Pays d’Art et d’Histoire du Grand Rodez. Mais surtout par une maîtrise d’ouvrage continue assurée par le chapitre cathédral, qui a fait perdurer le plan et le dessin de l’ensemble sans obérer les évolutions stylistiques propres à chaque époque. »
UN CLOCHER D’EXCEPTION
Après un arrêt dû aux conflits de la guerre de Cent Ans, la construction de la cathédrale reprend de plus belle au milieu du xve siècle. Le chantier est d’une ampleur considérable: « Le palais épiscopal et l’ancien rempart doivent être détruits pour faire place à la nouvelle nef, à partir de 1474, poursuivent les spécialistes du Pays d’Art et d’Histoire. L’extrémité ouest de la cathédrale, construite hors de l’enceinte de ville, se voit donc octroyer une allure massive. » Une fois que l'on arrive sur la place d’Armes, Notre-Dame surprend en effet par son austère façade principale, encadrée par deux tours carrées. Percements réduits, absence de portail, canonnières… Son aspect de forteresse – seulement atténué par son sommet, une étonnante miniature de façade à la romaine, plus tardive – rappelle que la cathédrale, adossée aux remparts, participait à la défense de la ville. La sévérité de l'édifice est toutefois adoucie par les sculptures des façades des transepts nord et sud qui sont, elles, ouvertes et plus délicates, avec le recours au calcaire, dont la blancheur contraste superbement avec le grès. Mais surtout la
PERCEMENTS RÉDUITS, ABSENCE DE PORTAIL, MEURTRIÈRES, CANONNIÈRES… SON ASPECT DE FORTERESSE RAPPELLE QUE LA CATHÉDRALE, ADOSSÉE AUX REMPARTS, PARTICIPAIT À LA DÉFENSE DE LA VILLE.
cathédrale impressionne par son haut clocher légèrement excentré. Il est élevé au début du xvie siècle, alors que Rodez, sous l’impulsion des évêques François d’Estaing et Georges d’Armagnac, connaît une grande prospérité. Chef-d’oeuvre du gothique flamboyant, la tour plate et carrée est signée de l’architecte Antoine Salvanh. Haute de 87 mètres, cette dentelle de pierre est de plus en plus finement ouvragée vers son sommet, couronné d’une statue de la Vierge en équilibre sur un lanternon. L’office de tourisme organise des visites permettant de gravir les 400 marches du clocher, du haut duquel s'offre un panorama incomparable. Cette tour-clocher constitue une première incursion vers la Renaissance: on y admire, au fil de l’ascension, un extravagant décor de statues et de pinacles sculptés. Des motifs antiquisants que l’on découvre aussi à l’intérieur de la cathédrale ou dans la chapelle du Saint-Sépulcre, achevée en 1524, et qui vient tout juste d'être restaurée. Cet ensemble présente une clôture de pierre, ou encore un très beau retable de la Mise au Tombeau, datant du xvie siècle. « Le retable est composé à la manière d’un arc de triomphe et utilise le plus précocement un large répertoire de motifs antiquisants : candélabres, rinceaux, grotesques, êtres hybrides, putti et cornes d’abondance sont employés à profusion, débordent même du retable sur les murs peints de la chapelle », détaille pour finir le Pays d’Art et d’Histoire ruthénois. †