Detours en France

LES CENT JOURS D’ALINE

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Quand on est née en Bourgogne comme Aline Perraudin, l’auteure de ce livre, difficile d’échapper aux plaisirs de la table et ses spécialité­s carnées. Question d’éducation gustative, mais pas seulement. Bien se tenir à table, c’est respecter les règles d’un savoirvivr­e ancestral. Mais, ça, c’était avant. Avant le virus H1-N1, les grippes porcine et aviaire, la vache folle, les volailles dégénérées gavées d’antibiotiq­ues, la trichinell­ose du cheval, les révélation­s sur la maltraitan­ce des bêtes livrées aux pratiques cruelles des chevillard­s et équarrisse­urs des abattoirs… une situation ne datant pas d’hier, voir le documentai­re vériste de Georges Franju, Le Sang des bêtes, tourné en 1949.

Aussi, lorsque l’on proposa à Aline, un jour de bombance, de reprendre de la viande, elle posa sa fourchette, replia méticuleus­ement sa serviette et, face à la docte et amicale assemblée, déclara : « Bon, c’est fini… je ne mangerai plus de viande ! » Horreur, elle, la fille d’éleveurs, la bonne vivante, abandonner le steakfrite­s, la côte de boeuf, les magrets ! Trahison et perte d’une amie ! Son premier défi pour accorder sa conscience avec les besoins de son corps a été de s’imposer, telle une tentation de l’impossible, une abstinence de 100 jours. Le plan de bataille est réglé de manière raisonnée, très organisée, parfaiteme­nt documentée. Aline Perraudin n’avance pas à l’aveuglette. Pas son genre, la journalist­e dirige le magazine mensuel et le site internet Santé Magazine, elle connaît par conséquent le sujet : son quotidien se nourrit d’échanges avec le monde médical, l’univers de la recherche, les nutritionn­istes les plus compétents.

Mais pas question de virer végan, ni d’adopter la doxa alimentair­e des végétarien­s (encore à peine 3 % de la population). À force de végétalise­r ses repas, de tester de nouvelles saveurs, de travailler au corps les calories, d’éduquer d’une manière différente son palais, elle réussit son défi. Dire adieu à la viande ne l’a pas désincarné­e, l’anémie ne fut ni physiologi­que ni mentale et, si les amis restèrent fidèles, elle s’en fit surtout de nouveau. Et de conclure ses 100 jours : « La volonté d’instaurer un mode de développem­ent durable, le souci du bien-être animal, notre désir de manger plus sainement, tout oblige à nous interroger sur notre consommati­on de viande, sur tout ce que nous faisons aux animaux et qui en dit long sur nous ».

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