FRANÇOIS GARCIA
«BORDEAUX NE DOIT PAS DEVENIR UNE VILLE RIPOLINÉE, VIDÉE DE SES ATTACHES POPULAIRES»
On peut être médecin, aimer l’écriture et la tauromachie. Médecin depuis 35 ans, apprenti torero pendant sa jeunesse, François Garcia, issu de la communauté espagnole, qui tient une grande place à Bordeaux, est entré à 54 ans en littérature. Depuis, il ne cesse de raconter Bordeaux, sa ville mère, celle du marché des Capucins et des quartiers populaires, qu’il décrit avec une grande tendresse dans ses romans.
François Garcia nous a donné rendezvous dans un café au marché des Grands Hommes, à deux pas de son cabinet, situé juste en face de l’incontournable librairie Mollat. Un café qu’il affectionne puisqu’il vient y écrire, le matin de bonne heure, avant d’ouvrir son cabinet. Ce petit-fils d’un Aragonais de Saragosse n’est pas misanthrope : la proximité de ses semblables l’aide à créer. Peut-être une déformation professionnelle du médecin, habitué à étudier les caractères et observer les comportements ?
Dans votre premier roman,
vous mettez en scène le marché des Capus, le ventre de Bordeaux. L’occasion de vous acquitter de votre enfance ?
de marché,
Jours J’ai effectivement grandi dans ce quartier. Notez que l’appellation « Capus » est assez récente et à la mode. Nous, on disait « Capucins ». Mes parents tenaient une épicerie cours de l’yser. Ma famille est arrivée à Bordeaux en 1860, comme tous ces Espagnols qui traversaient les Pyrénées à pied pour venir faire leur vie ici, fuyant la pauvreté ou les guerres carlistes. On évoque toujours la deuxième vague d’immigration pendant la guerre civile en 1936, mais celle du xixe siècle constitue la base de la communauté espagnole qui tient une grande place à Bordeaux : Goya, qui finit ses jours ici, fut l’un des immigrés les plus célèbres. Et n’oublions pas, trois siècles auparavant, Montaigne. Sa mère était une juive marrane, ce qui fait de lui l’un des premiers Espagnols de Bordeaux !
Les « Capus » d’aujourd’hui ressemblent-ils à ceux d’hier ?
Pas du tout ! Il faut imaginer deux pavillons de type Baltard, réunis par une galerie en fer et en verre, une activité débordante de marchands des quatresaisons en charrettes qui envahissaient les rues alentour. Sans oublier le marché de gros et de demi-gros qui est resté là jusqu’en 1960. Tout cela composait