LE GOÛT DES BEAUX PAYS
L’alsace est un pays totalement à part et à part entière – ce qui est vrai pour le Pays basque, la Bretagne, la Corse, l’auvergne et les autres… – mais sûrement un peu plus que les autres ! Gilles Pudlowski, Lorrain mosellan devenu Alsacien par amour, le clame dans son Dictionnaire amoureux de l’alsace : « Longtemps, j’ai cru que l’alsace était une région française. Avant de comprendre que cette terre si particulière et si particulariste – ce qui n’est pas la même chose – se suffisait à ellemême. » Et, Roger Siffer, l’écolo gaucho-râleur, le combatif comédien-chansonnier-cabaretier de La Choucrouterie (Surkrut Stub) et défenseur de la langue alsacienne, d’y aller de son refrain: « (Notre) situation historique tragique et (notre) situation géographique ont fait que c’est un pays qui a le sens de la moquerie et de l’autodérision. C’est peutêtre un des traits de caractère les plus intéressants et les plus originaux de ces fameux Alsaciens que je ne sais pas définir. » Alors, « Alsaceheureuse », conforme à la lourde imagerie patriotique de Hansi? À vous, visiteurs curieux, le soin de mesurer ce « BNB » (Bonheur national brut). Une chose est sûre, allez vous attabler dans une bonne winstub. Dans un de ces cocons cosy, où l’on respecte l’art consommé du bien-manger et du bien-vivre, bat le pouls de la ville et du pays.
« Vous ai-je parlé du bonheur, puisqu’il s’agit de cela ? Le bonheur sans éclat des pays dont l’âme s’éveille sous le regard qui s’attarde, ces pays que vous quittez mais qui ne vous quittent pas… », suggère le poète Jean-claude Pirotte, telle une invite à découvrir une Lorraine qui a hérité son nom de son premier roi, Lothaire II de
Lotharingie. De ce voyage lorrain, compère qu’as-tu vu ? Une terre tant de fois traversée par les guerres qu’elle demeurait toujours en veille, « terremémoire en alarme où, toujours, battait le sang de son passé ». Terre-frontière au carrefour de plusieurs civilisations qui, pour avoir été soumise à toutes les invasions, n’est pas seulement dépositaire d’une histoire souffrante. Elle s’est enrichie de tous les échanges, de tous les métissages. Il suffit de se laisser dériver au fil de la Meurthe, de la Moselle, de la Meuse pour débusquer un chapelet de cathédrales, d’abbayes, de châteaux.
Metz, minérale et « allemande » jusque dans ses pierres, et Nancy, raffinée et presque italianisante: deux capitales où l’art, la culture, la création n’ont jamais manqué de panache ni d’audace. Quant à une prétendue monotonie paysagère… Pour penser cela, dites-moi, vous n’êtes jamais passé par la Lorraine ou alors, avec de bien gros sabots! Des pentes douces des collines et des étangs du plateau lorrain aux côtes de Toul, en passant par le Pays-haut ou les forêts de la montagne vosgienne, la mélancolie ne sera jamais votre compagne. Dans les lumières et les odeurs des frémissements printaniers, passez par la Lorraine, vous m’en direz des nouvelles…
DOMINIQUE ROGER
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