LE ROI CHARLES VII FERA DE GRANVILLE UNE PLACE DÉFENSIVE. TOUTEFOIS, CE SONT LES TERRE-NEUVAS, DÈS LE XVIE SIÈCLE, PUIS LES CORSAIRES QUI FERONT SA RENOMMÉE.
et l’arrière-pays. Toutefois, ce sont les terre-neuvas, dès le xvie siècle, puis les corsaires, qui feront la renommée de la grande rivale de Saint-malo. Pêcheurs, armateurs, mais aussi banquiers et artisans, tous liés aux activités portuaires, peuplaient alors la « Haute-ville ».
LE TEMPS DES PÊCHEURSCORSAIRES
Pour accéder à l’ancienne cité perchée sur son rocher aux allures de forteresse avec ses murailles, nous empruntons la rue des Juifs qui mène à la Grand’porte. Depuis les hauteurs, nous avons une belle vue plongeante sur le port. « Pendant quatre siècles, les marins partaient vers Terre-neuve, au large du Canada, pour pêcher la morue. Un voyage difficile et long: il durait plus de six mois, commente Valérie Coupel. C’est parmi les meilleurs marins rompus aux navigations exigeantes qu’étaient sélectionnés les corsaires du roi, en temps de guerre. Ceux de Granville étaient grandement réputés. » Parmi eux : Georgesrené Pléville Le Pelley, affublé d’une jambe de bois. La statue érigée en son honneur, sabre au clair, semble encore vouloir défendre la ville. Le
port morutier est devenu depuis la première place coquillière de France grâce au bulot, la principale espèce à y être débarquée: 6000 tonnes chaque année.
UNE ÉGLISE NÉE DE LA MER
Nous franchissons le pont-levis et la Grand’
Porte, et nous sommes alors transportés au Moyen Âge, dans des ruelles pavées et désertes, à l’abri des hauts murs des bâtisses en granit et où seules les mouettes rieuses se font entendre. En prenant à gauche sur le chemin de ronde, impossible de ne pas remarquer la maison du Guet, un manoir à l’étrange architecture mêlant style normand à colombages et tourelles parées d’ardoise. « Elle a l’air très ancienne mais, en réalité, elle date du xxe siècle », nous confie Valérie Coupel. En face, Notredame-du-cap-lihou (xviie-xviiie siècles), édifiée sur un ancien site de pèlerinage, domine la ville depuis son parvis légèrement surélevé. « Cette église est résolument tournée vers la mer, avec ses deux chapelles consacrées à la Vierge et à saint Clément. Son existence même viendrait d’une statue de la Vierge remontée dans le filet d’un pêcheur ! » À l’intérieur, trois maquettes de bateaux : des ex-voto témoignant de la gratitude des marins réchappés d’un naufrage. Des vitraux aux couleurs éclatantes, réalisés par le maître verrier Jacques Le Chevallier (1896-1987), illuminent la nef.
UNE VILLE COMMERÇANTE
Depuis l’église, descendons la rue Notre-dame pour pénétrer dans la Haute-ville. Les rues Notre-dame et Saint-jean, les deux artères principales, coupent le secteur d’ouest en est, des venelles les traversent du nord au sud. Au numéro 8, Valérie Coupel nous montre une ancienne échoppe « que l’on reconnaît à sa pierre d’étal, sur laquelle étaient allongés les volets de la maison pour servir de présentoirs. Les boutiquiers agrandissaient ainsi leur espace. » À Granville, les rues du Marché : au-pain, aux-cuirs, au-blé…, disent tout des commerces qu’elles accueillaient autrefois. Sur la place Cambernon, le bar La Rafale, qui fut le lieu de rendez-vous des pêcheurs, constitue un point de repère pour les visiteurs. De là, ils doivent prendre la direction des remparts Nord par la rue de l’égout. Le nez au vent, l’archipel de
le premier l’idée de fonder ici une station balnéaire », éclaire Françoise Mouchel, auteure d’ouvrages sur la ville. En 1881, est ouvert l’hôtel des Bains au style anglo-normand. Suivent l’inauguration du casino aux tours symétriques inspiré de celui de Monaco, en 1911, et, dans la foulée, celle de l’hôtel Normandy. La promenade du Plat Gousset où s’alignent aujourd’hui les cabines de plage, voyait alors défiler « le beau monde ». Port paisible le reste de l’année, Granville était, « pendant les trois mois d’été, un quartier élégant de Paris », comme l’a souligné Christian Dior, l’enfant du pays, dans son autobiographie publiée en 1956. « Sous l’impulsion d’industriels qui veulent tous posséder