Detours en France

CORNOUAILL­E

- Carte :

1 à 2 jours

IGN 1:25 000, « Audierne-pointe du Raz-île de Sein » , 0419 ET et « Pont-l'abbé Pointe de Penmarc'h », 0519 OT

« L’homme n’est pas fait pour vivre là, pour supporter la nature à haute dose. » Ainsi écrivait Gustave Flaubert à propos de la pointe du Raz. On adhère. Comment sinon vivre serein sur ce plateau rocheux où l’océan, les vents et la pluie vous étreignent et éreintent jusqu’à devoir crier pouce? Bien sûr, l’été, il y a foule. Grand site de France, la pointe du Raz draine des flots d’autocars éparpillan­t leurs passagers sur la dernière poussée de l’europe continenta­le – Espagne et Portugal exceptés. Au-delà, ce sont les ultimes soubresaut­s rocheux, les phares de la Vieille, Tévennec et Armen, l’île de Sein et puis… plus rien, juste 3700 km de houle jusqu’à Saintpierr­e-et-miquelon. Mettre le pied sur cette lande désolée un jour de mauvais temps, quand le gris de la roche s’entremêle à celui du ciel, réveille de vieilles terreurs enfantines. Vite, un abri, loin du sémaphore et de l’oppressant­e statue de Notre-dame-des-naufragés! La pointe du Raz est fascinante mais n’est guère humaine… Et même la grande plage de sable de la baie voisine des Trépassés – nom tragique – ne peut faire oublier la poignante dérélictio­n des lieux.

Sur la ria du Goyen, fleuve côtier liant la ville à Audierne et à l’océan (lire aussi Goyen, évasion champêtre sur la ria, page de droite), Pont-croix s’affiche en Petite cité de caractère sur le coteau nord du cours d’eau. Adorable bourg, jadis bastion des seigneurs de Pont-croix et Rosmadec. Depuis le fond de vallée, les ruelles pavées de la Grande et de la Petite Rue Chère – du vieux français cheyère, choir –, grimpent au coeur de la cité en dévoilant de splendides maisons de granit aux murs percés de petites fenêtres. Maisons prébendale­s et du marquisat, vieilles échoppes médiévales, linteaux sculptés… les rues de la Prison, aux Oeufs et de Rosmadec livrent un authentiqu­e patrimoine médiéval, jalonné de quelques galeries. Points d’orgue de la visite: l’ancien couvent des Ursulines, abritant désormais appartemen­ts et médiathèqu­e, et la collégiale Notre-damede-roscudon.

Celle-ci, bâtie aux xiie et xiiie siècles puis plusieurs fois remaniée, abrite sur son flanc droit un remarquabl­e porche sculpté. L’intérieur présente de beaux vitraux et un Cêne du xviie siècle en bois. Plantée de marronnier­s et de platanes, la place centrale, ex-champ de foire et halles du xviie siècle (hélas démolies en 1949), clôt la découverte de la cité. Une halte bienvenue sur la route des falaises littorales.

11 km. C’est la distance de cet itinéraire en boucle qui longe depuis Pontcroix les deux rives du Goyen et glisse jusqu’à son embouchure, à Audierne. 11 km d’évasion entre chemin de halage et sentier de versant, suivant le rythme des marées qui emplissent ou vident la ria. À mer montante, le spectacle est fascinant. Le puissant courant entrave le flux timide de la rivière, formant une écume blanche propulsée vers l’amont. Mouettes et cormorans se régalent de ce brassage dans lequel les poissons s’empêtrent. À mesure que Pont-croix s’éloigne, le bourg apparaît comme un écrin de rivage. Un paysage romantique pour impression­nistes, dominé par les 67 mètres du clocher de la collégiale. Il faut une heure pour atteindre Audierne, après avoir longé des lagunes et une anse. L'agitation qui règne sur le port breton dénote dans cette balade plutôt silencieus­e. Pont traversé, il convient de grimper à gauche jusqu’au château de

Locquéran pour retrouver le sentier. Le retour est vallonné. En partie en sousbois, il ouvre des vues nouvelles. Vierge de bateaux, le Goyen forme à pleine marée un estuaire olympien, troublé par les cris menaçants de choucas s’en prenant à une buse. Pont-croix réapparaît. On rejoint la cité par l’ancien port et le pont, précédé de l’antique moulin à mer du xvie siècle. Là, le hameau portuaire de Keridreuff rappelle que s’il fut un havre actif, Pont-croix est désormais un point de départ et d’arrivée d’un circuit bucolique entre Argoat et Armor.

Ils s’appellent Le Vorlen, Bestrée, Feunteun Aod, Pors Loubous. Depuis Plogoff et la baie des Trépassés, on y accède par des routes anonymes, comme s’ils voulaient rester cachés. Au bout de quelques virages, la route descend subitement, découvrant la lande rocheuse et l’immensité océane. Voilà donc ces échancrure­s, à demi-protégées dans les falaises du Raz, seuls abris de fortune contre les violentes tempêtes. Les canots de mer y sont relevés par treuil, hauts sur les rochers, histoire d’échapper à la furie atlantique. Les ligneurs de bars s’y abritent. Les pêcheurs amateurs viennent y boire des canons dans des cabanons de bric et de broc. Jadis, l’abri de Bestrée fut le port de départ pour ravitaille­r les gardiens du phare de la Vieille. Un quai d’embarqueme­nt à peine moins secoué que le fanal planté au large.

Leur discrétion a valu à ces anses de connaître quelques faits d’histoire. Ainsi, en février 1944, Feunteun Aod accueillit un bateau en perdition, Le Jouet des Flots. À son bord, 32 résistants et aviateurs, recueillis après une tentative avortée de rallier l’angleterre par la Manche. Parmi eux se trouvait Pierre Brossolett­e, héros de la Résistance. Il se suicidera un mois plus tard dans les locaux de la Gestapo parisienne, pour ne pas avoir à trahir ses secrets. Avant lui, le 22 décembre 1940, Honoré d’estienne d’orves avait débarqué dans le port-abri voisin, Pors-loubous. Lui venait de traverser la Manche envoyé par de Gaulle pour organiser un réseau de renseignem­ent dans l’ouest de la France. Son destin ne sera pas moins tragique: il sera fusillé par les Allemands en août 1941 au Mont-valérien.

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doit son originalit­é architectu­rale
à ses différente­s influences :
romane bretonne, gothique, anglaise. La nef de 21 mètres et le transept sont les parties les plus anciennes
de l'édifice.
Joyau de Pontcroix, l'église catholique Notre-damede-roscudon (xiiiexvie siècles) doit son originalit­é architectu­rale à ses différente­s influences : romane bretonne, gothique, anglaise. La nef de 21 mètres et le transept sont les parties les plus anciennes de l'édifice.
 ??  ?? Au départ du village médiéval de Pont-croix, cette excursion pédestre de 11 km dans la vallée de Goyen, à travers des sentiers balisés qui serpentent entre bois et prairies, vous conduit au port d'audierne. Le retour vers la Petite cité de caractère à travers la campagne vallonnée est aussi agréable. Outre la visite de Pont-croix, la balade offre de nombreuses découverte­s: des parcs à huîtres aux aigrettes en train de pêcher en passant par une flore diversifié­e, entre autres merveilles.
Au départ du village médiéval de Pont-croix, cette excursion pédestre de 11 km dans la vallée de Goyen, à travers des sentiers balisés qui serpentent entre bois et prairies, vous conduit au port d'audierne. Le retour vers la Petite cité de caractère à travers la campagne vallonnée est aussi agréable. Outre la visite de Pont-croix, la balade offre de nombreuses découverte­s: des parcs à huîtres aux aigrettes en train de pêcher en passant par une flore diversifié­e, entre autres merveilles.
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