NOTRE SÉLECTION DE LIVRES
Le Grand Jabadao, de Jean-luc Coatalem, éd. Le Dilettante, 2022, 192 p., 17 €.
Oubliez vite la couverture… et plongez à corps perdu dans une histoire où la noirceur est illuminée par des éclats de loufoquerie. Dans ce roman au rythme enlevé, il y a tout l’univers de prédilection de son auteur : une langue travaillée au riche vocabulaire, un humour pince-sans-rire, la passion de l’art et de Gauguin, cette finis terrae
armoricaine qui est son univers. Comme très souvent dans l’oeuvre de Coatalem, les lieux où il enracine ses histoires romanesques, ses intrigues, ses enquêtes sont des personnages à part entière. Prenez nos trois protagonistes:
Zac Kervern et son frère Bram, leur nièce Ziaska, leur fief, c’est îlot de Térénez à l’embouchure de l’aulne auxquels ils sont attachés – prisonniers ? – comme bernique à son caillou. C’est dans ce biotope qu’ils vivent, survivent et montent leur arnaque au faux Gauguin, un nu de Marie Henry (« image à la fois […] obscène et ingénue »), la patronne de la « Buvette de la plage » au Pouldu, qui accueillit Paul Gauguin. Bastien Scorff, galeriste et marchand d’art parisien, et Donato, rejeton d’une riche famille d’affairistes, perdront au coeur de ce bout du monde tout repère pour l’un et la vie pour l’autre. À l’instar des héros des films de Frères Coen, ceux du Grand Jabadao,
cette étourdissante danse cornouaillaise héritière des contredanses françaises du siècle, sont des caricatures.
Et, en cela, il ne faut pas entendre une critique négative, bien au contraire. Ils forment une galerie de personnages un peu grotesques mais qui cherchent éperdument à conjurer l’acharnement du sort. Et « que l’imaginaire soit! »
Vélo ! de Stéphane Dugast, Glénat, 2021, 192 p., 35,50 €. stephanedugast.com
Stéphane Dugast est du genre couteau suisse de l’aventure avec un A majuscule. Journaliste, réalisateur de documentaires, écrivain, conférencier, guide polaire, explorateur… ce toucheà-tout n’aime qu’une chose: pérégriner dans les mondes sauvages et les dernières terrae incognitae de notre Terre. Au gré de ses reportages immersifs, on le localise robinsonnant sur l’atoll de Clipperton, tirant des bords sur le Belem au fil du fleuve Amazone ou traversant l’hexagone à vélo. De ce périple baptisé La France réenchantée accompli durant l’été 2020 entre Dunkerque et Hendaye, via ce que les géographes dénomment « la diagonale du vide », il a prolongé sa passion pour la petite reine en consacrant un album à la saga du vélo. Ce récit inédit, illustré de documents rares, est un voyage sur le grand braquet dans le temps et dans notre géographie.