Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Elle chante pour la cause de son pays, l’Ukraine
À 26 ans, Maryna Krut est une artiste reconnue en Ukraine. Avec ses chansons, elle défend la cause de son pays, avec des concerts caritatifs à l’étranger et en encourageant les soldats sur le front.
On découvre Maryna Krut lors d’un concert de soutien à l’Ukraine, à Rennes. La jeune chanteuse, compositrice et poète joue du bandoura, un instrument traditionnel ukrainien, sorte de luth de soixante- quatre cordes qui remonterait au XIVe siècle. Sur la scène comme en coulisses, la jeune Ukrainienne affiche un sourire lumineux qui ne la lâchera quasiment pas de la soirée malgré l’émotion, palpable.
« Maryna Krut est très connue en Ukraine », confie Ivanna Baron, présidente de Solidarité Bretagne- Ukraine, l’association organisatrice de la soirée. « Je la suis depuis plusieurs années. Elle représente vraiment l’ADN de la culture ukrainienne, dans tous ses styles, classiques et très modernes. » De sa voix chaude et enveloppante, l’artiste revisite des mélodies et berceuses traditionnelles et crée des compositions aux accents soul et jazz. Avec, aussi, des rythmes et textes mélancoliques évoquant le quotidien sous la guerre.
« C’est violent mais on s’adapte »
Originaire du centre- ouest de l’Ukraine, Maryna Krut vit, depuis le début du conflit, à Lviv, une grande ville complètement à l’ouest et donc éloignée de la ligne de front. « On ne se sent en sécurité nulle part, rappellet- elle. Les bombardements, les sirènes, le couvre-feu, les coupures d’électricité créent un stress permanent. Pourtant, même si ça semble violent de dire cela, on arrive à s’adapter et à vivre avec. »
Maryna Krut a mis le pied à la gare de Rennes la veille du concert. À pei
ne arrivée, déjà repartie : elle reprend le train pour Paris dès le lendemain. Puis l’avion, direction Varsovie et enfin le car pour franchir la frontière et rejoindre son pays en guerre. Quatre jours loin de l’Ukraine. Pas question de s’éterniser davantage. « Je ne veux pas partir plus longtemps parce que je pense que cela me changerait », explique- t- elle aux 300 spectateurs venus l’écouter, parmi lesquels de nombreuses Ukrainiennes vivant en Bretagne.
En coulisses, plus tard, la chanteuse détaille. « Quand je vais donner des concerts à l’étranger, on ne me trouve pas raisonnable. On me dit que je suis folle de rentrer en Ukraine où il y a des bombes qui tombent, où on est en danger. Mais moi, je ne peux pas rester longtemps loin de mon pays alors qu’il s’y passe des événements horribles. Vivre les choses à distance, c’est très dur. J’ai besoin d’être en Ukraine. »
L’histoire en construction
Sa vie est là- bas, avec ses parents, ses amies. Son « chéri » mobilisé sur le front comme son directeur artistique et comme la moitié des hommes de son entourage. Il y a trois semaines, Maryna Krut était dans le Donbass, où elle se rend régulièrement, pour chanter et remonter le moral des soldats sur la ligne de front. « J’y vais pour voir, prendre conscience ce qui se passe. J’en ai vraiment besoin. C’est l’histoire de l’Ukraine qui est en train de se jouer. Je veux être au coeur de cette histoire en construction. Ce qui se passe sera déterminant pour le futur des gens de ma génération. »
Elle vient de rater de peu sa sélection à l’Eurovision 2023, finissant deuxième avec une chanson sur la vie d’un bébé dans l’Ukraine en guerre. Mais Maryna Krut continuera à faire entendre sa voix, dans son pays et à l’étranger, pour donner à voir et à entendre « la culture ukrainienne et pour faire connaître son pays à travers autre chose que la guerre ».