Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Guenièvre et Lancelot, la légende de Camelot

Un château, une histoire d’amour. Histoire et légende se mêlent dans ce château breton qui abrita, dit- on, les amours maudites de Lancelot du Lac et de la troublante Guenièvre…

- Françoise SURCOUF.

Guenièvre et Lancelot, c’est, sans nul doute, l’un des couples les plus mythiques de la littératur­e amoureuse et chevaleres­que. Le chevalier, dès l’abord, apparaît comme le plus grand des braves, le parfait amant, le fils de la fée, l’enfant de Brocéliand­e. « Jamais on ne vit un être rayonnant de tant de beauté, de valeur et de quête », affirment les vieux contes. Quant à la reine, sa beauté fait encore rêver…

Lancelot, né vers 480, est le fils du roi Ban de Bénoïc et de son épouse Élaine. Il descend d’une prestigieu­se lignée qui remonte à Joseph d’Arimathie, celui qui a recueilli le sang du Christ dans le saint Graal et l’a rapporté en terre bretonne. Enlevé par la fée Viviane quand il était enfant, à la mort de son père, il est élevé dans son magnifique palais enchanté au fond du lac, en forêt de Brocéliand­e. L’ensorceleu­se l’y choie et lui offre une éducation parfaite. Il devient « le « beau trouvé », ignorant de ses origines.

Une liaison scandaleus­e

À 20 ans, lorsqu’il est en âge d’affronter le monde, la fée le mène à la cour du roi Arthur pour le faire adouber. Dernier venu à la Table ronde, il connaît l’aventureus­e vie des chevaliers. Voué aux plus beaux combats, aux plus rares exploits, il est celui avec qui on ne peut rivaliser à moins de recourir à la magie. Ses armes d’argent lui valent le surnom de Blanc Chevalier.

Guenièvre est la fille de Léodégan de Carmelide et l’épouse du roi Arthur. Son nom vient du gallois Gwenhwyfar, « Blanc Fantôme ». Grâcieuse et diaphane, elle semble ne pas appartenir totalement au monde réel. Sa beauté et son élégance font d’elle la souveraine incontesté­e de la cour de son époux, à Camelot. Mariée par raison plus que par amour, elle est cependant fidèle à la parole donnée… jusqu’au jour où Lancelot fait son apparition.

Dès la première minute, le héros sait que la belle Guenièvre va marquer son destin. Il devient vite le Chevalier favori du roi, son ami le plus proche, presque son frère, et le sert le plus fidèlement possible malgré l’amour qu’il porte à la reine et qui le dévore. Les prétendant­es ne manquent pas autour de lui, mais son coeur ne bat que pour sa reine. Ses exploits, aven

tures et conquêtes, le ramènent toujours auprès de Guenièvre.

Le coup de foudre est réciproque. Grâce à l’entremise de Galehaut, autrefois son adversaire mais que son courage a séduit et qui est devenu son ami, il rejoint sa belle en cachette le plus souvent possible. Mais la situation devient vite impossible. Les amants vivent une idylle passionnée qu’ils doivent taire aux yeux de tous.

« Douloureus­e Garde »

C’est Guenièvre qui va confier à Lancelot la mission de délivrer de ses maléfices la « Douloureus­e Garde », un château autour duquel sont dressées deux gigantesqu­es murailles, ouvertes par une seule et unique porte d’où s’élèvent des hurlements et des sanglots. Son gouverneur est le cruel Brandus, qui garde prisonnier son peuple et le torture à plaisir. Bien des hommes ont voulu délivrer les malheureux, nul n’y est jamais parvenu.

Mais la fée Viviane veille sur son fils adoptif. Elle lui confie trois écus, chacun imprégné d’un pouvoir qui lui donnera de nouvelles forces et lui permet

tra de vaincre à lui seul les trente hommes qui tiennent les lieux. Lorsque le combat cesse enfin, le héros est cerné des cadavres des soldats, mais les cris de douleurs et d’agonie se sont enfin tus à l’intérieur de la « Douloureus­e Garde ». Lancelot pénètre dans le château. À l’intérieur, le spectacle que le héros découvre est terrible : hommes, femmes et enfants hâves, maigres, sales et couverts de cicatrices. Il délivre les malheureux et tente de mettre la main sur Brandus. Mais le lâche s’est enfui. Le vainqueur décide alors de rebaptiser le château et, lors d’un grand festin, la « Douloureus­e Garde » devient « Joyeuse Garde », fief de Lancelot du Lac.

Le repenti

Mais le roi Arthur finit par surprendre les amants adultères. Lancelot est chassé de la Table ronde et Guenièvre condamnée au bûcher. Alors qu’elle s’avance vers le lieu de son supplice, des cavaliers arrivent, le Blanc Chevalier à leur tête. La bataille fait rage entre les deux camps. Lancelot parvient à triompher de ses adversaire­s, sauve

Guenièvre et l’emmène à Joyeuse Garde, son unique possession qui devient ainsi leur refuge face à la colère d’Arthur. Ce dernier met alors le siège devant la forteresse.

Bientôt, las de cette guerre inique, bouleversé d’avoir trahi son roi et failli à l’honneur, Lancelot finit par faire repentance. Il demande au roi d’accepter son exil et d’épargner la reine. Abandonnan­t sa place forte, il quitte le royaume.

Il ne sera de retour qu’après la mort d’Arthur pour défendre une fois encore le trône contre les ennemis du défunt roi et faire triompher les valeurs de la Table ronde. Devenue moniale, Guenièvre s’éteint à son tour dans un couvent à Glastonbur­y, en Angleterre. Lancelot, retiré du monde, fait un rêve prémonitoi­re : il voit sa bien-aimée mourante. Il accourt alors au monastère mais elle a déjà rendu l’âme, rompant le dernier lien qui l’attachait encore aux choses terrestres. Regagnant son ermitage, il meurt peu après son ami Galehaut, auprès duquel il est enterré.

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PHOTO ARCHIVES OUEST-FRANCE Les vestiges du château de Joyeuse Garde, dans le Finistère, fief de Lancelot du Lac.

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