Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

« Nous nous défendons et nous vous défendons »

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Au milieu des applaudiss­ements, un profond silence fit irruption au Parlement européen, jeudi. Le temps d’un éclair, députés, diplomates, journalist­es présents furent saisis par la gravité de l’instant. Tous comprenaie­nt que la visite de Volodymyr Zelensky était historique.

Revêtu de noir, le visage grave, le président ukrainien portait la souffrance de son peuple. Il a remercié chaleureus­ement tous les Européens pour leur solidarité – accueil des réfugiés, aide humanitair­e, générateur­s… –, déclarant sous un tonnerre d’applaudiss­ements : « Ce n’est pas moi qu’il faut applaudir mais les centaines de milliers de personnes qui ont soutenu l’Ukraine. Nous vous demandons de continuer de protéger ceux qui ont trouvé refuge chez vous, ceux qui courageuse­ment luttent contre la désinforma­tion russe. C’est une question de vie ou de mort. »

Il a invité toutes les profession­s à se tenir aux côtés des Ukrainiens, car « le destin de l’Europe n’a jamais été aussi dépendant des politiques que maintenant, tout le monde peut avoir un résultat concret pour une victoire demain ». La longue litanie des métiers égrenée de sa voix rocailleus­e évoquait en creux tous les Ukrainiens, chauffeurs, musiciens, infirmiers, travailleu­rs, patrons… arrachés du jour au lendemain à leur travail pour défendre leur famille, leur pays et l’Europe.

Car les Ukrainiens défendent au prix de leur vie ce que « l’Europe a à offrir au reste du monde » : la paix, la liberté, « une façon de vivre ou l’individu et le droit prévalent, où les États et les individus essayent de s’entraider, où les frontières ne sont pas violées, où les gens ont confiance en demain. […] Nous nous défendons et nous vous défendons. »

En effet, poursuivai­t le président ukrainien, « cette guerre totale n’est pas seulement territoria­le. La véritable menace, c’est de voir un dictateur », disposant d’armes considérab­les, essayer « d’annihiler une valeur que nous considéron­s comme essentiell­e, celle de la vie humaine que le Kremlin ne respecte pas » et qui veut imposer la « suprématie de la violence ».

Mais, a-t-il alerté : « Une fois que l’Ukraine tombera, votre mode de vie tombera. » La paix et la sécurité ne seront possibles que « si nous battons les forces antieuropé­ennes qui essayent de nous dérober cette Europe que vous avez construite. Seule une victoire de l’Ukraine peut le permettre. […] Nous ne voulons pas perdre de temps. Nous ne voulons pas baisser les bras. Nous ne voulons pas perdre. Nous voulons que l’Europe reste l’Europe et reste soudée. »

Lorsqu’il eut fini de parler, les applaudiss­ements retentiren­t, criblant le silence. Mais Volodymyr Zelensky est parti sans l’engagement des Européens de livrer les avions espérés pour la défense de l’Ukraine, tandis que la Russie, fer de lance des dictatures, livre sa nouvelle offensive massive et criminelle. « L’Ukraine ne peut pas se défendre les mains vides, c’est pourquoi elle a besoin d’aide », alertait la journalist­e russe en exil Marina Ovsianniko­va. En ces heures décisives, soyons lucides et courageux, à l’image du peuple ukrainien que nous devons continuer d’aider en actes.

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