Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
États-Unis : nouvelle offensive contre l’avortement
Un juge fédéral ultraconservateur du Texas a ordonné le retrait du marché de la mifépristone. La pilule abortive, utilisée depuis vingt-trois ans par des millions d’Américaines, serait dangereuse.
Analyse
Dix mois après la décision historique de la Cour suprême d’annuler son arrêt de 1973 et de rendre à chaque État américain la liberté d’interdire sur son sol les interruptions de grossesse, la droite conservatrice et religieuse est toujours à l’offensive.
Non seulement les pro-life veulent pousser un maximum d’États à bannir l’IVG (ils sont déjà quatorze à le faire, sauf danger pour la mère), mais ils veulent aussi empêcher les femmes vivant dans des États libéraux d’exercer leur droit…
Pilule massivement utilisée
Vendredi, un juge fédéral du Texas a ainsi ordonné à l’Agence américaine des médicaments (FDA) de retirer dans l’ensemble du pays l’autorisation de mise sur le marché, accordée en 2000, à la mifépristone.
Cette pilule abortive, associée à un autre médicament, est la procédure la plus utilisée aux États-Unis, soit dans la moitié des quelque 950 000 avortements annuels. En 2016, la FDA l’a autorisée sur ordonnance de médecins agréés jusqu’à dix semaines de grossesse, contre sept précédemment.
Quels motifs invoque le juge Matthew Kacsmaryk ? Les risques imputés à la mifépristone, bien qu’ils soient jugés négligeables par l’immense majorité des médecins et que la pilule est utilisée aux États- Unis depuis vingt-trois ans. Les ultraconservateurs de l’Alliance Defending Freedom n’ont pas saisi ce magistrat par hasard. Nommé en 2017 par Donald Trump, Matthew Kacsmaryk, 67 ans, est un militant chrétien anti-avortement de longue date.
Contre-plainte déposée
Sa décision a provoqué des réactions très vives. Jusqu’au président Joe Biden qui s’est dit déterminé à la « combattre », la qualifiant de « tentative sans précédent de priver les femmes de libertés fondamentales ». La FDA a déjà fait appel, ce qui suspend automatiquement la décision du juge Kacsmaryk.
Quelques heures plus tard, un autre juge fédéral, saisi d’une contre-plainte dans l’État de Washington, au nordouest du pays, par dix-sept États proavortement à majorité démocrate, a ordonné, lui, à la FDA de s’abstenir de « changer le statu quo et les droits relatifs à l’accès à la mifépristone » dans ces États.
Dans l’immédiat, le statu quo, donc l’accès à la mifépristone, demeure. Au bout du cycle des appels, les deux affaires vont probablement remonter jusqu’à la Cour suprême. Et c’est probablement le pari que font les opposants à l’avortement.
Lors de sa présidence, Donald Trump a pu nommer trois des neuf juges à vie, faisant basculer la Cour suprême résolument dans le camp conservateur.