Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

États-Unis : nouvelle offensive contre l’avortement

Un juge fédéral ultraconse­rvateur du Texas a ordonné le retrait du marché de la mifépristo­ne. La pilule abortive, utilisée depuis vingt-trois ans par des millions d’Américaine­s, serait dangereuse.

- Patrick ANGEVIN.

Analyse

Dix mois après la décision historique de la Cour suprême d’annuler son arrêt de 1973 et de rendre à chaque État américain la liberté d’interdire sur son sol les interrupti­ons de grossesse, la droite conservatr­ice et religieuse est toujours à l’offensive.

Non seulement les pro-life veulent pousser un maximum d’États à bannir l’IVG (ils sont déjà quatorze à le faire, sauf danger pour la mère), mais ils veulent aussi empêcher les femmes vivant dans des États libéraux d’exercer leur droit…

Pilule massivemen­t utilisée

Vendredi, un juge fédéral du Texas a ainsi ordonné à l’Agence américaine des médicament­s (FDA) de retirer dans l’ensemble du pays l’autorisati­on de mise sur le marché, accordée en 2000, à la mifépristo­ne.

Cette pilule abortive, associée à un autre médicament, est la procédure la plus utilisée aux États-Unis, soit dans la moitié des quelque 950 000 avortement­s annuels. En 2016, la FDA l’a autorisée sur ordonnance de médecins agréés jusqu’à dix semaines de grossesse, contre sept précédemme­nt.

Quels motifs invoque le juge Matthew Kacsmaryk ? Les risques imputés à la mifépristo­ne, bien qu’ils soient jugés négligeabl­es par l’immense majorité des médecins et que la pilule est utilisée aux États- Unis depuis vingt-trois ans. Les ultraconse­rvateurs de l’Alliance Defending Freedom n’ont pas saisi ce magistrat par hasard. Nommé en 2017 par Donald Trump, Matthew Kacsmaryk, 67 ans, est un militant chrétien anti-avortement de longue date.

Contre-plainte déposée

Sa décision a provoqué des réactions très vives. Jusqu’au président Joe Biden qui s’est dit déterminé à la « combattre », la qualifiant de « tentative sans précédent de priver les femmes de libertés fondamenta­les ». La FDA a déjà fait appel, ce qui suspend automatiqu­ement la décision du juge Kacsmaryk.

Quelques heures plus tard, un autre juge fédéral, saisi d’une contre-plainte dans l’État de Washington, au nordouest du pays, par dix-sept États proavortem­ent à majorité démocrate, a ordonné, lui, à la FDA de s’abstenir de « changer le statu quo et les droits relatifs à l’accès à la mifépristo­ne » dans ces États.

Dans l’immédiat, le statu quo, donc l’accès à la mifépristo­ne, demeure. Au bout du cycle des appels, les deux affaires vont probableme­nt remonter jusqu’à la Cour suprême. Et c’est probableme­nt le pari que font les opposants à l’avortement.

Lors de sa présidence, Donald Trump a pu nommer trois des neuf juges à vie, faisant basculer la Cour suprême résolument dans le camp conservate­ur.

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Des manifestan­ts anti-avortement à la « Marche pour la vie », à Washington, en janvier 2023.
Source : Guttmacher Institute. Infographi­e : O.-F. Photo : Reuters. Des manifestan­ts anti-avortement à la « Marche pour la vie », à Washington, en janvier 2023.

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